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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 5.1891

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Nr. 3
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Müntz, Eugène: Le musée de l'École des Beaux-Arts, 5
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https://doi.org/10.11588/diglit.24449#0203

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LE MUSÉE DE L’ÉCOLE DES BEAUX-ARTS.

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reconnaître qu’aucune autre collection ne déroule devant nous, en une
série aussi complète, et avec des signatures aussi illustres, les évolu-
tions du goût national : les membres de l’Académie Royale de Pein-
ture et de Sculpture, gardiens jaloux de la tradition classique (cette
tradition, que n’importe quel siècle comprend d’une façon différente,
selon qu’il s’attache à la noblesse, à la grâce ou à la liberté qui éclatent
dans les œuvres antiques), ont eu beau faire : à chaque génération,
l’esprit nouveau a fait éclater le cadre étroit des conventions
académiques.

Il est de mode aujourd’hui de mettre en cause la pauvre antiquité
classique et de la rendre responsable du choix de tant de sujets peu
propres à enflammer l’imagination des débutants. Mais l’antiquité
biblique ne doit- elle pas prendre place sur la sellette à côté de sa sœur
puînée? « Manué, père de Samson, offrant un sacrifice », programme
imposée en 1721 aux élèves qui prirent part au concours dontNatoire
sortit vainqueur; « David, condamnant à mort l’Amalécite qui lui
apporte la tête de Saül » (1778); « Nabuchodonosor faisant tuer les
enfants de Sédécias » (1787); « Eléazar préférant mourir plutôt que
de manger des viandes défendues » (1792), ont-ils quelque chose à
envier à « Sabinus et Eponine devant Vespasien » (1802), à « Diago-
ras porté en triomphe par ses fils » (1814), à « Œnone, refusant de
suivre Paris au siège de Troie » (1816)? N’ayons pas deux poids et
deux mesures, et reconnaissons que, du moment où l’on renonce à
puiser dans l’histoire nationale et dans l’histoire moderne, les épi-
sodes de l’histoire ancienne, soit sacrée, soit profane, offrent les
mêmes inconvénients.

Aussi bien, ce que Ton demandait aux concurrents, ce n’était pas
tant un chef-d’œuvre qu’une garantie de connaissances techniques,
d’une part, une garantie de talent, de l’autre. Peu importait donc le
sujet.

Plus gênant que le formalisme académique était le joug imposé
aux artistes par l’ancienne société elle-même, avec ses conventions si
absolues, avec son culte pour la solennité ou pour les belles manières.
Tout ce qui s’appelait vivacité, fougue, passion, tempérament, devait
s’effacer pour ne laisser place qu’à l’expression des sentiments savam-
ment rythmés ou à la recherche de la pompe. Aussi les Grands Prix
contemporains du Roi-Soleil pèchent-ils invariablement et par la
lourdeur du coloris et par la banalité de la conception.

Il n’entre pas dans mes vues d’analyser une à une toutes ces toiles,
dont un certain nombre — est-il nécessaire de le déclarer? — portent
 
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