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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 6
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Desjardins, Paul: Les salons de 1899, 2, Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0477

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LES SALONS DE 1899

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sont, pourtant, que de pauvres joujous d’enfants, qui rapetisseront
demain au jour, quand les marionnettes, à présent endormies, les
rempliront de leurs trémoussements. — Entre l’interprétation de
M. Hareux et celle de M. Enders, une nuance est perceptible ; la
première paraît plus robuste ; la seconde, plus musicale et subtile,
fait souvenir de Whistler.

Toujours en quête d’aspects fugaces, immédiatement, complè-
tement et tranquillement fixés, M. Thaulow peint un nocturne fort
particulier1 : Les Ombres portées (nuit en Normandie). Une chaumière
isolée, spectrale sous la lune, avec sa toiture de tuiles et ses colom-
bages noirs et blancs assoupis en la pénombre cendrée; au-devant,
des pommiers dont les rameaux entrecroisés et les brindilles pro-
jettent un réseau d’ombres ténues sur le sol et les murs. Une pré-
cision scripturaire, qui est justement ce qu’on n’attend pas dans un
paysage de ténèbres, voilà ce qui arrête ici. Et cette notation est
vraie. Au fond de ma mémoire, certaines impressions de nuit se
ravivent pour la confirmer. Que d’observations à recueillir encore
dans les choses coutumières ! Jetons-nous donc à corps perdu dans
l’ample sein de la nature toute proche ; veillons même à l’heure où
l’on dort, l’œil aux aguets, la main prête., le cœur en émoi...

Le souffle nocturne fraîchit, un frisson prélude au réveil, l’aube
hésite. M. Chudant est déjà levé, et voici ce qu’il a vu : L’Oignon à
Cirey-les-Bellevaux (crépuscule du malin). Des maisonnettes closes,
un petit pont de pierre, des écharpes de brume laiteuse qui s’étirent
sur la rivière, un ciel pâle, une nudité des choses qui paraissent
ne redevenir visibles que malgré elles... Encore une demi-heure, et
les premiers passants matineux troubleront le silence : le charme
sera rompu.

IV. LES SITES d’histoire ! d’aGRIGENTE A VERSAILLES.

Ici, non plus, l’homme ne se montre point ; mais il a passé.
Son empreinte demeure dans les pierres, qui semblent avoir vécu,
tandis que les arbres mêmes qui verdoient en ces lieux revêtent une
mélancolie de monuments. La beauté des ruines ne gît point en tel
détail remarquable. Elle est éparse dans l’ensemble, et souvent nous
sommes'émus par ]es vestiges d’un bâtiment dont les formes neuves
nous eussent répugné. Pourquoi? Peut-être parce que visiblement

1. M. Frilz Thaulow vient de donner, dans une exposition à la galerie
Georges Petit, où il était associé à MM. Besnard, Gazin, Monet et Sisley, une
occasion plus abondante d’apprécier son œuvre.
 
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