Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Le charivari — 11.1842

DOI Heft:
Juillet (No. 182-212)
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.17321#0790
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
WÊÊ&ÊmM

Nos abonnés auraient droit de se faire restituer au moins
cinquante centimes sur le prix de leurs trimestres, si au
nombre de ces phëhômènes volatiles nous négligions de
faire figurer celui qui vient d'épouvanter la bonne ville
de Metz, une des cités les plus patriotes et pourtant les
plus mal en députés de France.

Vous avez lu dans les journaux qu'il y a trois on
quatre jours on pouvait voir planer au dessus de la cathé-
un gros oiseau dé proie qui tout à coup à
fondu sur le toit. Malheureusement pour elle, cette vo-
laille, qui élait sans doute aveugle comme un ministre
constitutionnel, n'a pas pris garde à un paratonnerre, et
s'est cruellement enferrée dessus. Le paratonnerre, ce no-
ble instrument destiné , comme dit Ouvert, à empaler la
foudre, a dû être bien humilié de se trouver ainsi trans-
formé momentanément en une broche à rôti.

Le malencontreux oiseau a eu beau se démener, il lui
a fallu rester accroché k sa lamentable aiguille. Il y
est encore au grand ébahissement des curieux, qui ac-
courent de toutes parts pour voir ce singulier spectacle.

Le journal ministériel de l'endroit dit que la position
de cet animal ainsi enfourché est fort intéressante au point
de vue de l'art, et qu'il est fâcheux qu'il ne puisse y
rester à demeure. Que le journal bien pensant se rassure!
notre collaborateur Louis Huart est en ce moment k
Metz, sa ville d'adoption; et, comme il est cessionnaire,
pour ce département, du procédé Gannal, nous ne met
tons point en doute que si le préfet et le conseil munici-
pal l'en prient, il ne se fasse un devoir patriotique d'em-
baumer l'oiseau sûr place, à la cime du paratonnerre.
Louis Huart saisira même avec plaisir cette occasion de
montrer tout ce que son caractère et son talent ont d'é-
levé.

Cette pénurie d'hirondelles,cette abondance decorbeaux
et cet empalement d'oiseau de proie ne sont-ils pas une
trinité de présages bien alarmans ! Je ne m'étonne plus
si tous les abricots sont tombés cette année !

Mais ce qui nous console, c'est que nous avons tout
lieu d'espérer quë MM. Guizot et autres imiteront les
abricots.

CHRONIQUE ÉLECTORALE,

UNE FOIS EN PASSANT,

CHRONIQUE: KMFIAITE.

Il y a, non loin de Paris, un département qui envoie k
toutes les législatures une collection de députés dévoués
et consciencieux. Les Charles Dupin du bureau de l'es-
prit public le couvrent d'une épaisse couche d'encre, et
M. Guizot l'honore d'une mésestime toute particulière.
Cela fait l'éloge de ce département.

11 a nom l'Aisne.

La loi lui a dévolu la nomination de sept représentai;
il les prend tous les sept dans les rangs de la gauche, et
cela dure depuis l'invention du système constitutionnel.
Cette longue fidélité paraît d'un mauvais exemple aux sa-
trapes de l'intérieur, qui voudraient bien tenir l'Aisne
sous leurs pieds.

On sait que Chauny, un de ses arrondissemens, est un
collège électoral où M. Odilon Barrot est toujours sûr
d'être nommé. Chauny ne veut point d'autre mandataire,
et Chauny n'a pas tort.

Cependant le Vingt-Neuf-Octobre, qui avait suscité des
concurrens partout, et avait empoisonné la France, du
Pas-de-Calais aux Bouches-du-Rhône, de candidats mi-
nistériels, allait par les environs de Chauny cherchant un
nom k opposer k celui de M. Odilon Barrot. Le ministère
faisait comme Diogène; le préfet lui servait de lanterne
Quelle vessie !

Celte lanterne eh frac bleu-barbeau n'éclairait que des
patriotes.

