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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 6
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Prost, Bernard: Félix Trutat (1824 - 1848): maîtres oubliés
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0502

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

feuilles tombant comme autant de ces jaunes or fixés aux vitraux gothi-
ques. C’était joli, ce que Trutat peignait, fin, tendre, délicat et ferme
comme le fond du triptyque de van Eyck, au Louvre. Moi, je ne me sentis
point jaloux de mon camarade qui me semblait du coup être un des maîtres
qui font loi.

Trutat peignait toujours, continuant son étude, malgré notre visite.

Mais, hélas! une partie de ses poumons était sur le plancher. Sa mère,
petite, brune, nerveuse, essuyait une larme cachée, debout derrière lui,
regardant ses travaux, la poitrine gonflée de funèbres pressentiments.

Nous le laissâmes. Deux jours après, il expira '.

J’espérais pouvoir encore invoquer ici le témoignage du succes-
seur de Petitot à l’Académie des Beaux-Arts et du duc d’Aumale à
l’Académie française, M. Eugène Guillaume, lui aussi, naguère,
attaché à Trutat par les liens d'une camaraderie remontant à leur
commun séjour à l’Ecole de Dijon. Mais j’ai le regret — et, pourquoi
ne pas le dire? un peu le dépit — d’avouer qu’il est resté sourd à
l’appel que je me suis permis de lui adresser de vouloir bien faire
bénéficier la mémoire de son compatriote et condisciple de quelques
lignes de souvenir. Puisse-t-il trouver bientôt une circonstance plus
favorable pour s’acquitter de ce pieux devoir !

Je finirai maintenant par où j’aurais dû commencer. Dans le
décousu de cette causerie, j’ai eu le tort, en effet, de passer jusqu’ici
sous silence Pexcellente biographie de Félix Trutat due à l’un des
lettrés dijonnais le mieux au fait de l’histoire artistique et monu-
mentale de Bourgogne A Dès 1887, M. Henri Chabeuf, je m’em-
presse de le reconnaître, a pris sur moi les devants et inauguré
l’œuvre de réparation que, de mon côté, je poursuis aujourd’hui
auprès d’un public moins restreint. 11 a eu soin de recueillir aux
meilleures sources tout ce qu’il importe de savoir de la trop courte
existence de l’artiste, il a dressé de son œuvre un catalogne judi-
cieusement commenté et aussi complet que possible : je ne vois de

1. Pour être strictement exact, il faut lire ici : quelques semaines après. Trutat
mourut en effet à Dijon, le 8 octobre 1848. On comprendra qu’à plus de cinquante
ans d’intervalle les souvenirs du maître ne soient pas sur ce point d’une absolue
précision.

1. Henri Chabeuf, Notice sur Félix Trutat, peintre, élève de l’École des Beaux-
Arts, de Dijon, 1824-1848. Dijon, 1887. Darantière, imprimeur, plaquette de biblio-
phile, ornée de deux eaux-fortes et tirée seulementà 125 exemplaires. M. Chabeuf
a tout récemment signalé de nouveau le nom de Trutat aux lecteurs du Journal
des Arts, sous son trop modeste pseudonyme habituel d'André Arnoult. Voir le
numéro de ce journal du 18 mars dernier.
 
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