Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Le charivari — 53.1884

DOI issue:
Septembre
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.23868#0995
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
CINQUANTE-TROISIÈME ANNEE.

Prix du Numéro ! 25 centimes

MARDI 9 SEPTEMBRE 1884

ABONNEMENTS

PARIS

Trois mois.... *.. ,.18 fr.

Six mois... 36 —

Un an. 72 —

Les abonnements partent des !" et ic de chaque mois

DIRECTION

Politique, Littéraire et Artistique
PIERRE VÉRON

Rédacteur en Chef.

_ t

BUREAUX

DE LA RÉDACTION ET DE L’aDMINISTEaTION

Rue de la Victoire, 20

ABONNEMENTS

DÉPARTEMENTS

Trois mois. 20 fl*.

Six mois. 40 —

Un an... 80 —

L’abonnement d un an donne droit à la mime gratis

DIRECTION

Politique, Littéraire et Artistique

PIERRE VÉRON

Rédacteur en Chef.

ANNONCES

ADOLPHE EWIG, fermier de la publicité

Rue Joquelet, 44

LE CHARIVARI


BULLETIN POLITIQUE

Tout mauvais cas est niable, dit le proverbe. Tout
mauvais cas est discutable aussi.

Oa s’en aperçoit au nombre et à la durée des po-
émiques engagées à propos d’une réplique impru-
dente attribuée à M. le général Campenon, ministre
de la guerre.

C’était au. momeüt où l’on s'occupait, dans la
commission, des crédits du Tonkiü. Il fut question
dunombre d'hommes à envoyer. Le général, d’après
les relations, làtiça, eu prenant une intonation tant
soit peu dramatique, cette phrase-rasoir :

— Six mille hommes, pas uu de plus ! Si ce chiffre
est dépassé, ce ne sera pas moi qui tiendrai le por-
tefeuille de la guerre.

Aucun démenti n’étant intervenu, il y a lieu dé
prendre pour définitivement valable la déclaration à
effet et de dire eu toute franchise ce qu’on en pense.

Quelques journaux, parmi ceux qui présentent
d’office la defeüse de tous les ministres, ont essayé
d’argumenter assez malheureusement contre ceux
qui ont divülgüé l’apostrophe. La perché qu’ils
avaient l’air de tendre à ce pauvre général lui assé-
nait sur la tête les coups les plus cruels.

— Vous comprenez, ont balbutié ces singuliers
avocats, le général Campenon ne se doutait pas
qu’ou ferait usage de ses paroles. Il croyait s’épan-
cher à huis clos, loin des oreilles indiscrètes de la
presse. Sans cela, il aurait probablement changé de
langage. C’est un bien vilain tour qu’ou lui a joué
là à cet excellent M. Campenon. On a violé le secret
professionnel. Fi, les vilains !...

Les câsuistes qui parlaient ainsi n’ont pas compris
qu’ils faisaient jouer à leur client un rôle déplora-
blement piteux et passablement louche.

Quoi! sous prétexte de lui venir en aide, voilà
qu’ils donnent à entendre que leur ministre a deux
façons de parler, l’une en public, l’autre en secret ;
qu’il ne faut pas confondre ce qu'il dit avec ce qu’il
pense, qu’il ne fait parade de rigorisme et de désin-
téressement que dans les occasions où il croit que
cela ne tire pas à conséquence, la chose devant
rester clandestine.

Mais ce ne sont pas des circonstances atténuantes,
cela ! Ce sont des circonstances accablantes.

Si M. Campenon ressemblait à ce portrait peu
flatté, la photographie ne serait pas pour lui rallier
la sympathie et l’admiration.

Quanta prétendre que ses auditeurs n’avaient pas
le droit d’user de ses paroles, sous prétexte de se-
cret professionnel, c'est une forte plaisanterie qui,
d’ailleurs, n’a pas d’intérêt au point de vue sérieux.

Car nous en revenons toujours à ce principe qù’un
ministre qui a conscience de son devoir et sùuci de
sa dignité ne doit pas varier de ton, selon qu’il re-
doute ou ne redoute pas la publicité.

Maintenant, comme nous ne faisons pas de déni-
grement systématique, comme nous ne voulons rien
exagérer dans un seüs ni dans l’autre, comme nous
tâchons de dire la vérité sur tout et à tous, nous ne
prétendons pas que le cas du général soit un cas
pendable.

Nous disons seulement qu’il s’est fourré dans une
situation où il ne peut échapper an ridicule que par
le sacrifice de son portefeuille, et qu’il s'y est placé
pour avoir cédé à l’entraînement funeste que subis-
sent les militaires eux-mêmes, quand ils sont enva-
his par les mœurs parlementaires.

