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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 3
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Renan, Ary: Gustave Moreau, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0207

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

tanément son invention plastique; il n’a peut-être pas trouvé là
d'accents proprement supérieurs ; mais, de ses premières à ses
dernières heures, nous le verrons s’absorber parfois dans de pieuses
images et parer encore les héros de l'Ancien Testament, les saintes ligu-
res et la Divinité chrétienne elle-même du plus merveilleux appareil.

Sujets saches. — Quelle tristesse devant l’inachèvement de ce
grand tableau des Rois Mages sur le chemin de Bethléem (g. m.),
qui aurait été une œuvre si étrangement religieuse ! Les tableaux de
piété de Moreau ont le plus souvent de moindres dimensions, comme
pour être placés dans un intime oratoire 1 : Christ au mont clos
Oliviers, Anges annonciateurs, Calvaires, Dépositions de Croix, Piètre
et Mises au tombeau, sujets que, pour la plupart, il reproduit en plu-
sieurs exemplaires, semblent lui être prétexte à lutter d’éloquente
finesse avec le rendu des premiers grands maîtres flamands, qui
sont des miniaturistes de génie ; les deux rares spécimens entrés au
Musée du Luxembourg par le don Charles liayem ne sont-ils pas de
la plus savoureuse technique qui jamais ait été pratiquée? Puis, voici
le peuple des martyrs et des confesseurs : Saint Sébastien et ses
bourreaux, Saint Sébastien secouru par les saintes femmes, plus d’un
Saint Georges, des Saint Michel, Saint Martin, Sainte Elisabeth
(miracle des roses), etc., toute une hagiographie transcendante.

Un événement fait époque dans la vie de Moreau. Vers 1881, un
ingénieux amateur de grand art, M. Antony Roux, lui commanda
l’illustration des plus belles Fables de La Fontaine. Comme nous le
verrons, loin de sortir de ses préoccupations familières, l’artiste
trouve un champ naturel au développement de son esthétique dans
les apologues du «bonhomme». En 1882, vingt-cinq aquarelles de
cette série sont exposées dans les galeries Durand-Ruel; en 1886, le
travail est achevé : quarante nouvelles aquarelles complètent l’ou-
vrage, et, avec elles, sont exposées, chez Goupil, rue Chaptal, six
des grandes aquarelles les plus notoires : Le Poète persan, F Eléphant
sacré, Bethsabée, Ganymède, Le Sphinx vainqueur, Salomé à la prison.
Si l’on pense aux deux grandes images que l’artiste a élaborées dans
son cerveau pour les condenser dans les deux œuvres signalées du
Salon de 1884, on demeure stupéfait du commerce immense et
multiforme qu'il a entretenu durant cette période avec le monde

j. Nous avons signalé, dans la Chronique des Arts (4 février 1899), le Che-
min de Croix en quatorze tableaux (lmxOm 80), peint par Moreau pour l’église de
Decazeville (Aveyron), vers 1863.
 
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