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Le charivari — 60.1891

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Septembre
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SOIXANTIÈME ANNÉE

Prix du Numéro : 25 centimes

MARDI 1er SEPTEMBRE 1891

ABONNEMENTS

PARIS

Trois mois.. Ti\

Six mois.. : ; 36,—

Un an.72 “

(les mandats télégrapuiques ne sont p£8>aaçus)

Les abonnements parlent des 1er et 16 de chaque mois

DIRECTION

Politique, Littéraire et Artistique

PIERRE VÉRON

Rédacteur en Chef

BUREAUX

DB LA RÉDACTION ET DE L’ADMINISTRATION

tSlue de la Victoire, 20

ABONNEMENTS

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Trois mois. 20 i*

Six mois. 40 —

Un an. 80 —

(les MANDATS télégrapuiqües ne sont PAS REGUïi

L'abonnement d'un an donne droit à la prime gratuit*.

DIRECTION

Politique, Littéraire et Artistique

PIERRE VÉRON

Rédacteur en Chef

ANNONCES

ADOLPHE EW1G, fermier de la publicité
92, Rue Richelieu

LE CHARIVARI

BULLETIN POLITIQUE

C’est la saison des reliques.

Chaque année, quand vient l’été, les pèleri-
nages reprennent, avec un redoublement d’ar-
deur, leur petit commerce.

Et, pour amorcer le client, c'est à qui exhibera
quelque détritus bénit.

Par malheur, ce négoce ne va pas sans ac-
crocs

Récemment, une guerre de concurrence s’en-
gageait entre deux chemises de Jésus-Christ,
l’une allemande, l’autre française.

Les morceaux du bois de la vraie croix ont été
si copieusement distribués, qu’un statisticien a
pu assurer, calcul fait, qu’avec cette charpente-
rie on construirait la carcasse d’une ville de
moyenne grandeur.

Ailleurs, ce sont des morceaux d’os, des mè-
ches de cheveux, et cætera.

Ce qui m’étonne, ce n’est pas le gogotisme des
clients que ces parades attirent. C’est l’incon-
science de ceux qui les montent.

Lorsque le christianisme apparut, son unique
raison d’être était de substituer un culte idéalisé
à la religion matérialiste qui s’appelait le paga-
nisme.

Ont-ils assez oublié leur but et leur point de
départ, les marchands du temple qui ressusci-
tent, sous les formes ci-dessus relatées, l’ado-
ration des idoles 1

Ils tournent hardiment le dos aux préceptes de
celui qu’ils appellent le Maître, sans lui vouloir
obéir.

La formule chrétienne avait pour premier
article le spiritualisme.

Je vous demande ce que le spiritualisme a de
commun avec ces pans de chemise qu’on baise,
avec ces brins de bois moisis qu’on salue, avec
ces tibias ou ces scories auxquels on attache de
miraculeuses propriétés!

Car, naturellement, le miracle est au bout de
tout cela.

C’est l’amorce.

Les gens ne se dérangent que parce qu’ils
croient guérir, qui son rhumatisme, qui sa pi-
tuite, par l’attouchement des bibelots soi-disant
sacrés.

Cette foire aux reliques, qui fait annuellement
concurrence aux fêtes des Loges ou de Saint-
Cloud, n’est bonne qu’à attester l’origine chimé-
rique de Leur prétendue révélation.

Dans le principe, en effet, les chrétiens avaient
prétendu mettre du Dieu dans un homme.

Que font, au contraire, les catholiques ac-
tuels ?

Ils remettent de l’homme dans leur Dieu.

Pierre Véron.

NUIT ET JOUR

ÉTUDES PARISIENNES

L’HOMME QUI COURT

<**

Vous l’avez vu passer — et, sans doute igno-
rant, vous vous êtes demandé pourquoi ce pau-
vre hère exécutait cette course folle à travers les
rues?

C’était toujours un malheureux aux loques si-
gnificatives, mais un malheureux d’apparence et
d’âge variables.