Il règne dans ce satané milieu une atmosphère
troublante.

On y est pris tout de suite par la manie de la
rhétorique, par l’abus de la pose oratoire.

Gardons l’exemple du général Campenon, puis-
qu’il se présente et qu’il peut donner une utile le-
çon.

Il est arrivé au ministère avec uu nom estimé,
avec des états de service méritants. On le donne
pour un des plus capables parmi les divisionnaires.
Son caractère est honoré. Fort bien.

On ne peut donc supposer, étant donnée l’intelli-
gence qu’on lui accorde, que le général n’a pas me-
suré tout d’abord la portée de l’expédition à laquelle
il collaborait.

S’il n’avait pas prévu la possibilité, la quasi certi-
tude même de complications futures qui nécessite-
raient de nouvelles mises d’hommes et de nouvelles
mises de fonds, il aurait fait preuve d’une incapa-
cité et d’un aveuglement qui ne laisseraient plus
qu’à souhaiter sou remplacement immédiat.

Et cependant, tout en prévoyant l’avenir, tout en
supposant bien que le lendemain pourrait exiger
un supplément de sacrifices, M. Campenon, subis-
sant cette diable d'in/luenM qui règne dans les pa-
lais législatifs, comme la pourriture d’hôpital dans
les asiles de la souffrance, le général u’a pas résisté
au désir d’épater (il n’y a pas d’autre mot) son au-
ditoire de pékins par une déclaration à l’emporte-
pièce. Ylau ! vlan ! Du laconisme stoïque !

Sur le moment, cela procure des satisfactions
d’amour-propre, ces boutades d’une brièveté tonte
militaire.

On voit ces bourgeois de députés échanger des
coups d’œil qui signifient : « Mâtin ! en voilà un qui
n’a pas froid aux yeux ! »

Et Ton s’en va tout satisfait de soi, en pensant :
« Je leur ai montré quejesuisun gaillard qui ne
| boude pas. »

Par malheur, il y a le revers de la médaille.

Ces paroles auxquelles, en vertu de la fiction
parlementaire, on n’avait pas attaché plus d’impor-
tance que cela, ces paroles dont on avait simple-
ment voulu tirer une minute de sensation admira-
tive , restent consignées quelque part dans un
procès-verbal ou, au besoin, dans la mémoire de
deux ou trois des assistants.

Et alors, à l’improviste, on se retrouve eu pré-
sence du spectre.

Campenon d’aujourd’hui embêté par Gampenon
d’hier.

Et alors on murmure :

— Comment ! j’ai dit cela, moi I Quel imprudent
je fais !... Mais aussi est-ce que je me figurais qu’on
prenait, dans le monde parlementaire, ces choses-
là au pied de la lettre ?

Yoilà précisément le malheur. Voilà les déplora-
bles habitudes dont à tout prix il faudrait se corri-
ger.

Le parlementarisme a son phylloxéra, qui est la
hâblerie.

Il serait temps que les représentants de la France,
ministres, sénateurs r u députés, comprissent que
tout mot correspond à une idée, que la vérité est
absolue et une.

Il serait temps d’en finir avec ces allures d’ora-
teur Fracasse qui, sur le moment, impressionnent
la galerie et qui vous fourrent ensuite dans des imr
passes d’où l’on ne sort plus tard que par la démis-
sion ou par l’humiliation.

Pierre Véron.

L'ACADÉMIE 1)1 BABEL

On a beau être habitué aux absurdités dont
l’Académie française donne périodiquement le
spectacle, impossible de garder le silence quand on
la voit recommencer à défier le sens commun par
quelqu’un de ces choix extravagants dont elle a le
secret.

Hier, sans penser à mal, je lisais un journal. J’y
vis annoncer d’un seul coup trois candidatures
pour les trois fauteuils vacants en ce moment.

Premier fauteuil : M. Bocher.

Deuxième fauteuil : M. Duruy.

Troisième fauteuil : M. Bertrand.

Cherchez l'homme de lettres ! C’est encore plus
compliqué que le Cherchez le chat, qui fut jadis la
question à la mode.

Cherchez l’homme de lettres ; vous ne le trou-
verez pas.

Donc, trois places étant disponibles dans cette
assemblée littéraire, ces trois places seront données
en dehors de la littérature.

Le cas n’est pas exceptionnel ; mais il frappe da-
! vantage par l’accouplement des trois candidatures.
Image description
There is no information available here for this page.

Temporarily hide column
 
Annotationen