Bateaux (Eau-forte. — Epreuve unique)
enferme si vo-
lontiers les crea-
teurs dans une
formule. II s’etait
degage de celle
qu’il avait creee.
Apres avoir peint
dans des inte-
rieurs volontaire-
ment assombris,
il etait sorti dans
le verger ä l’heure
la plus brülante
du jour. Cela ne
manquait pas de
bravoure d’aban-
donner la certi-
tude du succes
et de la vente
pour la seule
satisfaction de
peindre ä son
essentiels, le jeune peintre sortait toujours
plus fort et le cerveau lucide. Un element
purificateur passait sur sa vision.
Penetre de ces principes eleves, il re-
tournait dans sa Bretagne inspiratrice et
s’y adonnait ä un labeur opiniätre. C’est
alors qu’il produisit successivement entre
autres oeuvres : Le Benedicite, acquis par
l’Etat au Salon de 1901 et place au Musee
du Luxembourg; A midi che^ les paysans,
que la 4e Commission du Conseil muni-
cipal eut l’heureuse initiative d’acheter
au Salon de 1902 et qui figure mainte-
nant au Petit Palais; Les derniers conseils
d'un laboureur a ses enfants (Salon de
1903); Femme ä la baratte et Vieux loup
de mer -fumant sa pipe (Salon de 1904);
enfin en 1905 1’Homme des champs et Sous
les Pommiers.
Cette derniere toile etait ä la fois un
acte de courage de l’artiste, une revelation
et un etonnement pour ses amis, en meme
temps qu’une cause de trouble pour le visi-
teur accoutume des grandes halles ä ta-
bleaux. Cet amateur superficiel n’aime pas
en effet ä etre deroute et goüte vivement la
satisfaction d’etaler ses connaissances pic-
turales, en s’ecriant ä une distance oü la
signature est invisible : «Tiens, voilä le
Un Tel!» Desire Lucas, en 1905, a en-
couru l’anatheme du public special qui
Petite fille a la cruche (fragment)
(Photographie Braun)