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Le charivari — 59.1890

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CINQUANTE-NEUVIÈME ANNÉE

DIMANCHE 5 JANVIER 1890

Prix du Muméro : 25 centime*

ABONNEMENTS

PARIS

Trois mois.... 18 fr.

Six mois. 36 —

Un an. "2 —

Les abonnements parlent des v et de chaque mois

DIRECTION

Politique, Littéraire et Artistique

PIERRE VÉRON

Rédacteur on Chef

BUREAUX

DE LA. RÉDACTION ET DE L’ADMINISTRATION

Rue de la Victoire, 20

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Trois mois. 20 ir.

Six mois. 40 —

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L'abonnement d’un an donne droit à la prime gratuitl

DIRECTION

Politique, Littéraire et Artistique

PIERRE VÉRON

Rédacteur en Chef

ANNONCES

ADOLPHE EWIG, fermier de la publicité
92. Rue Richelieu

BULLETIN POLITIQUE

Faute de grives, on mange des merles, dit le pro-
verbe.

Eu l’absence des Chambres et à défaut de débals
parlementaires, il faut savoir se contenter des fait s
et gestes du Conseil municipal.

Cette tapageuse Assemblée s’est encore avisée
de faire des siennes.

Par deux délibérations successives, elle a rejeié
en bloc le budget de la Préfecture de police. Après
quoi, d’un cœur léger, comme si elle venait de se
montrer pleine de grâce à l’égard de sa victime, elle
a, dans la personne de son bureau, rendu à M. Lozé
la visite de nouvel an faite par ce fonctionnaire rési-
gné, conformément à l’invitation impérative qui lui
avait été adressée.

Ainsi 1890 n’a rien innové dans les procédés de
nos édiles. Ils daignent recevoir le préfet de police,
mais ils continuent de repousser avec horreur son
budget.

Le ministre de l’intérieur le rétablira d’office, et
tout sera dit.

Mais, si la sécurité publique est mieux garantie
cette année que précédemment, si les attaques noc-
turnes sont moins fréquentes, si les écuries d’Augias
sont mieux balayées, vous saurez, Parisiens mes
frères, que ce n’est pas à votre Conseil municipal
que vous le devez.

Le service de statistique municipale se livre au
dénombrement des maladies qui éprouvent en ce
moment iapopulation parisienne. Il n’en est qu’une
dont il ne dit mot : c’est la manie de paroxysme
dont nous sommes atteints.

De ce mal je ne veux parler qu’au point de vue du
langage; au point de vue des actes, il faudrait s’en-
gager trop avant dans une revue générale des hom-
mes et des choses.

Mais prêtez l’oreille à tout ce qui se dit, à tout ce
qui s’écrit de nos jours. Vous constaterez qu’on ne
sait plus trouver l’expression propre, ni garder ia
juste mesure.

Cela dans la louange comme dans la critique.

Tenez! dernièrement, je recevais un volume ac-
compagné de ia réclame obligatoire. C’est là une cou-
tume qui ne fait de mal à personne, tout le monde
se rendant bien compte de l’exagération que com-
porte ce genre de littérature.

Il est cependant des limites en tout, et je ne pense
pas qu’autrefois on se fût exprimé sur ce ton :

« Voici un roman qui rappelle les meilleures pages
de Sterne et de Swift, qui s’élève à la hauteur de
Juvénal par sa critique mordante, et de Foë par sa
fantaisie endiablée. »

J’ai copié fidèlement. Excusez du peu! Sterne,
Swift, Juvénal et Daniel de Foë!

Si je relève cet incident sans importance, ce n'est
certes pas pour chercher noise au zèle excessif d’un

éditeur trop enthousiaste. C’est pour démontrer par
un exemple entre mille que les. paroxystes se trou-
vent partout, touchent à tout, grossissent lout.

Voilà bien la caractéristique de notre époque.

Pas de mesure. Nous sommes dans le siècle de
l’outrance.

S’agit-il d’un homme politique? Les gémonies ou
le Capitole. Si on ne l’étouffe pas sous les fleurs, on
le noie dans la boue.

Autrefois on savait encore rendre justice à la
loyauté d’un adversaire. On combattait les idées
sans insulter les personnes.

Tradition perdue. Dès qu’ou parlé de quelqu’un
qui professe une opinion différent, en avant les
gros mots ! L’infamie est monnaie courante. On vous
traite les gens de scélérats pour un oui ou pour rn
non.

A la tribune, même débordement.

Du plus pelit épisode naît quelque querelle tumul-
tueuse qui va mettre aux prises les deux parties de
l’Assemblée.

*

L’art se perd de l’ironje fière, de la discussion
courtoise. Le coup de poing remplace l’argument.

De même en art et en littérature.

