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Le dessin à l'école et dans la famille: revue d'éducation esthétique — 1.1922/​1923

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[mars 1923]
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https://doi.org/10.11588/diglit.43073#0182
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douze lapins tués! cinquante-neuf faisans! sis
bécassines et huit poules d’eau ! Le jeune
homme brun avait donné, à la ferme, ces chif-
fres confirmés par le garde.
Andrée passait en ce moment devant ma
cachette. Je remuai les herbes et poussai un
léger cri ; l’enfant sursauta, mais je la vis bien-
tôt me regarder et sourire. Elle m’avait re-
connu : — Jeannot! s’écria-t-elle, Jeannot est-
là ! Il est vivant, quel bonheur ! — Et, me
désignant de la main, elle répétait à la bonne
dame : — Voyez, il est là !
Les enfants et la dame firent cercle autour
de moi. Un instant je fus brave. Andrée
s’avança seule et, se baissant avec précaution,
glissa sa petite main sur ma fourrure. Les en-
fants n’en croyaient pas leurs yeux et la bonne
dame émerveillée dit à ma protectrice ; —
Prenez-le donc par les oreilles. Nous l’empor-


terons et nous le soignerons bien !
Andrée n’eut, garde d’obéir. Elle savait que

la liberté me vaut mieux qu’une prison, même
dorée, et après une nouvelle caresse, se releva.
A la manière des lapins je lui dis un aimable
au revoir et m’éloignai de quelques pas.
La conversation de la bonne dame reprit
avec Andrée et je suivis le groupe pour ne l'ien
perdre des paroles échangées. Il fut d’abord
question de mon histoire, puis l’on parla de la
jeune fille à l’ours, et ce chapitre m’intriguait.
Qu’allait devenir la prétendue bohémienne !
Les démarches de la vieille dame aboutiraient-
elles en si peu de jours et quel en serait le ré-
sultat ? Déjà le patron de la roulotte avait été
prévenu ; il savait que les recherches de la fa-
mille, réorganisées depuis quelques semaines
par une police privée active et intelligente,
étaient à la veille de réussir, que la trace de
la jeune fille était retrouvée et que, sous peu,
son aide lui serait ravie.
Lui-même avait fait part de
ses inquiétudes à la jeune fille, et
Andrée avait vu ce pauvre
homme, non loin de sa roulotte,
pleurer de vraies larmes en par-
lant d’une séparation inévitable
et prochaine. La jeune fille
consolait le malheureux en le
rassurant, parce que son bon
cœur comprenait la peine que le
pauvre bohémien devait éprouver
à la pensée de la perdre. C’était
la meilleure partie de son gagne-
pain qui disparaîtrait avec elle ;
c’était, aussi une société agréable,
parce que la jeune fille, d’un ca-
ractère aimable et d’une humeur
joyeuse, ne se révoltait jamais,
X. même sous les menaces, les inju-
res ni les coups. Combien il re-
grettait, le pauvre homme, d’a-
voir traité parfois si durement
l’enfant qu’il allait perdre ! Il
avait parlé de fuir, de s’éloigner
rapidement, de se cacher avec les
siens, de dépister la police une
fois de plus. Vaine résolution! Il
était trop tard.
La vieille dame avait, prévenu
les autorités locales après le récit
(Y de sa protégée dans le jardin, du
presbytère ; une enquête commen-
'XX cée aussitôt avait démontré l’in-
justice commise envers la jeune
fille. Quelques formalités à remplir retardaient
encore l’action directe de la police.
(A suivre). Jeannot.

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