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Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 7.1881-1882

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Robiou, Félix: L’Apollon des mystères dans les textes littéraires de l’antiquité
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https://doi.org/10.11588/diglit.25013#0063

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« multiplicité des faits, elle se ramène dans ce monde inférieur, elle s’y plonge
« de nouveau (1), elle ne se dégage point des passions et des aventures qui l’em-
« barrassent ici par suite de ses naissances... Mais celle qui est saisie par un meil-
« leur monde est rappelée, comme d’une larve humide et molle, dans son véritable
<( séjour. Elle se rallume comme un feu ranimé par celui qui vient de l’éteindre ;

« elle s’empresse de franchir les portes de l’IIadès, si elle n’a pas conçu un vif amour
« des objets terrestres, si elle ne s’est pas consumée par leurs poisons. »

Ici, ne l’oublions pas, Plutarque initié s’adresse à sa femme initiée ; c’est de leur
enfant, morte presque au berceau, qu’il lui parle ; c’est une lettre intime, une
véritable lettre qu’il lui écrit, ainsi qu’il résulte clairement des premières lignes.
Ilien de plus personnel et de plus naïf que les doux et amers souvenirs qu'il lui
rappelle en se reportant au très petit nombre d’années que leur petite Timaxène
vient de vivre sous leurs yeux (2). Si donc les doctrines de l’initiation sont quelque
part dans Plutarque elles doivent se trouver ici (3). Tout n’est pas dit assurément,
la loi du silence eût été trop aventurée, puisque la lettre n’a pas été détruite ; mais
tout pouvait être indiqué par voie d’allusions. Or rappelons-nous que tout à l’heure
Plutarque nous présentait Bacchus comme présidant à l’élément humide et par suite
à la vie terrestre, Apollon comme l’âme du soleil et l’auteur de la pensée. Y a-t-il
beaucoup de témérité à retrouver une allusion à ce double mythe dans la larve
humide qui représente, pour l’auteur initié, la condition présente de sa vie, et dans
le feu qui lui représente l’âme affranchie des conditions de la matière? Il a fallu que
Dionysos pérît, déchiré par les Titans, pour régner glorieux dans les enfers, et le
culte delphique de Bacchus enfant sur le van mystique, le culte du réveil de
Bacchus célébré par les Thyiades, représentait sans doute sa renaissance par la
mort. Apollon, dieu du feu solaire et de la pensée, est par sa propre nature le dieu
des âmes affranchies. Auteur avec Bacchus de la naissance et de la vie, à laquelle le
soleil est nécessaire comme l’humidité, il préside à plus forte raison à cette seconde
naissance ; aussi est-il adoré par les Thyiades en commun avec Bacchus.

Plutarque ne parlait à sa femme que des dangers encourus par le fait même du
séjour prolongé des âmes dans leur enveloppe terrestre ; mais, dans le traité des
Délais de la justice divine, il parle de son action sur les coupables après leur mort,
dogme qu’il déclare nettement inséparable de celui de l’immortalité (4). Pour
éviter ces châtiments il faut du courage : « L’âme combat durant la vie comme un

(1) Vov. aussi sur cette déchéance des âmes, De
ser. numin. vindicte 12.

(2) Ibid., 1-3. Voy. aussi les passages de Platon
et de Jamblique cités par Lobeck (Aglaophamus,

Orphica III).

(3) Tout autre est la Consolation à Apollonius.

(4) De ser. numin. vindict,, 17-18.
 
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