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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 36.1887

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Nr. 5
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Gruyer, Gustave: Le palais des princes d'Este à Venise
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https://doi.org/10.11588/diglit.24190#0443

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LE PALAIS DES PRINCES D’ESTE A VENISE.

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résider ailleurs et de se mêler aux chrétiens 1. Chaque chambre était
numérotée. Tous les jours les autorités se faisaient présenter la liste
de ceux qui y couchaient. Un décret de 1627 fixa même le tarif des
logements. Les habitants du Fondaco (entrepôt) ne devaient y intro-
duire ni armes ni munitions de guerre. Une salle donnant sur la
cour avait été transformée en mosquée et c’est au rez-de-chaussée
que les Musulmans faisaient leurs ablutions dans des vasques de bois.
Afin d’isoler autant que possible le Fondaco, on construisit devant
une partie de la façade un mur percé d’une porte servant au trans-
port des marchandises, et l’on éleva devant une des tours une mai-
sonnette qui en cachait la moitié. Enfin, de peur que les tours ne
parussent aux Turcs un signe de noblesse et de puissance, on les rasa
au xvue siècle. Pareilles précautions ne furent pas jugées nécessaires
contre les Allemands, dont le Fondaco particulier conservait encore
il y a peu de temps ses deux tours.

Pierre Pesaro, le dernier des Pesaro, mort en 1830, légua le
Fondaco dei Turchi au comte Manin, fils de sa sœur. Manin le vendit
en 1838 à Antonio Busetto Petich, qui changea la destination de
l’édifice. La partie donnant sur le rivo ciel miglio fut louée à l’Etat et
convertie en dépôt de tabac et de cigares, pendant que le reste
demeurait inoccupé.

La ruine qui envahissait depuis longtemps le Fondaco finit par
faire de nouveaux et menaçants progrès. En cet état, l’édifice avait
une physionomie pittoresque que nous serions presque tenté de
regretter. Des pans de bois et des murs en briques masquaient en
partie le portique du rez-de-chaussée; les arcades de l’espace occupé
autrefois par les tours étaient murées. Seule, la loggia du premier
étage apparaissait dans toute sa beauté, quoiqu’on eût substitué
presque partout à sa balustrade un parapet de briques. Quelques
planches vermoulues occupaient l’ouverture de plusieurs fenêtres
bizarrement percées après coup; une autre fenêtre, fort mesquine,
donnant sur un balcon en fer, coupait deux archivoltes. Enfin, un
simple toit de tuiles avait remplacé les créneaux arabes. De tous les
côtés, dans les interstices, l’herbe et le lierre associaient leurs
nuances gaies au rouge de la brique et au gris des colonnes. Au
milieu de cette végétation capricieuse formant des touffes de verdure
au-dessus de plusieurs chapiteaux, faisant saillie à l’intérieur des
arcades et frissonnant autour des cintres allongés, un cerisier

1. Quelques nouvelles fenêtres, imprudemment percées et troublant la symétrie
de la façade, contribuèrent à rendre l’édifice moins solide.
 
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