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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
titions? Question complexe et qui ne sera probablement jamais
élucidée.
Tout inestimable qu’il soit, le musée de Saint-Quentin ne repré-
sente qu’une part, une faible part, de l’œuvre considérable de La
Tour, et il faut renoncer à l’espoir de remettre la main sur tous les
témoignages de cette production ininterrompue durant près d’un
demi-siècle; il ne faut, du moins, rien négliger pour préparer les
voies au curieux qui se livrerait à une recherche aussi captivante.
Je lui signale d’ores et déjà un élément d’enquête dont on n’a pas
encore tiré parti.
La réimpression littérale des livrets des Salons de 1673 à 1800,
établie par M. Jules GuitTrey avec un soin scrupuleux, est au pre-
mier rang des instruments indispensables à un travailleur et la
table des portraits, imprimée seulement en 1889 dans la Revue de
l’Art français, la rend plus précieuse encore. En vertu du plan qu’il
avait suivi pour cette réimpression, M. GuitTrey n’a pu et dû faire
figurer à cette table que les portraits énoncés aux livrets mêmes,
sans se préoccuper des révélations consignées soit dans quelques
journaux du temps, soit dans les annotations portées par certains
visiteurs de l’Académie Royale sur leurs propres exemplaires. D’ail-
leurs, à l’époque où M. GuitTrey rédigeait ses fiches, la collection
Deloynes, dont Mariette avait fourni l’idée et le noyau, n’était pas
encore entrée au Cabinet des estampes, et l’on ne s’était pas avisé
de demander aux croquetons semés par Gabriel de Saint-Aubin sur
les livrets des Salons de 1761, 1763 et 1769, appartenant au même
dépôt, l’identification d’un buste ou d’un pastel. Cependant, le docte
annotateur d’Orlandi et le fantaisiste incorrigible se sont, sans le
savoir, donné le mot pour nous révéler plus d’une particularité
dont le futur auteur du répertoire que je rêve aurait à tenir
compte.
Grâce à Mariette et à Gabriel de Saint-Aubin nous pouvons, en
effet, reconstituer la série presque complète des envois de La Tour
aux Salons et remplacer la trop discrète indication : « Plusieurs por-
traits au pastel sous le même numéro », par les noms de la plupart des
modèles. Ainsi, au Salon de 1740, le « portrait jusqu’aux genouils de
M. de ***, qui prend du tabac », était celui de M. Perrinet, fermier
général1. Au Salon de 1743, outre le portrait du duc de Villars,
gouverneur de Provence, La Tour avait exposé deux portraits
\. Ce portrait, jusqu’ici inconnu et de supérieure qualité, vient d’entrer dans
la galerie de M. Jacques Doucet.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
titions? Question complexe et qui ne sera probablement jamais
élucidée.
Tout inestimable qu’il soit, le musée de Saint-Quentin ne repré-
sente qu’une part, une faible part, de l’œuvre considérable de La
Tour, et il faut renoncer à l’espoir de remettre la main sur tous les
témoignages de cette production ininterrompue durant près d’un
demi-siècle; il ne faut, du moins, rien négliger pour préparer les
voies au curieux qui se livrerait à une recherche aussi captivante.
Je lui signale d’ores et déjà un élément d’enquête dont on n’a pas
encore tiré parti.
La réimpression littérale des livrets des Salons de 1673 à 1800,
établie par M. Jules GuitTrey avec un soin scrupuleux, est au pre-
mier rang des instruments indispensables à un travailleur et la
table des portraits, imprimée seulement en 1889 dans la Revue de
l’Art français, la rend plus précieuse encore. En vertu du plan qu’il
avait suivi pour cette réimpression, M. GuitTrey n’a pu et dû faire
figurer à cette table que les portraits énoncés aux livrets mêmes,
sans se préoccuper des révélations consignées soit dans quelques
journaux du temps, soit dans les annotations portées par certains
visiteurs de l’Académie Royale sur leurs propres exemplaires. D’ail-
leurs, à l’époque où M. GuitTrey rédigeait ses fiches, la collection
Deloynes, dont Mariette avait fourni l’idée et le noyau, n’était pas
encore entrée au Cabinet des estampes, et l’on ne s’était pas avisé
de demander aux croquetons semés par Gabriel de Saint-Aubin sur
les livrets des Salons de 1761, 1763 et 1769, appartenant au même
dépôt, l’identification d’un buste ou d’un pastel. Cependant, le docte
annotateur d’Orlandi et le fantaisiste incorrigible se sont, sans le
savoir, donné le mot pour nous révéler plus d’une particularité
dont le futur auteur du répertoire que je rêve aurait à tenir
compte.
Grâce à Mariette et à Gabriel de Saint-Aubin nous pouvons, en
effet, reconstituer la série presque complète des envois de La Tour
aux Salons et remplacer la trop discrète indication : « Plusieurs por-
traits au pastel sous le même numéro », par les noms de la plupart des
modèles. Ainsi, au Salon de 1740, le « portrait jusqu’aux genouils de
M. de ***, qui prend du tabac », était celui de M. Perrinet, fermier
général1. Au Salon de 1743, outre le portrait du duc de Villars,
gouverneur de Provence, La Tour avait exposé deux portraits
\. Ce portrait, jusqu’ici inconnu et de supérieure qualité, vient d’entrer dans
la galerie de M. Jacques Doucet.