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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 5.1872

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Nr. 3
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À propos d'un portrait politique
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https://doi.org/10.11588/diglit.21407#0194

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186

GAZETTE DES 13EAUX-AHTS.

On sait avec quel acharnement la cour de Rome combattit sa candi-
dature; elle y employa toute son influence, toutes ses armes : le clergé,
les légats, les Guises, For et les troupes de l’Espagnol; Sixte-Quint
excommunia le roi de Navarre et le déclara déchu de ses droits. Rien n’y
faisait; à Rome même, une propagande secrète s’organisait en faveur du
Béarnais ; on s’agitait autour de son nom ; on faisait circuler clandesti-
nement son portrait.

C’est un petit chapitre de cette histoire que je veux raconter aujour-
d’hui.

Or, le mardi 22 mai 1590, un jeune homme, familier de l’illustris-
sime cardinal de San Severino, se présenta devant le tribunal du Saint-
Office siégeant à Rome et lui déclara, pour soulager sa conscience, dit le
procès-verbal.que j’ai sous les yeux1, « qu’il avait vu entre les mains du
camérier de Msr Ferratino un portrait du prétendu roi de Navarre, gravé
sur cuivre, la tête couverte, un bâton à la main, revêtu d’une cuirasse,
le nez long, le front large et la barbe longuette. » Le jeune homme
ajoutait que « le même jour, comme l’ambassadeur de la noblesse de
France, duc de Luxembourg, passait en voiture avec sa suite sur la
place Navone, un individu monté dans l’une des voitures montrait le
même portrait à tous les passants. »

L’affaire était grave. Publier à Rome et colporter par toute la ville, à
la barbe des inquisiteurs, le portrait d’un excommunié, du roi de Navarre !
on devine Fémotion du Saint-Office. La déposition du jeune homme ter-
minée, on le congédie en lui enjoignant sous serment de garder le
secret2; une enquête aura lieu, sévère, immédiate. Tous les sbires,
notaires et limiers, du Saint-Office se mettent en campagne et, six jours
après, l’affaire est instruite, les séances commencent.

Le premier témoin, Pompeo Salvioni, ouvrier, a vu une personne de
la suite du duc de Luxembourg montrer aux passants le portrait du roi
de Navarre. Guillaume Yvon, orfèvre français, établi à Rome3, dépose
dans le même sens. Antonio Duraforte, graveur, donne de nouveaux
détails : « Un certain Philippe, graveur sur cuivre, homme de talent,
est venu lui apporter un portrait pour y graver les mots : Henricus

\. Les documents authentiques de cette affaire, extraits des archives du Saint-Office,
sont à la Bibliothèque (manuscrits, fonds latin, 8,994, fol. 308). Les interrogatoires
sont en latin, les réponses en italien.

2. « Injuncto sibi silentio cum juramento. » (Mss. ci-dessus. )

3. « Guglielmus, filius quondam Yvonis, juvenis, de oppido Risœi, dioecesis Sues-
sionensis in Gali in, vascellarius in Urbe. » (ld.)
 
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