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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 2
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Dukas, Paul: "Fidelio"
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0150

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« FIDELIO

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maussade pièce de Bouilly et du drame musical auquel elle sert de
prétexte soit un bien. Cette transformation produit un résultat ana-
logue à celui que donnerait la métamorphose des rapides récitatifs
de Don Juan en autant de récitatifs obligés. Si bien que ceux-ci
fussent traités, ils ne pourraient que ralentir l’allure de la partition
et enlever à la musique quelques-uns de ses caractères essentiels.

La première représentation de Fidelio fut donnée le 20 novem-
bre 1805, dans des conditions aussi défavorables que possible, au
moment de l’occupation française, alors que la ville de Vienne était
désertée par toute la haute société. L’ouvrage n’eut pas plus de trois
représentations consécutives et la critique fut extrêmement dure
pour Beethoven : le journal de Kotzebue, Der Freimuthige, la Gazette
du monde élégant, la Gazette générale de musique, se bornèrent à
l’exécuter en peu de lignes, lui reprochant avec un hel ensemble
l’allure tourmentée de sa mélodie, sa bizarrerie harmonique et le
manque d’effet scénique de sa partition. Rien de ce qui nous émeut
dans l’œuvre du maître ne trouva grâce devant ces terribles cen-
seurs ; la Gazette générale de musique, journal de spécialistes pour-
tant, déclara même le chœur des prisonniers « complètement man-
qué » ! On s’explique que Beethoven ait ressenti une profonde
humiliation de tant d’injustice. Il exprima sa rancœur d'une manière
énergique, lors d’une visite que lui fit le fameux violoniste Baillot.
Celui-ci le rencontra dans la salle basse d’une auberge. Un valet
d’écurie ronflait dans un coin. Beethoven, au cours de l’entretien,
fit part à Baillot de son découragement, puis, soudain, lui désignant
le rustre : « Tenez, je voudrais être aussi bête que ce gaillard-là! »
L'année suivante, cependant, le baron Braun, directeur du
théâtre An der Wien, résolut d’en appeler du jugement hâtif qui
avait condamné Fidelio. Les amis du maître se concertèrent pour
obtenir de lui des remaniements qu’il n’accorda pas sans lutter avec
désespoir. Il s’y résolut néanmoins, et Fidelio, repris le 29 mars 1806,
reçut, cette fois, un tout autre accueil. La version qui fut alors
exécutée nous a été conservée; le célèbre musicographe Otto Jalin,
qui fit d’intéressantes études comparatives sur les différentes rédac-
tions de l’œuvre, a publié, chez Breitkopf et Hârtel, ce deuxième
arrangement de Léonorc. Ce fut pour cette reprise que Beethoven
retoucha la première ouverture et lui donna une ampleur de dévelop-
pement qu’elle ne possédait pas dans le texte primitif. Cette ouver-
 
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