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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 3.1870

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Nr. 6
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Viardot, Louis: Un tableau de Lucas Kranach
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https://doi.org/10.11588/diglit.21406#0585

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UN TABLEAU DE LUCAS KRANAGH

ans mes visites aux diverses grandes collections d'art que renferme l'Eu-
rope, de Londres à Pesth et de Naples à Saint-Pétersbourg, je croyais
bien avoir vu toutes les œuvres de Lucas Sunder, de Kranach (1472-
1553), ayant quelque importance et quelque célébrité. Ce n'était point
en France assurément, car, de ce peintre éminent, nous n'avons au Louvre que d'in-
signifiants échantillons. C'était à Dresde, où il vécut, à Berlin, à Munich, à Vienne,
qui se sont partagé son héritage, même à Madrid, où sont arrivées quelques-unes de
ses compositions. Outre la singulière estime que, par la vérité des détails, la grâce
un peu affectée des types et des attitudes, enfin l'exquise délicatesse du pinceau,
mérite ce chef d'une des trois écoles allemandes, ce rival de Holbein et d'Albert
Durer, la vue de ses nombreux ouvrages m'avait laissé deux impressions spéciales
qui résumaient pour moi le caractère essentiel de son talent. En lui je voyais d'abord
le premier des peintres protestants, par là le précurseur de Rembrandt et des Hollan-
dais. Subissant l'influence d'une doctrine qui réprouvait certaines pratiques du catho-
licisme, telles que le culte de la Vierge et des saints, il substituait aux formes tradi-
tionnelles de la foi l'exacte et matérielle imitation de la nature. Je voyais encore
dans Lucas Kranach un peintre dont tous les ouvrages se valent à peu près, qui ne
descend ni ne s'élève au-dessous ou au-dessus de lui-même, et qui, dans son habi-
tuelle égalité, n'a jamais eu de ces glorieux élans de génie où un artiste parvient à se
surpasser.

Il me faut un peu revenir sur cette seconde impression, car je viens d'avoir la
preuve que Lucas Kranach aussi, — en cela semblable, par exemple, à son contem-
porain, le maréchal d'Anvers, Quintin Metzys, que l'on ne connaît point assez si l'on
n'a vu sa Mise au tombeau du musée d'Anvers, — s'est surpassé dans une de ses pro-
ductions, et qu'il a laissé son chef-d'œuvre.

Ce tableau capital est à Weimar. Il vient au contraire justifier ma première im-
pression, et montre dans un jour évident les sentiments nouveaux que faisait pénétrer
dans l'art l'ami de Luther et de Mélanchthon, l'adepte enthousiaste de la Réforme, le
serviteur fidèle des électeurs qui osèrent soutenir contre Charles-Quint cette nouvelle
doctrine, l'homme enfin qui poussa le dévouement envers son protecteur, Jean-Fré-
déric le Magnanime, jusqu'à s'enfermer avec lui dans la prison d'Inspruck, après la
bataille perdue de Muhlberg.

En forme de triptyque, avec deux volets repliés sur le panneau central, ce tableau
occupe le maître-autel dans le temple appelé Église de la Ville (Stadt-Kirche), où
s'élève le bizarre et fastueux mausolée de l'illustre lieutenant de Gustave-Adolphe
 
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