Enfin un jour, vers le soir, le préfet mit la main sur
un homme de bonne volonté (il fallait que cet homme en
eût beaucoup pour accepter la certitude d'une défaite), et
aussitôt le préfet donna k sa trouvaille le baptême admi-
nistratif de la candidature.

Ce citadin s'appelait de père en fils M. Buplaquet. Be
son métier il était industriel, fabricant de n'importe quoi.
En sa qualité de propriétaire manufacturier, il avait un
grand goût pour l'ordre, et les discours de M. le préfet lui
avaient donné la conviction que cet ordre était cousu au
pan de l'habit ministériel. Au demeurant, M. Buplaquet
était le meilleur fils du monde et n'ayait jamais touché

dans la main de M. Guizot. Aussi était-il généralement
estimé.

Les élections s'approchaient. Chauny possédait ses
deux candidats, et Chauny s'étonnait de tant de riches-
ses, lui qui n'en avait jamais eu qu'un.

La veille du grand jour, les électeurs voulurent se don-
ner le plaisir d'entendre M. Odilon Barrot. M. Odilon
Barrot parla et parla bien. Quand le bruit des acclamat-
ions se fut apaisé, le président de la réunion invita
M. Buplaquet à prendre la parole et à développer ses
principes. M. Buplaquet, qui était vivement ému, prit sa
poche et commença par développer son mouchoir.

Pourtant il ne se le fit pas répéter deux fois. Il se leva,
franchit l'espace qui le séparait de M. Odilon Barrot, prit
la main de l'honorable orateur et lui dit : « Monsieur,
permettez-moi de vous remercier personnellement ; vous
m'avez clairement expliqué ce que je ne comprenais pas
pas bien. Vos principes sont les miens, monsieur; ils sont
trop honorables pour que personne les puisse répudier.
Je n'ai pas besoin de vous dire que je me désiste d'une
candidature a laquelle je ne tenais point et que j'avais ac-
ceptée je ne sais trop pourquoi. Je réclame l'honneur de
voter le premier pour vous et je prie les électeurs, mes
collègues, de me le laisser. »

L'assemblée applaudit, et le lendemain M. Buplanquet,
marchant k la tête d'une phalange d'électeurs où ses
amis étaient confondus, alla bravement et le premier dé-
poser son vote dans l'urne d'où le nom de M. Odilon Bar-
rot sortit triomphant.

Ce fut, après, le chapitre des banquets. On se réjouis-
sait fort k ChauDy où l'honorable M. Buplanquet n'était
pas le moins fêté, lorsqu'un exprès arrive de Soissons.
M. Lherbette mandait kM. Odilon Barrot que son élection
était vivement combattue. Le scrutin avait déjà parlé et
la victoire restait incertaine entre lui et M. Paillet. — li
priait en conséquence M. Odilon Barrot de venir lui prê-
ter l'appui de son talent et l'autorité de son influence.

M. Odilon Barrot se hâte, Chauny l'accompagne jus-
qu'k la grand'route, et la chaise de poste part.

Quand M. Odilon Barot arriva, tout Soissons se tenait'
aux portes de son collège électoral. On devisait par grou-
pes ; l'heure du ballottage arrivait. L'élu de Chauny abor-
de quelques électeurs ; il parle, on l'écoute, on l'entoure,
on le presse ; les groupes accourent, la fouie les suit;
l'orateur s'anime, c'est k tous qu'il s'adresse. Le senti-
ment du patriotisme se réveille dans tous les cœurs, et
quand le collège ouvrit ses portes et son urne, les élec-
teurs entraînés, votèrent comme un seul bulletin.

M. Lherbette fut nommé k une belle majorité, et M.
Pailltt, qui avait eu le malheur d'être patroné par le mi-
nistère, resta avec un nombre bien insuffisant de voix.

Pour se consoler, il est allé plaider la cause d'un contre-
bandier anglais. Lui qui se constituait quelques jours au-
paravant le défenseur d'un cabinet d'amis de l'Angleterre
et d'hommes d'État de contrebande, il s'aperçut k peine
de la transition.

