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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 36.1887

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Nr. 4
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Yriarte, Charles: Les portraits de César Borgia, 2: essai d'iconographie
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https://doi.org/10.11588/diglit.24190#0345

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LES PORTRAITS DE CÉSAR BORGIA.

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dernière est si forte en sa faveur qu’il faut en tenir compte. Mais la
difficulté réelle de la situation, ce qui interdit une conclusion
formelle à son sujet, c’est qu’on ne peut absolument point comparer
le portrait d’un personnage peint de face à celui d’un personnage
peint de profil. Tout en déclarant que nous croyons voir dans ce
personnage un homme de plus de vingt-six ans, nous serions cepen-
dant tenté de voir dans ce beau visage barbu, au front pur, couronné
de longs cheveux, un César Borgia, restitué une trentaine d’années
après sa chute, d’après des documents aujourd’hui disparus.

La destruction des images des Borgia est un fait acquis à l’his-
toire ; du sud au nord de l’Italie la réaction contre eux fut effroyable ;
la seule image qui trouva grâce, c’est cette fresque superbe des appar-
tements des Borgia qui représente Alexandre VI aux pieds du Christ
en croix, et une autre toile qui existe à Valence, au lieu de naissance
d’Alexandre, Jativa, dont D. Féderico de Madrazo, directeur du
Musée de Madrid, vient avec une bonne grâce parfaite de nous
adresser la photographie. « Le 26 novembre 1503, dit Paride de Gras-
sis, le maître des cérémonies de Jules II, le Pape, a établi sa résidence
à l’étage supérieur du palais, car, m’a-t-il répété, il ne voulait pas voir,
à toute heure, la figure de son prédécesseur Alexandre, son ennemi,
qu’il appelait un « Marcine, un Juif et un Circoncis ». A ces mots, comme
ceux qui l’entouraient et moi-même nous nous étions mis à rire, le
Pontife se tourna vers moi, presque avec aigreur, et me reprocha de
ne pas le croire lorsqu’il disait du pape Alexandre qu’il était cir-
concis. Et comme j’ajoutai que si tout cela lui déplaisait si fort on
pourrait faire disparaître cette figure de la muraille, avec tous ses
attributs, il me répondit qu’il s’y opposait parce que cela ne serait
point décent, « quia hoc non deceret », mais qu’il se refusait à habiter
les appartements pontificaux qui lui rappelaient cette mémoire
odieuse et scélérate. »

Bénie soit la mémoire de Jules II qui n’eut même pas la pensée de
porter une main sacrilège sur l’œuvre du doux Pinturicchio. Mais
la fureur du Pontife contre les Borgia nous donne la mesure de la
violence de leurs ennemis : toutes les images furent lacérées ; et ainsi
s’explique l’extrême rareté des documents iconographiques relatifs
aux Borgia.

CHARLES YRIARTE.
 
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