Tantôt, un jeune dépenaillé; tantôt, un homme
dans la force de l’âge, mais aux yeux caves, à
l’œil cerné par la faim.

D’autres fois encore, — et alors le spectacle
devenait bien plus cruel, — d’autres fois, c’était
un vieillard.

Horrible, la vue de cette ruine titubante, usant
les derniers restes d’une force qui tombe et d’une
Vie qui s’éteint.

La sueur ruisselait sur son visage, collant à
son front les dernières mèches de cheveux blancs.

Sa poitrine râlait avec un sifflement sinistre.
On se retournait en pensant :

— Mais il va avoir un coup de sang, l’infor-
tuné !

Et lui courait toujours!... Et toujours plus suf-
foqué, plus chancelant, plus lamentable !

DfC

Et toute cette dépense d’efforts suprêmes, pour
toucher au bout une prime de dix ou de vingt
sous.

Quelquefois pour ne rien toucher du tout et
rester seul avec sa déception!

L’abominable métier! Comme il faut, pour qu’il
ait pris naissance, que la misère soit dure en ce
Paris plein d’or!

L’homme qui court est une spécialité qui re-
monte à trois ou quatre ans. Pas plus.

Et, chaque jour, cette horrible spécialité va se
propageant. Et on les rencontre de plus en plus
nombreux, se ruant à la poursuite du morceau
de pain!

Gomme point de départ, les gares de chemins
de fer.

Us sont là, rôdant aux alentours; car les règle-
ments sévères ne leur permettent pas d’entrer.

Ils guettent le passage d’une voiture couverte
de malles et de colis.

En voilà une... Ils sont trois ou quatre qui font
mine de s’élancer.

Le premier approchant continuera seul la
chasse.

Et en avant!

Il s’agit de suivre au trot — et tant qu’il lui
plaira de rouler — le fiacre de l’espérance.

Calculez!... On commence au boulevard Mazas
ou au Jardin des Plantes, pour aller à Montrouge
ou à Auteuil.

Que voulez-vous ! C’est au hasard de la four-
chette, et nul ne sait d’avance où ce hasard-lâ
va l’entraîner.

c/|\>

Le Juif-Errant se contentait de marcher. Vieux
martyr surfait, va !

Les martyrs de la civilisation subissent une
épreuve bien autrement usante.

— Cours ! cours ! cours!... lui crie la voix fa-
tale...

Mais, attention!... Le voilà au bout de ses pei-
nes, l’essoufflé, le ruisselant, le fourbu.

La voiture a fait halte.

C’est le moment de la récompense — ou de la
désillusion.

Ce qui l’a lancé sur la trace du véhicule numé-
roté, c’est la pensée qu’arrivés à destination,
tous ces colis auront besoin d’une paire de
bras pour les descendre, toutes ces malles d’une
échine pour les monter.

Malheur!... Un plus robuste est sorti de la
maison.

C’est le concierge.

Solennel et âpre à la curée, il n’entend pas
souffrir cette concurrence du va-nu-pieds, lui qui
est fier des belles pantoufles que madame son
épouse lui broda pour sa fête.

— Veux-tu t’en aller, marmiteux! ricane-t-il.

Et il repousse l’intrus. Et, au besoin, il le me-
nace du sergent de ville qui le mènera au poste.

Total : Zéro.

C’est en pure perte qu’il aura risqué l’apo-
plexie I

w

D’autres fois, il fera la corvée, — mais il tom-
bera sur un bourgeois férocement avare qui lui
tendra superbement... quatre sous.

Ça ne fait pas un sou le kilomètre!

Le kilomètre couru sous la pluie, le vent ou le
soleil, avec rien dans le ventre !

t/ÎV»

Un des plus lamentables spécimens du déclassé,
que l’homme qui court.

Difficilement, on imaginerait un supplice d’exis-
tence plus torturant, au physique comme au
moral, que celui de ce damné volontaire, non
prévu par les cycles du Dante.

Aussi, quand il passe, j’ai comme une irrésisti-
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