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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

DOI issue:
Nr. 4
DOI article:
Lambin, Émile: La flore sculpturale du Moyen Âge, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0309

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292

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

partout où s’élève un édifice gothique, on trouve cette flore parié-
taire variée du grand art du moyen âge. Nulle terre sans seigneur,
disaient les féodaux; nulle église sans feuillages, auraient pu dire
les constructeurs, et ils en mirent dans les humbles sanctuaires
de village, comme dans les altières cathédrales, apportant dans
toutes leurs compositions le même soin et la même conscience.
Abandonnant l’acanthe, que les artistes romans avaient reçue de
l'antiquité, et avec laquelle ces artistes avaient fait des chefs-d’œu-
vre, les sculpteurs gothiques prirent leurs modèles dans la flore
indigène, et, avec nos feuilles françaises, créèrent à leur tour des
merveilles. Mais n’anticipons pas, et, avant de les louer, entrons
dans notre sujet, et voyons quelles furent les origines de notre
flore sculpturale, quels principes présidèrent au travail qui nous
la donna, et quelles furent ses divisions, ou, pour mieux dire, ses
évolutions, depuis le jour où elle naquit jusqu’à celui qui la vit
s'incliner, se laner et périr.

I

Au commencement du xilp siècle, alors que la feuille d’acanthe
règne en souveraine dans les édifices romans, on voit poindre deux
feuilles qui se mêlent timidement aux riches floraisons de la plante
grecque. L’une est mince, légère, lancéolée, affectionne les bois, les
lieux humides : c’est l’arum; l’autre est lourde, grasse, arrondie, se
plaît à flotter sur les étangs : c’est le nénuphar. Puis elles se multi-
plient, gagnent du terrain, et, peu à peu, avec l’aide d’autres plantes,
elles étouffent l’acanthe, qui disparaît au xme siècle. Dans cette
marche progressive, l’arum est resté ce qu’il était, simple et délicat;
mais, sous les ciseaux des premiers artistes gothiques, le nénuphar
a pris des formes plus élégantes, et celui que nous voyons à Saint-
Pierre*-de-Montmartre, à Saint-Julien-le-Pauvre et à Notre-Dame de
Paris n’est plus celui qui existe dans l’abside de Saint-Martin-des-
Champs.

Pendant que l’arum et le nénuphar allaient ainsi, repoussant
l’acanthe, d’autres végétaux apparaissaient : le plantain, qui borde
les routes, qui semble heureux d’être foulé aux pieds ; la fougère,
qui croît dans les forêts, qui recherche l’ombre et la fraîcheur ; la
vigne, enfin, la grande amie des sculpteurs du moyen âge, qui
mirent à l’interpréter toute la fécondité de leur génie et qui ne
l’abandonnèrent jamais. Ici une question se pose pour l’observateur
attentif. La vigne primordiale, c’est-à-dire telle qu’elle fut inter-
 
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