L’ART DÉCORATIF DANS LE VIEUX PARIS.
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sans laisser de traces, à l’exception de celui de la reine Marguerite
de Valois, plus tard propriété des Mirabeau, dont la maison n° 6 con-
serveencore unepartie delafaçade surmontée de lucarnes dans le style
du xvie siècle. La muraille opposée formait une rotonde précédée d’un
vaste perron, s’étendant sur d’immenses jardinsqui se couvrirent plus
tard de maisons, et dont les Petits-Augustins constituaient une annexe.
Au n° 56 de la même rue, M. Daly a relevé 1 les fenêtres et les
balcons d’une maison construite sous le règne de Louis XV. En nous
détournant un instant de notre route, nous rencontrerons dans la rue
Visconti, n° 11 (autrefois rue des Marais), l’hôtel de Rannes où ont
habité successivement Racine, Advienne Lecouvreur et M"“ Clairon.
La maison conserve encore la rampe de fer de son escalier2, et les
dispositions du xvne siècle.
La rue de Tournon ouverte postérieurement et mise en communi-
cation directe avec la rue de Seine, est plus riche en hôtels histo-
riques. Le premier, situé au n° 6, et connu sous le nom de l’hôtel de
Ventadour, a été reconstruit en 1713 par le financier Chartrain de
Saint-Aignan, dans les mains duquel il était passé. Il s’élève au fond
d’une vaste cour s’annonçant sur la rue par un portail à colonnes
sur le fronton duquel sont couchées deux figures allégoriques. Les
appartements intérieurs avaient été enrichis par Chavanne, peintre
du Roi, de peintures dont il ne reste plus de traces, les fresques
qui décorent le grand escalier ayant été trop souvent retouchées
pour qu’on puisse y reconnaître une main particulière. L’hôtel
de Nivernais, n° 80, qui lui fait suite, avait appartenu au favori de
Marie de Médicis, Concini maréchal d’Ancre; il fut restauré et décoré
à la fin du xvme siècle sur les dessins de Peyre, qui appela, pour le
seconder dans son travail, les meilleurs artistes de son époque. Toute
la sculpture d ornement fut confiée à Gilles-Pierre Cauvet d’Aix,
architecte de Monsieur le comte de Provence, le plus délicat composi-
teur du règne de Louis XVI. L’exécution des plafonds et des peintures
était due à Durameau, Hubert Robert et Julien de Parme. Depuis la
transformation de cet hôtel en caserne, toute la décoration intérieure
que Thiery décrit avec tant de complaisance, a été enlevée; il ne reste
plus de traces du passage de Cauvet que dans quelques ferrures de
portes et de fenêtres qui ont conservé leurs délicates ciselures en
cuivre, dans plusieurs cheminées de marbre et dans deux pièces dont
d. Daly, Motifs extérieurs, t. II, Louis XV, pi. 21.
2. Bulletin de la Société des Monuments Parisiens, 1888, n° 8, p. 119,
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sans laisser de traces, à l’exception de celui de la reine Marguerite
de Valois, plus tard propriété des Mirabeau, dont la maison n° 6 con-
serveencore unepartie delafaçade surmontée de lucarnes dans le style
du xvie siècle. La muraille opposée formait une rotonde précédée d’un
vaste perron, s’étendant sur d’immenses jardinsqui se couvrirent plus
tard de maisons, et dont les Petits-Augustins constituaient une annexe.
Au n° 56 de la même rue, M. Daly a relevé 1 les fenêtres et les
balcons d’une maison construite sous le règne de Louis XV. En nous
détournant un instant de notre route, nous rencontrerons dans la rue
Visconti, n° 11 (autrefois rue des Marais), l’hôtel de Rannes où ont
habité successivement Racine, Advienne Lecouvreur et M"“ Clairon.
La maison conserve encore la rampe de fer de son escalier2, et les
dispositions du xvne siècle.
La rue de Tournon ouverte postérieurement et mise en communi-
cation directe avec la rue de Seine, est plus riche en hôtels histo-
riques. Le premier, situé au n° 6, et connu sous le nom de l’hôtel de
Ventadour, a été reconstruit en 1713 par le financier Chartrain de
Saint-Aignan, dans les mains duquel il était passé. Il s’élève au fond
d’une vaste cour s’annonçant sur la rue par un portail à colonnes
sur le fronton duquel sont couchées deux figures allégoriques. Les
appartements intérieurs avaient été enrichis par Chavanne, peintre
du Roi, de peintures dont il ne reste plus de traces, les fresques
qui décorent le grand escalier ayant été trop souvent retouchées
pour qu’on puisse y reconnaître une main particulière. L’hôtel
de Nivernais, n° 80, qui lui fait suite, avait appartenu au favori de
Marie de Médicis, Concini maréchal d’Ancre; il fut restauré et décoré
à la fin du xvme siècle sur les dessins de Peyre, qui appela, pour le
seconder dans son travail, les meilleurs artistes de son époque. Toute
la sculpture d ornement fut confiée à Gilles-Pierre Cauvet d’Aix,
architecte de Monsieur le comte de Provence, le plus délicat composi-
teur du règne de Louis XVI. L’exécution des plafonds et des peintures
était due à Durameau, Hubert Robert et Julien de Parme. Depuis la
transformation de cet hôtel en caserne, toute la décoration intérieure
que Thiery décrit avec tant de complaisance, a été enlevée; il ne reste
plus de traces du passage de Cauvet que dans quelques ferrures de
portes et de fenêtres qui ont conservé leurs délicates ciselures en
cuivre, dans plusieurs cheminées de marbre et dans deux pièces dont
d. Daly, Motifs extérieurs, t. II, Louis XV, pi. 21.
2. Bulletin de la Société des Monuments Parisiens, 1888, n° 8, p. 119,