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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Jugement dernier, des sujets tirés de la Genèse, etc.; il ne reste rien
de ce bel ensemble1. Le transept est du xive siècle, les nefs du xve;
enfin, du xvie, le portail de la façade, avec ses trois ouvertures —
dont celle du milieu plus vaste et plus élevée que les deux autres
— surmontées de hauts frontons triangulaires découpés à jour, par-
dessous lesquels s’étagent en profondeur des voussures richement
décorées de festons et de dais malheureusement veufs de leurs
statuettes, comme le sont les niches non moins délicatement fouillées
des contreforts qui encadrent les portes. La tour qui surmonte le
côté nord de la façade fut commencée en 1505; mais la partie supé-
rieure, dont la sécheresse contraste avec la riche ornementation du
portail, ne date guère que du xvne siècle; l’autre tour n’a jamais été
commencée.
L’intérieur saisit, dès l’entrée, par la superbe ordonnance,
l’aspect de majesté et d’élégance de ses cinq nefs élancées, surtout
de la nef centrale, vaste et haute, qu’emplissent de douce clarté les
deux rangées des vitraux du triforium et des grandes fenêtres —
sans compter la belle rose de la façade, masquée en partie par les
orgues, et les deux de l’extrémité des transepts —- qui, en un
ensemble admirable et ininterrompu (gâté, ces dernières années,
par l’ouverture de deux fenêtres primitivement aveugles, main-
tenant décorées d’une insignifiante et désagréable mosaïque de
verre), charment les yeux par la riche et profonde harmonie de leurs
couleurs. Cette série de vitraux, une des plus belles qui existent et
que complètent des verrières isolées dans les chapelles latérales, est
surtout précieuse parce qu’elle offre de magnifiques spécimens de
la peinture sur verre à Troyes du xme au xvie siècle, art local
d’ailleurs représenté dans chaque église de la ville par quantité
d’œuvres intéressantes de toutes les époques. Entre tous ces vitraux
de Saint-Pierre, celui du Christ au pressoir, exécuté en 1625 par le
célèbre peintre verrier Linard Gontier, est particulièrement remar-
quable.
Après cela, il faut admirer, à la chapelle des fonts baptismaux,
une copie un peu modifiée de la Cène de Léonard de Vinci, belle pein-
ture sur bois de l’école lombarde (qui, malheureusement, se dégrade
de plus en plus chaque jour et que nous signalons à l’inspection
des Monuments historiques), entourée d’un cadre en bois revêtu de
1. Voir là-dessus l’intéressant travail de M. l’abbé Nioré : Un Portail de cathé-
drale au moyen âge (Extr. des Mémoires de la Société Académique de l'Aube, 1894).
Troyes, P. Nouel, 1895, in-8°.
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Jugement dernier, des sujets tirés de la Genèse, etc.; il ne reste rien
de ce bel ensemble1. Le transept est du xive siècle, les nefs du xve;
enfin, du xvie, le portail de la façade, avec ses trois ouvertures —
dont celle du milieu plus vaste et plus élevée que les deux autres
— surmontées de hauts frontons triangulaires découpés à jour, par-
dessous lesquels s’étagent en profondeur des voussures richement
décorées de festons et de dais malheureusement veufs de leurs
statuettes, comme le sont les niches non moins délicatement fouillées
des contreforts qui encadrent les portes. La tour qui surmonte le
côté nord de la façade fut commencée en 1505; mais la partie supé-
rieure, dont la sécheresse contraste avec la riche ornementation du
portail, ne date guère que du xvne siècle; l’autre tour n’a jamais été
commencée.
L’intérieur saisit, dès l’entrée, par la superbe ordonnance,
l’aspect de majesté et d’élégance de ses cinq nefs élancées, surtout
de la nef centrale, vaste et haute, qu’emplissent de douce clarté les
deux rangées des vitraux du triforium et des grandes fenêtres —
sans compter la belle rose de la façade, masquée en partie par les
orgues, et les deux de l’extrémité des transepts —- qui, en un
ensemble admirable et ininterrompu (gâté, ces dernières années,
par l’ouverture de deux fenêtres primitivement aveugles, main-
tenant décorées d’une insignifiante et désagréable mosaïque de
verre), charment les yeux par la riche et profonde harmonie de leurs
couleurs. Cette série de vitraux, une des plus belles qui existent et
que complètent des verrières isolées dans les chapelles latérales, est
surtout précieuse parce qu’elle offre de magnifiques spécimens de
la peinture sur verre à Troyes du xme au xvie siècle, art local
d’ailleurs représenté dans chaque église de la ville par quantité
d’œuvres intéressantes de toutes les époques. Entre tous ces vitraux
de Saint-Pierre, celui du Christ au pressoir, exécuté en 1625 par le
célèbre peintre verrier Linard Gontier, est particulièrement remar-
quable.
Après cela, il faut admirer, à la chapelle des fonts baptismaux,
une copie un peu modifiée de la Cène de Léonard de Vinci, belle pein-
ture sur bois de l’école lombarde (qui, malheureusement, se dégrade
de plus en plus chaque jour et que nous signalons à l’inspection
des Monuments historiques), entourée d’un cadre en bois revêtu de
1. Voir là-dessus l’intéressant travail de M. l’abbé Nioré : Un Portail de cathé-
drale au moyen âge (Extr. des Mémoires de la Société Académique de l'Aube, 1894).
Troyes, P. Nouel, 1895, in-8°.