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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 5.1891

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Nr. 5
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Durrieu, Paul: Alexandre Bening et les peintres du bréviaire Grimani, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24449#0390

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ALEXANDRE BENING.

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cette seule œuvre, et qu’il doit exister ailleurs d’autres témoignages
de son talent. Pour les trouver, il n’est pas nécessaire de chercher
bien loin; il suffît d’examiner dans son ensemble la série des manus-
crits provenant du seigneur de la Gruthuyse que possède la Biblio-
thèque nationale. Dans les miniatures d’un certain nombre d’entre
eux, on reconnaît, à n’en pas douter, la main du même maitre, à ces
signes caractéristiques plus faciles à percevoir par la comparai-
son qu’à définir par des mots, à cette répétition des mêmes types,
à cet emploi des mêmes tonalités particulières dans le coloris, à cette
même manière de poser la touche et de conduire le dessin qui consti-
tuent le style individuel d’un artiste *.

Plusieurs des volumes en question offrent cet avantage d’être
datés. On peut donc les ranger de manière à former une suite chro-
nologique. Or, si on les étudie suivant cet ordre, un fait important se
dégage. Les enlumineurs de profession, au moyen âge et jusqu’au
xvie siècle, ne sont trop souvent, hélas! que de vulgaires praticiens,
à l’esprit paresseux. Une fois arrivés à une certaine habileté de main,
ils s’arrêtent dans leurs efforts; ils laissent en quelque sorte leurs
facultés se figer à un point donné, et adoptent, pour ne plus rien y
changer, des formules dont ils ne se départent plus. On les voit con-
tinuer imperturbablement à suivre, pendant de longues années, les
mêmes errements, et à peindre encore à la fin de leur existence iden-
tiquement comme ils le faisaient à leur début, fermant les yeux par
conséquent aux conquêtes nouvelles dans le domaine de l’art, et se
laissant ainsi dépasser par leurs rivaux des générations plus jeunes.
Quelques-uns cependant, mais en très petit nombre, secouent cette
torpeur. Au lieu de rester en arrière, ils prennent, au contraire,
résolument la tête du mouvement. Ils cherchent à profiter des exemples
qu’ils peuvent recueillir, et, sans cesse en éveil, se préoccupent tou-
jours d’atteindre le mieux. Ceux-là sont de vrais artistes, des
novateurs, parfois des chefs d’école ayant exercé une influence consi-
dérable, qui méritent leur place dans l’histoire de l’art.

C’est incontestablement à cette seconde catégorie qu’appartient le

1. On peut noter, comme trait caractéristique, la forme allongée des visages qui
dans les têtes de femme, par suite d’un arrangement de la chevelure rétrécissant
le front, se rapproche plutôt d’une ellipse que d’un ovale. Mais ce qui est surtout
une marque infaillible, c’est la présence constante de certains tons limpides et
transparents, un carmin léger, un lilas presque gris, celui-ci employé principalement
pour des banderoles où courent des inscriptions en caractères bleu de ciel, qui sont
particuliers au maître du Boëce et ne se rencontrent que dans ses ouvrages.
 
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