ESPÉRANCE TOMBEE DANS L'EAU

EN Sîî'-.'i'.AHZ' SÏIR 3»E PONT DES ARTS.

Pierre Burand raconte, dans sa Revue de Paris du
Siècle, un événement curieux de la chronique du pont
des Arts, — de ce pont dont M. Sauzet a dit qu'il y a
tout juste autant de personnes dessus que dessous ( de
sous),

«On se plaint de l'état déplorable dans lequel se trouve
le pont des Arts. Rien de plus vermoulu et de plus mal
éclairé que le chemin de l'Académie. On dirait presque
une epigramme contre le monument qui s'élève à l'extre-
mité de ce vieux pont. Mais non, la satire littéraiie n'a
riea à voir ici, le pont des Arts n'a pas la moindre envie
de se un quer de l'I istitnt. S'il se complaît dans sa vétus-
té classique, s'il garde pieusement ses vieilles planches,
s'il reste délabré, ub cur, ténebreux, c'est tout simple-
ment pour ne pa^ se mettre en dépense et pour rapporter
de meilleurs dividendes à ses actionnaires. Voilà plus de,
quarante ans que dure cette concession, cet impôt féodal
de l'industrie, qui oblige tant de pauvres diab.es à per-
dre un tmnps piéeieux et à faire un pénible et long dé-
tour entre le pout Royal et le pont Neuf, au iieu d'englou-
tir des sommes énormes dans la décoration du palais de
M. le préfet, la ville n'aurait-elle pas mieux fait de ra-
cheter cette redevance? En retranchant sur de vaines

splendeurs, on aurait pu aisément accomplir une œuvr
utile et bienfaisante.

» La redevance du pont est un impôt onéreux pour
le pauvre passant, et pour le ruhe c'est souvent une con-
trariète, un ennui, un fâcheux temps d'arrêt. Le dandy
est obligé d'interrompre son chemin, de tirer sa bourse
de prendie une pièce de monnaie et d'attendre le change'
ce n'est pas tout : on lui rend neuf sous pour salir ses
gants jaunes et dé-honorer la poche de son clégant gilet.

» Dans toute l'histoire du pont des Arts, — his oire
déjà vieille, puisqu'elle touche à des ruines, — nous ne
trouvons qu'une >eule circonstance où la barrière et l'im-
pôt du passage aient produit un résultat favorable à
d'autres qu'aux actionnaires.

» Le spéculateur D..., dont nous tairons le nom par
égard pour son honorable famille, avait longtemps occu-
pé une position brillante dans l'agiotage. Son crédit pa-
raissait posé sur les Uses les plus solides, le succès cou-
ronnait toutes ses entreprises, il donnait des fêtes ma-
gnifiques, les cliens et les parasites abondaient chez lui.
Combien de météores n'avons nous pa* vu scintiller ainsi
dans les hautes régions de la finance ! Puis le ciel s'obs-
curcit, et l'a tre disparaît pour toujours sous un nuage
qui l'élemt. Un beau jour, B... vit arriver la tempête et
il résolut de se sauver avec son butin. Ouvrir la main
quand on gagne et la fermer quand on perd, toujours re-
cevoir, ne jamais rendre, telle est la morale de quel-
ques-uns de ces messieurs. Le financier se leva donc ce
jour-là en se disant : « Je me retirerai des affaires au-
jourd'hui, et aussitôt après le coucher du soleil je quit-
terai Paris pour ua pas être harcelé par les réclamations
de mes créanciers; ces gens là sont si ridicules! »

