L’ART DÉCORATIF
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L’ardeur de Rodin mil dans la pierre la circulation d’un sang torrentueux, autour de
la pierre, une lumière qui naît de la
pierre. Rodin est unique dans sa solitude
de Pan. Maillot est de ceux qui relient le
Musée à la vie.
Non pas que Rodin soit isolé du
passé. Nul grand artiste n’est seul. Les
sculptures du Turkestan chinois du
vin6 siècle, les sculptures japonaises des
Xe, xie et xne siècles sont tout près des
sculptures gothiques, allemandes ou
françaises. La seule parenté véritable est
celle qui lie le génie au génie et la force
à la force. Ainsi les phares, à des milliers
de lieux les uns des autres, éclairent des
mers et des rivages différents. L’atmos-
phère que leurs rayons traversent n’est
pas la même. Mais ils projettent une
égale lumière tournoyante. Telle est la
parenté de Rodin aux Grecs.
C’est par un autre instinct que Mail-
lot retrouva, dans une époque qui ignore
la sculpture, la possibilité paradoxale
d’être sculpteur.
Il n’est plus de monuments, ou plu-
tôt nos seuls monuments, halls et gares,
n’ont pas accueilli, et peut-être n’accueil-
leront jamais la sculpture. Et voici que
Maillol fait décoratives et monumentales
les statues transportables, isolées du
mur, sans lien avec la maison, par sa
volonté.
Ainsi Cézanne créa, à l’intérieur d’un
cadre mobile, une peinture d’apparence
indestructible et comme indéplaçable.
Maillol aimait les musées. Peut-être
les aima-t-il avant d’aimer la vie. C’est
aux musées qu’il demanda, dès sa jeu-
nesse, le secret d’un art monumental, le
secret même de la sculpture, qui est le
plus matériel, et aussi le plus abstrait
des arts. Une femme nue sur un socle
est palpable dans l’espace, aussi bien
qu’un vase tourné par un potier, aussi
FEMME DEBOUT, VUE DE FACE
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L’ardeur de Rodin mil dans la pierre la circulation d’un sang torrentueux, autour de
la pierre, une lumière qui naît de la
pierre. Rodin est unique dans sa solitude
de Pan. Maillot est de ceux qui relient le
Musée à la vie.
Non pas que Rodin soit isolé du
passé. Nul grand artiste n’est seul. Les
sculptures du Turkestan chinois du
vin6 siècle, les sculptures japonaises des
Xe, xie et xne siècles sont tout près des
sculptures gothiques, allemandes ou
françaises. La seule parenté véritable est
celle qui lie le génie au génie et la force
à la force. Ainsi les phares, à des milliers
de lieux les uns des autres, éclairent des
mers et des rivages différents. L’atmos-
phère que leurs rayons traversent n’est
pas la même. Mais ils projettent une
égale lumière tournoyante. Telle est la
parenté de Rodin aux Grecs.
C’est par un autre instinct que Mail-
lot retrouva, dans une époque qui ignore
la sculpture, la possibilité paradoxale
d’être sculpteur.
Il n’est plus de monuments, ou plu-
tôt nos seuls monuments, halls et gares,
n’ont pas accueilli, et peut-être n’accueil-
leront jamais la sculpture. Et voici que
Maillol fait décoratives et monumentales
les statues transportables, isolées du
mur, sans lien avec la maison, par sa
volonté.
Ainsi Cézanne créa, à l’intérieur d’un
cadre mobile, une peinture d’apparence
indestructible et comme indéplaçable.
Maillol aimait les musées. Peut-être
les aima-t-il avant d’aimer la vie. C’est
aux musées qu’il demanda, dès sa jeu-
nesse, le secret d’un art monumental, le
secret même de la sculpture, qui est le
plus matériel, et aussi le plus abstrait
des arts. Une femme nue sur un socle
est palpable dans l’espace, aussi bien
qu’un vase tourné par un potier, aussi
FEMME DEBOUT, VUE DE FACE