Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Le dessin à l'école et dans la famille: revue d'éducation esthétique — 1.1922/​1923

DOI Heft:
[novembre 1922]
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.43073#0040
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
pas que ces Grecs se soient élevés au-
dessus d’une moralité très inférieure.
L’Italie du XVe siècle, éprise égale-
ment du goût des arts jusqu’à la supersti-
tion, se livre sans scrupule et sans frein
à tous les vices et à tous les crimes. Aux
yeux de ces raffinés, la beauté du geste
excuse la noirceur de Pacte et le justifie.
Cette religion du beau ne mène donc
point ses adeptes à la perfection.
La beauté peut agir moralement sur
une élite ; elle dégage Pâme des réalités
matérielles de la vie ; elle développe le
sentiment de la sociabilité ; elle élève
l’esprit et le cœur vers des régions se-
reines et les rend meilleurs, mais cette
heureuse influence peut-elle, à elle
seule, contrebalancer efficacement P ac-
tion déprimante et continue des pas-
sions, et détourner l’homme des bas cal-
culs de l’égoïste intérêt? Nul esprit ré-
fléchi n’oserait P affirmer.
La Religion comporte, avant tout,
un dogme qu’il faut croire, une règle de
morale qu’il faut suivre, un culte sen-
sible réunissant toutes les âmes autour
d’un même autel, et qu’il faut pratiquer.
L’art n’offre rien de semblable, cc II n’a
aucune prise sur la destinée éternelle,
fondement religieux par excellence1. »
Les efforts de l’homme doivent con-
verger vers un but supérieur : le perfec-
tionnement de son être en vue d’une
destinée plus parfaite et meilleure, ré-
compense de son mérite. Cette loi de la
fin dernière s’impose à tous. Peut-on
dire que le seul cuite de la beauté, de
la forme pour la forme, suffirait à nous
faire tendre sans relâche vers ce but su-
périeur en dépit de toutes les influences
1. Loisel. L’expérience esthétique et l’idéal chrétien.

déprimantes qui tendent sans cesse à
nous en éloigner?
La Religion crée encore des rapports
obligés de créature à Créateur ; on les
trouve manifestés chez tous les peuples
par la prière, le sacrifice, l’adoration.
L’art, au contraire, peut demeurer une
jouissance égoïste et trouver dans le
plaisir du beau, sa propre fin.
Cette jouissance que nous procure la
vue de la beauté, cette émotion esthé-
tique qu’elle suscite fut précisément la
source de l’erreur : la beauté est une re-
ligion.
A leur début, en effet, l’émotion es-
thétique et l’émotion religieuse se con-
fondent aisément, cc Une émotion vrai-
ment religieuse est sympathique, c’est-
à-dire qu’elle rassemble le tout de l’être
pour le projeter en Dieu avec tendance
à l’adoration et, au sacrifice. Une émo-
tion esthétique, au contraire, n’est
qu’une vibration d’une partie de nous-
même capable de servir de véhicule à
une impression religieuse tout en en res-
tant spécifiquement distincte h »
Enfin, poursuit ce même auteur, que
veut dire l’architecture comme religion,
et la peinture, et la littérature? En in-
sistant davantage on choquerait la rai-
son.
On fait remarquer encore que la Re-
ligion s’nnpose à tous ; elle naît de notre
situation de créature ; nous ne pouvons
nous soustraire à ses obligations. Elle
commande à la conscience de tous les
peuples, de tous les temps, sous tous les
climats.
L’œuvre d’art que nous admirons au-
jourd’hui sera décriée demain ; celle que
nous considérons comme un chef-d’œu-
1. Loisel, Op cit.

— 34
 
Annotationen