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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 5
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Lafenestre, Georges: Le marquis de Chennevières
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0425

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

serviette bourrée, partant pour la rue de Grenelle, il l'empocha,
cette lettre, en nous disant : « Je l’emporte! vous voyez! Attendez-
nous ici et faites les paquets. » Nous faisions les paquets, puis,
quelques heures après, on le voyait rentrer, enjoué et souriant :
« Allons, mes enfants, ce n'est pas encore pour cette fois. Je ne vous
laisserai donc jamais tranquilles ! Voilà de la besogne! » Et il met-
tait sous clef le pli protecteur. C’est grâce, sans nul doute, à cette
attitude résolue, qu’il put, jusqu’en 1878, résister, durant sept minis-
tères des plus variés, à toutes les oppositions d’inertie ou de défiance,
à toutes les intrigues d’intérêts froissés ou d’inintelligences dérou-
tées que soulevait forcément une initiative si rare et si tenace.

Dans des conditions pareilles, il n’y a pas de temps à perdre.
Le nouveau directeur n’en perdit point. Sa nomination est du
23 décembre 1873. Quatre jours après, une commission supérieure
des Beaux-Arts, restreinte et compétente (transformée plus tard,
contre son avis, en vaste conseil des Beaux-Arts), est établie et fonc-
tionne. Les vacances du jour de l’an tombaient juste à point pour
lui permettre de préparer ses premières sorties. Le 11 janvier 1874,
fidèle à sa parole, en prévision du Salon, il rappelle aux artistes leurs
éternelles doléances, leurs désirs, sans cesse renouvelés, d’émanci-
pation, la manifestation solennelle de 1870, les statuts de l’Acadé-
mie nationale approuvés et signés par eux, il leur offre, en consé-
quence, la liberté. Les artistes firent la sourde oreille. C’est en
vain, deux fois encore, dans la même année, que le ministre les
mettra en demeure de prendre en mains leurs affaires. Presque
personne ne bouge. On a peur de la liberté offerte. Il faudra, quelques
années après, un Mentor plus brutal, comme l’on dit alors, « pour les
jeter à l’eau » et pour leur imposer cette indépendance, active et forti-
fiante, qu’ils avaient si grand tort de redouter, et dans laquelle ils
ont su trouver, comme le prévoyait bien M. de Chennevières, avec
plus de causes d’émulations, un sentiment plus juste de leur dignité
et de leurs intérêts. Quoi qu’il en soit, il fallut faire encore le Salon de
1874, puis celui de 1873, puis les suivants. Le libéralisme du direc-
teur ne s’y put montrer que dans les modifications du règlement.
Au jury nommé par l’administration fut substituée une liste
d’artistes notables, établie par l’élection, parmi lesquels le sort
désignerait, chaque année, les jurys d’admission et de récompense.
L’institution du Prix du Salon assura, chaque année, à un jeune
artiste un séjour libre en Italie, dans des conditions moins rigou-
reuses que celles du prix de Rome ; en même temps, la création des
 
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