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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 32.1904

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Nr. 4
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Dorbec, Prosper: Le portraitiste Aved et Chardin portraitiste, 3
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LE PORTRAITISTE AYED ET CHARDIN PORTRAITISTE 351

main de son compagnon, et même Chardin n’aurail-pas tout sim-
plement habillé certains portraits d’Aved, qui seraient alors des
Chardin jusqu’au cou? Ainsi, sur la toile de Carnavalet, lequel des
deux a peint ces dentelles rendues avec ces beaux blancs crémeux,
fréquents dans l’œuvre de Chardin, et qui faisaient le désespoir de
Decamps, ici ramassés, tapotés, là traînés patiemment en minces blets
selon le dessin capricieux du point, réussissant à en traduire à la
fois îa profusion et la légèreté? De même, les dentelles dans le por-
trait de vieille femme que conservait la baronne de Conantre, sur
lesquelles Edmond de Goncourt s’extasiait, à qui les attribuer? Char-
din n’était certainement pas incapable de « cuisiner » de pareils mor-
ceaux ; mais notons aussi en faveur d’Aved que les observations les
moins louangeuses que cet artiste ait encourues de ses contemporains
n’ont pas une seule fois mis en doute l’entière paternité de ses
œuvres. Peut-être, après tout, y avait-il tout simplement pénétration
réciproque de leurs alents1.

Des renseignements plus détaillés sur Aved amèneraient sans
doute des révélations pleines d’intérêt sur l’œuvre et la vie de
Chardin. Tout ce qu’on sait de leurs rapports se réduit presque
à l’anecdote de Mariette et d’Haillet de Couronne, qui nous montre
Chardin plaisantant son camarade sur ses exigences touchant le prix
des commandes. Peut-être, dans cette figure d’Alchimiste ou Philo-
sophe lisant, dont le souvenir nous a été conservé par le burin de
Lépicié, faisait-il allusion aux manies de chercheur ou de collection-
neur de son collègue, manies qui auraient tenu celui-ci plongé au
milieu d’un pêle-mêle de bric à brac, dans le déchiffrage d’in-folio
redoutables. Une fois, il le convia à un événement important de sa
vie : sur l’acte de son second mariage, Aved est en effet inscrit au
nombre des témoins comme « amy de l’époux ». Les deux artistes
ne manquaient pas non plus d’échanger l’appui de leurs relations
mondaines. Le comte de Luc, le fils de ce personnage qui avait pro-
tégé les débuts d’Aved à Paris, possédait, en même temps qu’une
hère image de sa propre personne par le portraitiste, un Retour de
chasse par son compagnon; d’autre part, le banquier Crozat appré-
ciait hautement le talent de Chardin et conservait de lui plusieurs

1. Lui. et Aved avaient envoyé te même sujet à leur première exposition au
Louvre, en 1727. Rappelons, à ce propos, qu’Aved possédait dans sa collection
un Philosophe lisant, par Rembrandt. — Reste à savoir si cette première repré-
sentation de Philosophe n’offrait pas déjà un portrait d’Aved jeune, et si, d’autre
part, le Philosophe d’Aved n’était, pas un portrait de Chardin. Mais les deux ta-
bleaux sont égarés, et aucun n’a été gravé.
 
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