Je me demande quelle figure les paroxystes nous
font faire aux yeux de l’étranger, qui doit regarder,
sans les comprendre, nos névroses, nos insanités,
nos danses de Saint-Guy.

Nous avons, en vérité, l’air d’un peuple d’aliénés.
La France semble n’être plus qu’un immense Oha-
renton.

Il est impossible que l’on continue de ce train.
Sans quoi, vraiment, la camisole de force deviendra
le costume de rigueur chez nous.

Le plus triste, c’est que nous avons perdu, à cette
furibonderie, notre qualité maîtresse : le goût.

Nous avions un renom spécial pour notre façon
de critiquer finement et de louanger avec tact. On
nous citait comme modèle aux autres nations.

Le goût français ! Qu’en reste-t-il présentement ?
Les paroxystes l’ont tué. Ou, s’il n’est pas tout à fait
mort, il s’en faut de bien peu, hélas ! Comparez les
railleries ingénieuses et délicates d’unChamfort aux
pugilats actuels. Le parallèle est navrant pour
l’heure présente.

Une seule chose peut nous sauver : l’impossibilité
d’aller plus loin dans la frénésie, la lassitude ame-
née fatalement par ces accès chroniques.

Mais ne sera-t-il pas trop tard ?

Pierre Véron.

LA PANNE DU SAINT-PÈRE

Que nous disait-on donc, que le Souverain-Pon-
tife était dans une situation à faire larmoyer comme
des Madeleines les plus durs rochers, à arracher des
pleurs même à la Tour Eiffel, — le plus sec de tous
les monuments connus... après le cœur A'il signor
Crispi?

A entendre les Semâmes religieuses et tous les ca-

nards de derrière les oagots, le vicaire de Jésus-
Christ n’avait même plus de paille pour reposer ses
vieux membres.

Ou était tenu de se le représenter comme un la-
mentable débris,

Plus délabré que Labre et moins fier que Bragance,

réduit à tendre la main aux passants sous le porti-
que du palais des papes.

Le diable ayant fait le vide dans tous les troncs,
l’œuvre du denier de Saint-Pierre — en cela moins
heureuse que la Ville de Paris — n’ayant plus de
sources à capter, Léon XIII avait dû liquider ses
écuries, remiser ses voitures, licencier ses cuisi-
niers, ses jardiniers, etc., etc., faute de pouvoir en-
tretenir à la fois sa cour et sa basse-cour.

Bref, la misère la plus noire régnait au Vatican,
et Léon XIII, pour le nécessaire, était de cent pi-
ques au-dessous de Job, l’homme au fumier.

Ainsi, du moins, semblaient aller les choses, quand
tout à coup éclate une bombe.

Une bombe, oui, — sous forme d’écho répercuté
dans toutes les feuilles pieuses, et disant :

« S. S. -le pape Léon XIII a fait don de cent mille
francs... »

Vous m’inlerrompez.

— Un don de cent mille francs?

— J'ai dit : cent mille.

— Cent mille ! Mince de galette!... Et à qui le ca-
deau ?

— A l’Université...

— De France?

— Vous voulez rire!

— D’Italie, alors?

— Pas davantage. Vous savez bien que S. S.
Léon XIII, surtout depuis le monument élevé à
Giordano Bruno et la loi sur les « œuvres pies », ne
peut pas sentir le gouvernement Crispinien.

— C’est vrai, mais je ne vois pas à qui...

— A l'Université de Fribourg, — de Fribourg en
Suisse, — car c’est de cette ville, et non de Rome,
que nous vient la nouvelle.

— Eh bienl en voilà une — je parle de l’Université
— qui a de la veine d’avoir trouvé cent mille francs
sous le pas de la mule pontificale 1

— Gela prouve, d’abord, qu’ils y étaient.

— Parbleu! Et en compagnie de pas mal d’autres.
Car les âmes généreuses qui y vont de cent mille
francs d’un coup ne sont généralement pas sans
avoir une forte réserve en caisse. Saint Martin lui-
même, d’épiscopale mémoire, ne donna au grelot-
teux de la légende que la moitié de son manteau.

D’où il appert, en conséquence, qu’au lieu d’être
gueux comme Job, rafalé comme Labre, condamné
à mendier comme ce Pielro Marcollini à qui Pie IX
fit don d’un de ses vieux habits pour le garantir du
froid (ce qui lui a permis de laisser en mourant, ces
jours derniers, une bonne cinquantaine de mille
francs amassés sou par sou), S. S. Léon XIII serait
riche comme Crésus ou, si vous aimez mieux, comme
ces mécréants de Rothschild qui viennent de se fen-
dre de cent mille francs, eux aussi, — en faveur des
pauvres de Paris.

Cent mille francs 1 N’en déplaise à la famille Veuil-
lot, — qui, pour cause de réprimande papale, n’a pas
le cœur à la joie, — que la somme sorte de la bourse
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