GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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d'autres étaient avec eux, comme Paul-Louis Courier, qui, dans sa lettre en date
du 8 janvier 1799, adressée à l'antiquaire Chlewaski, faisait un tableau si noir
du vandalisme français en Italie !
Quoi qu’il en soit, ni les artistes signataires de la pétition provoquée par
Quatremère, ni les savants qui opinaient dans le même sens, ne devaient être
écoutés. Une contre-pétition, signée de J.-B. Isabey, Duvivier, Vernet, Dupasquier,
van Cleemputte, Alexandre Lenoir, etc., fut, au reste, presque aussiLôt rédigée
et eut les honneurs de l’insertion dans le Moniteur du 12 vendémiaire an Y
(3 octobre 1796).
Le musée du Louvre ouvert, et les œuvres venant de l’étranger exposées, il
n’y avait plus à chercher le demi-secret admis par le Comité d'instruction pu-
blique, en 1794.
Le général de Pommereul, qui venait de traduire l'ouvrage de Milizia : De
l’art de voir dam les Beaux-Arts, ne se contenta pas, dans un appendice, de
réclamer les quelques célèbres antiquités restées encore en Italie, y compris la
colonne Trajane, qu'il voulait voir ériger sur la pointe de la Cité, et qui évita
cette aventure grâce au bon sens de Daunou, il osa insérer une liste des chefs-
d’œuvre rapportés d'Italie, de Belgique, de Hollande et d’Allemagne. Liste néfaste,
qui fut utilement consultée par les alliés, en 1813, lors des reprises.
Mais, comme il devait fatalement arriver, bien vite il y eut abus dans les
enlèvements. Les commissaires les plus sérieux, comme Monge, prirent non
seulement ce qui avait un intérêt scientifique ou artistique, mais aussi les choses
les plus futiles, celles peut-être dont l'enlèvement était le plus douloureux pour
les superstitieuses populations de l'Italie, comme en témoignent les extraits
d’une lettre adressée par les Commissaires du Gouvernement à la recherche des
objets des sciences et des arts, au Directoire exécutif de la République française :
Citoyens Directeurs,
A Lurette, le 2G pluviôse an 4'.
Le général en chef Buonaparte, en recueillant pour le compte de la République
française les objets que Collé, général du pape, n’avait, pas eu le teins d'enlever du
trésor de Lorette, s’est emparé des objets portatifs dont on s’était servi pour abuser de
la crédulité des peuples, et qui consistent :
1° Dans l’image de bois, prétendue miraculeuse, de la Madona;
2° Dans un haillon de vieux camelot de laine moiré, que l'on dit avoir été la robe de
Marie ;
3° Dans trois écuellcs cassées de mauvaise layance qui, dit-on, ont fait partie de son
ménage, et qui certainement ne sont pas d'une assez haute antiquité pour cela.
... Nous en avons formé une petite caisse, dans laquelle nous avons placé le procès-
verbal. Vous le trouverez dans un paquet contenant l'histoire imprimée de la Santa-
Casa, telle qu’on la vendait ici... La Santa-Casa restera fermée jusqu’à nouvel ordre du
général en chef.
Salut et respect.
Tixet et Moxge
Enfin, on ne saurait mieux terminer les typiques lettres relatives aux enlè-
vements révolutionnaires que par celle-ci, émanant de Bonaparte lui-même :
Au quartier général, Tolentino, le 1er ventôse an Y.
Citoyens Directeurs,
La connssion des savans a fait une bonne récolte à Ravenne, Itimini, Pesaro, Ancône,
J. Moniteur du 10 ventôse an V .28 février 1 ”07).
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d'autres étaient avec eux, comme Paul-Louis Courier, qui, dans sa lettre en date
du 8 janvier 1799, adressée à l'antiquaire Chlewaski, faisait un tableau si noir
du vandalisme français en Italie !
Quoi qu’il en soit, ni les artistes signataires de la pétition provoquée par
Quatremère, ni les savants qui opinaient dans le même sens, ne devaient être
écoutés. Une contre-pétition, signée de J.-B. Isabey, Duvivier, Vernet, Dupasquier,
van Cleemputte, Alexandre Lenoir, etc., fut, au reste, presque aussiLôt rédigée
et eut les honneurs de l’insertion dans le Moniteur du 12 vendémiaire an Y
(3 octobre 1796).
Le musée du Louvre ouvert, et les œuvres venant de l’étranger exposées, il
n’y avait plus à chercher le demi-secret admis par le Comité d'instruction pu-
blique, en 1794.
Le général de Pommereul, qui venait de traduire l'ouvrage de Milizia : De
l’art de voir dam les Beaux-Arts, ne se contenta pas, dans un appendice, de
réclamer les quelques célèbres antiquités restées encore en Italie, y compris la
colonne Trajane, qu'il voulait voir ériger sur la pointe de la Cité, et qui évita
cette aventure grâce au bon sens de Daunou, il osa insérer une liste des chefs-
d’œuvre rapportés d'Italie, de Belgique, de Hollande et d’Allemagne. Liste néfaste,
qui fut utilement consultée par les alliés, en 1813, lors des reprises.
Mais, comme il devait fatalement arriver, bien vite il y eut abus dans les
enlèvements. Les commissaires les plus sérieux, comme Monge, prirent non
seulement ce qui avait un intérêt scientifique ou artistique, mais aussi les choses
les plus futiles, celles peut-être dont l'enlèvement était le plus douloureux pour
les superstitieuses populations de l'Italie, comme en témoignent les extraits
d’une lettre adressée par les Commissaires du Gouvernement à la recherche des
objets des sciences et des arts, au Directoire exécutif de la République française :
Citoyens Directeurs,
A Lurette, le 2G pluviôse an 4'.
Le général en chef Buonaparte, en recueillant pour le compte de la République
française les objets que Collé, général du pape, n’avait, pas eu le teins d'enlever du
trésor de Lorette, s’est emparé des objets portatifs dont on s’était servi pour abuser de
la crédulité des peuples, et qui consistent :
1° Dans l’image de bois, prétendue miraculeuse, de la Madona;
2° Dans un haillon de vieux camelot de laine moiré, que l'on dit avoir été la robe de
Marie ;
3° Dans trois écuellcs cassées de mauvaise layance qui, dit-on, ont fait partie de son
ménage, et qui certainement ne sont pas d'une assez haute antiquité pour cela.
... Nous en avons formé une petite caisse, dans laquelle nous avons placé le procès-
verbal. Vous le trouverez dans un paquet contenant l'histoire imprimée de la Santa-
Casa, telle qu’on la vendait ici... La Santa-Casa restera fermée jusqu’à nouvel ordre du
général en chef.
Salut et respect.
Tixet et Moxge
Enfin, on ne saurait mieux terminer les typiques lettres relatives aux enlè-
vements révolutionnaires que par celle-ci, émanant de Bonaparte lui-même :
Au quartier général, Tolentino, le 1er ventôse an Y.
Citoyens Directeurs,
La connssion des savans a fait une bonne récolte à Ravenne, Itimini, Pesaro, Ancône,
J. Moniteur du 10 ventôse an V .28 février 1 ”07).