L’ART DÉCORATIF
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pérature humide sans évidence. La statue apportait à l’heure et au paysage sa certi-
tude et sa sérénité. Elle nous don-
nait, par contraste, des émotions
plus claires que si nous l’avions
aperçue tout à coup dans le luxe
et la paix d’un automne, dans la
force d’un été, dans l’éveil d’un
printemps menant ses pousses
aux troncs des arbres.
Je voudrais dire comment Mail-
loi, statuaire, atteignit celte calme
certitude qui est la sienne et qu’il
est seul à posséder parmi les
sculpteurs français d’aujourd’hui.
Un sculpteur véritable, qui
pense en sculpteur, est, dans notre
époque, un prodige. La pierre de
la statue fut jadis la sœur jumelle
de la pierre des maisons. Et sépa-
rée du mur, où que soit posée la
statue de pierre ou de bronze, elle
est une architecture, un volume
dans l’espace et ne laisse pas in-
tacte l’architecture de la maison
ou du monument. L’art de l’archi-
tecte étant mort— ou à naître —
la statue semble de nos jours sans
prétexte.
Le tableau de chevalet s’en va
d’un mur à l’autre. Le cadre seul
est son lien avec le mur. Le tableau
est un poème que nous accrochons
à notre mur. Le peintre y mit ce
qu’il voulut de sa pensée, de son
sentiment, de sa sensation. Le
peintre est libre et se raconte.
Comme un écrivain choisit des
mots, il choisit des couleurs, il
choisit la lumière. Le cadre isolant
enferme une pensée et la protège
aussi bien qu’une reliure garde les
pages d’un livre. Un tableau as-
semble des signes. Mais la sta- femme drapée debout
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pérature humide sans évidence. La statue apportait à l’heure et au paysage sa certi-
tude et sa sérénité. Elle nous don-
nait, par contraste, des émotions
plus claires que si nous l’avions
aperçue tout à coup dans le luxe
et la paix d’un automne, dans la
force d’un été, dans l’éveil d’un
printemps menant ses pousses
aux troncs des arbres.
Je voudrais dire comment Mail-
loi, statuaire, atteignit celte calme
certitude qui est la sienne et qu’il
est seul à posséder parmi les
sculpteurs français d’aujourd’hui.
Un sculpteur véritable, qui
pense en sculpteur, est, dans notre
époque, un prodige. La pierre de
la statue fut jadis la sœur jumelle
de la pierre des maisons. Et sépa-
rée du mur, où que soit posée la
statue de pierre ou de bronze, elle
est une architecture, un volume
dans l’espace et ne laisse pas in-
tacte l’architecture de la maison
ou du monument. L’art de l’archi-
tecte étant mort— ou à naître —
la statue semble de nos jours sans
prétexte.
Le tableau de chevalet s’en va
d’un mur à l’autre. Le cadre seul
est son lien avec le mur. Le tableau
est un poème que nous accrochons
à notre mur. Le peintre y mit ce
qu’il voulut de sa pensée, de son
sentiment, de sa sensation. Le
peintre est libre et se raconte.
Comme un écrivain choisit des
mots, il choisit des couleurs, il
choisit la lumière. Le cadre isolant
enferme une pensée et la protège
aussi bien qu’une reliure garde les
pages d’un livre. Un tableau as-
semble des signes. Mais la sta- femme drapée debout