» L'important était de ne pas donner l'éveil sur ses pro-
jets de fuite, d'autant mitux que déjà on commençait à
soupçoHi er ses revers. Un désastre ne se cache pas long-
temps à la Bourse; les naturels de l'endroit ont l'œil
perça4, l'oreille fine, la main déliée : rien ne leur échap-
pe. Le spéculateur avait un hôtel à la Chaussée-dAmin;
it fit préparer une chaise de poste qui l'attendit dans la
cour d'une petite maison qu'il possédait au faubourg
Saint-Germain, véritable petife maison d'un grand sei-
gneur ou d'un fermier général d'autrefois, simple au
dehors, splendtde au dedans, mystérieux asile réservé
aux secrètes in'rigues. Pendant la journée tout entière le
banqueroutier réalisa ses fonds et enfla son portefeuille;
mais avait il mal calculé son temps, ou bien fut-il
obligé d'attendre quelques rentrées? Le fait est que la
nuit le surprit dans le cabinet de son hô el. Il ne s'é-
tait pas présenté à la Bourse; son absence avait jeté
l'inquiétude parmi ses cliens ; on arrivait de toutes parts,
et pendant que les créanciers en traient chez lui, il n'eut
que le temps de s'esquiver par un escalier dérobé.

» La déroute était officielle; M. D... battait en retraite
avec armes et bagages. On se mit à sa poursuite, mais il
avait d« l'avance; d'ailleurs, on ne savait pas de quel côté
il s'était dirigé. Cependant, le banqueroutier, soit qu'il
n'eût pas trouvé de voiture sur son chemin, soit q l'il se
crût suffisamment protégé par l'ombre du soir, s'en al-
lait à piei et à grands pas vers le faubourg Saint-Germain,
ea pressant conire sa poitrine l'énorme portefeuille placé
dans la poche de sa redingote, et qui contenait un mil-
lion. Tout à coup, en passant sous un réverbère de la
place du Carrousel, i* entend son nom crié de loin par
quelqu'un qui l'appelle.

« Il a reconnu une voix ennemie ; on est sur ses traces,
mais il a toujours de l'avance. Eperonné par la peur,
rapide comme un cheval de course, il tourne à droite,
traverse la cour du Louvre et arrive au pont des Arts.
Ce pont fiauchi, le danger n'existera plus, car il lui sera
facile de disparaître dans les rues étroites du faubourg
Saint-Germain, et ses créanciers ne connaissent pas sa
petite maison.

» A peine a-t il mis le pied sur le pont, que l'invalide
de service, voyant qu'il ne s'arrête pas au bureau, lui
barre le passage en disant :

« Monsieur, vous oubliez de payer. »

« A ces paroles, le fugitif suspend sa eourse, il demeure
immobile, interdit. «Vous oubliez de payer!...» Quel
coup de foudre pour un bai queroutier !

— Qu'est-ce que cela?... Qui êtes-vous pour me parler
ainsi? balbutie M. D... Puis, reprenant ses esprits et
voyant de quoi il s'agit, le spéculateur sourit dédaigneu-
sement ; un mouvement d'impatience succède à un accès
de terreur, il fouille dans la poche de son gilet, et n'y
trouvant rien, il dit :

— Je n'ai pas de. monnaie.

—-Bonnf z un écu, on vous rendra, répond le buraliste.

— Mais j'ai oublié ma bourse. Ce sera pour une autre
fois, mon brave homme.

— Non, non; nous ne faisons pas crédit.

— Mais pourtant, si je n'ai pas d'argent sur moi?

— Eh bien ! pren» z le Pont-Neuf.

— L'est i mpossible ! Ce n'est pas mon chemin, et je suis
pressé.

— Vos affaires ne me regardent pas; je ne connais que
mon devoir de receveur.

— Mais je vom répète que les iastans sont précieux. Il
y va peut-être de toute ma fortune ! Et c'est pour un sou
que vous me fai'escette chicane? Un sou! Laissez-moi
passer, brave homme; demain je vous donnerai cinq
francs, dix francs, un louis.

— Nous ne pouvons pas faire de ces marchés-là.

— Mais je ne suis pas un aventurier; je ne voudrais

(La suite k la 4e page.)
Bildbeschreibung
Für diese Seite sind hier keine Informationen vorhanden.

Spalte temporär ausblenden
 
Annotationen