Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 35.1906)

LES RÉCENTES ACQUISITIONS

DU DÉPARTEMENT DE LA PEINTURE

AU MUSÉE DU LOUVRE
(1904-1905)

l semble que les années grasses soient
désormais l’ordinaire du Louvre et
qu’à vouloir instruire la Gazette de la
poussée de legs, de dons et d’achats
qui se pressent aux portes du Musée,
un chroniqueur, même mensuel, eu au-
rait sa pleine tâche d’écriture. L’abon-
dance vient surtout au département
des peintures, et c’est un beau désordre
d’œuvres de toutes les écoles qui s’em-
mêlent dans notre salle d’exposition
des nouveautés, avant de rejoindre leur place naturelle. Pour les
nombreux et bons esprits, partisans de la pensée des Goncourt
et qu’irritent « la froide tombe des musées et le regard bête du
passant indifférent » —- les deux mornes perspectives de tonte belle
œuvre soustraite aux libres mutations du monde des amateurs, —il ne
laisse pas d’être pénible de constater ces accroissements du Louvre.
Certes le mot de Théophile Gautier sera toujours la plus exacte des
vérités ironiques : « Il n’est pas de chose au monde qui entende
plus de bêtises qu’un tableau de musée. » Mais, en retour, ne peul-
on prétendre que la sottise humaine ne fasse quelquefois trêve et
que des admirations, les unes d’exquise finesse, les autres de pro-
fondeur, viennent consoler les chefs-d’œuvre ?

Pour dénombrer avec quelque analyse le groupe de peintures
entrées au Louvre ces deux années 1904 et 1905, il faudrait un long