CORRESPONDANCE DE L’ÉTRANGER
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tout avec l’annulation de règlements au moyen desquels une partie des artistes
peut, selon son caprice, barrer arbitrairement la voie à d’autres, l’Autriche
serait à même de fournir un ensemble d’œuvres infiniment plus intéressant que
ce qui se voit chaque année au Künstlerhaus. Et l’on se prend à souhaiter que
la Sécession s’adjuge le beau rôle, qui consisterait à permettre à l’Autriche de se
montrer enfin une fois ce qu’elle est et non plus seulement ce que la veut une
certaine société, un certain clan.
WILLIAM RÏTTER
BELGIQUE
UNE EXPOSITION DE PORTRAITS ANCIENS A BRUXELLES
a r une étrange et mystérieuse coïncidence, le
jour où s’ouvrait, à Paris, l’Exposition de Por-
traits de femmes et d’enfants, Bruxelles voyait
s’ouvrir, dans les galeries du Musée moderne,
actuellement fermé pour cause de remaniement,
une exposition de portée similaire.
Organisée sous de hauts patronages, cette
réunion d’effigies, pour la plupart anciennes,
comprend un certain nombre d’œuvres que re-
cèlent, en temps ordinaire, d’opulentes demeures
et dont, pour plusieurs du moins, l’attrait de nou-
veauté se combine avec un intérêt d’art et d’histoire incontestable.
Quelques marchands notables, spécialement de l’étranger, MM. Sedelmeyer,
Durand-Ruel, d’autres encore, ont obligeamment prêté leur concours aux orga-
nisateurs de ce Salon, numériquement assez restreint, digne pourtant, à des
titres divers, de l’attention des curieux.
Un avis du catalogue déclare laisser aux exposants la responsabilité des
attributions. Mesure prudente autant que justifiée, car qui de nous ignore la déce-
vante influence exercée par la possession sur le jugement de qui possède? Être
pitoyable à cette humaine faiblesse est un devoir. Convenons qu’elle entre pour
une part dans les joies du collectionneur et que la vouloir railler est presque
faire preuve d’ingratitude envers qui nous procure l’occasion de voir des choses
excellentes, encore que mal dénommées. C’est dire que nous userons avec réserve
du droit qu’avec le catalogue on achète en entrant.
D’une manière générale, le xvie siècle et surtout le xvne fournissent à l’Expo-
sition ses premiers éléments d’attrait. L’appoint de quelques toiles du xvme siècle
et du nôtre y est des mieux venus pour tempérer la monotonie, en quelque
sorte fatale, d’un ensemble où dominent les œuvres créées sous des influences
communes, les Néerlandais étant ici en majorité.
Contraste heureux, d’ailleurs, que celui qui met en présence l’austérité du
xvie siècle et les frivoles réunions du xvuc où tout est façonné par la mode, tout,
jusqu’au paysage où se déroulent ces scènes de famille dans lesquelles revit
avec tant d’éloquence à nos yeux la physionomie des sociétés éteintes. Ce hasard
des rapprochements aligne côte à côte deux portraits de famille de Pierre Pourbus
— 38 PÉRIODE
XVIII.
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tout avec l’annulation de règlements au moyen desquels une partie des artistes
peut, selon son caprice, barrer arbitrairement la voie à d’autres, l’Autriche
serait à même de fournir un ensemble d’œuvres infiniment plus intéressant que
ce qui se voit chaque année au Künstlerhaus. Et l’on se prend à souhaiter que
la Sécession s’adjuge le beau rôle, qui consisterait à permettre à l’Autriche de se
montrer enfin une fois ce qu’elle est et non plus seulement ce que la veut une
certaine société, un certain clan.
WILLIAM RÏTTER
BELGIQUE
UNE EXPOSITION DE PORTRAITS ANCIENS A BRUXELLES
a r une étrange et mystérieuse coïncidence, le
jour où s’ouvrait, à Paris, l’Exposition de Por-
traits de femmes et d’enfants, Bruxelles voyait
s’ouvrir, dans les galeries du Musée moderne,
actuellement fermé pour cause de remaniement,
une exposition de portée similaire.
Organisée sous de hauts patronages, cette
réunion d’effigies, pour la plupart anciennes,
comprend un certain nombre d’œuvres que re-
cèlent, en temps ordinaire, d’opulentes demeures
et dont, pour plusieurs du moins, l’attrait de nou-
veauté se combine avec un intérêt d’art et d’histoire incontestable.
Quelques marchands notables, spécialement de l’étranger, MM. Sedelmeyer,
Durand-Ruel, d’autres encore, ont obligeamment prêté leur concours aux orga-
nisateurs de ce Salon, numériquement assez restreint, digne pourtant, à des
titres divers, de l’attention des curieux.
Un avis du catalogue déclare laisser aux exposants la responsabilité des
attributions. Mesure prudente autant que justifiée, car qui de nous ignore la déce-
vante influence exercée par la possession sur le jugement de qui possède? Être
pitoyable à cette humaine faiblesse est un devoir. Convenons qu’elle entre pour
une part dans les joies du collectionneur et que la vouloir railler est presque
faire preuve d’ingratitude envers qui nous procure l’occasion de voir des choses
excellentes, encore que mal dénommées. C’est dire que nous userons avec réserve
du droit qu’avec le catalogue on achète en entrant.
D’une manière générale, le xvie siècle et surtout le xvne fournissent à l’Expo-
sition ses premiers éléments d’attrait. L’appoint de quelques toiles du xvme siècle
et du nôtre y est des mieux venus pour tempérer la monotonie, en quelque
sorte fatale, d’un ensemble où dominent les œuvres créées sous des influences
communes, les Néerlandais étant ici en majorité.
Contraste heureux, d’ailleurs, que celui qui met en présence l’austérité du
xvie siècle et les frivoles réunions du xvuc où tout est façonné par la mode, tout,
jusqu’au paysage où se déroulent ces scènes de famille dans lesquelles revit
avec tant d’éloquence à nos yeux la physionomie des sociétés éteintes. Ce hasard
des rapprochements aligne côte à côte deux portraits de famille de Pierre Pourbus
— 38 PÉRIODE
XVIII.
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