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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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Nr. 5
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Laloy, Louis: L' art et l'archéologie au théatre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0467

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L’ART ET L’ARCHÉOLOGIE AU

THEATRE

Théâtre national de l’Opéra-Comique : APHRODITE, pièce musicale en 7 tableaux
(d’après le roman de M. Pierre Louÿs), paroles de Louis de Gramoxt,
musique de M. Camille Erlanger.

a nouvelle « pièce musicale » montée, à grands frais, par l’Opéra-
Comique est tirée d’un roman de M. Pierre Louÿs qu’il 11e fau-
drait pas prendre pour une peinture fidèle de la vie d’une cité
grecque, même à l’époque alexandrine. Non que l'érudition de
l’auteur no soit réelle; mais elle est spéciale. Très familier avec
les auteurs de l’extrême décadence, ceux en particulier qui ont écrit les
épigrammes pseudo-anacréonliques, il semble croire que leur oeuvre résume
toute la civilisation d’Alexandrie sous le règne de Ptolémée Aulète ou de
Bérénice IV. Il y a là une erreur de chronologie d’abord, et aussi de psychologie :
les poètes érotiques sont, à leur manière, des idéalistes, et, le plus souvent, les
mœurs dont ils témoignent sont des mœurs de fantaisie. En les prenant pour
guides uniques, on devait arriver fatalement à créer une œuvre séduisante en
ses détails, mais lourde, monotone et invraisemblable en son ensemble. Telle est
l’impression qne m’a toujours donnée le roman de M. Pierre T.ouÿs. Le livret en
vers blancs de M. de Gramont ne l’a pas détruite; bien au contraire: car il a
fallu faire passer au premier plan l’intrigue amoureuse du sculpteur Démétrios
et de la courtisane Chrysis, tout en la privant du seul trait qui en relève l’in-
térêt : le rêve de l'artiste, qui le fatigue par avance de la réalité et lui fait ren-
voyer Chrysis avec dédain au moment même où elle vient tenir sa promesse. On
a jugé qu’un rêve ne pouvait se traduire à la scène, et c’est un sentiment
beaucoup moins raffiné qui provoque le revirement de Démétrios : des clameurs
dans la rue lui rappellent ses crimes (vol du miroir, du peigne et du collier) et
lui font maudire celle pour qui ils furent commis. Ainsi ces tableaux de mœurs
frivoles se trouvent traversés et supportés par une action de mélodrame. Complice
du poète, le musicien a traduit le tout en une volumineuse partition où l’on sent
beaucoup de travail, d’effort et de conscience, mais d’où la grâce est presque
constamment absente, ainsi que la couleur: ce ne sont que grands mouvements
d’orchestre, qui veulent être tragiques et y arrivent parfois. Mais qu’est devenue
cette langueur voluptueuse qui, dans le livre, enveloppe et baigne tout, et fait
passer sur l’étrangeté du récit? Qu’est devenue cette atmosphère lumineuse et
parfumée où se meuvent, et souvent se noient, les personnages? Ni le poème, ni
 
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