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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 2.1909

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https://doi.org/10.11588/diglit.24872#0291

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264

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

figures de saint Abdon et de saint Sévère, des scènes de martyre d’un réalisme
dépourvu de passion est, avec le « retable du connétable » au musée de Barce-
lone, une des œuvres les plus marquantes de l’époque.

C’est à Alfonso, dont le nom n’est point catalan, que M. Sanpere attribue
l’œuvre capitale de cette école, le Martyre de saint Médin, qui, tout récemment, a
passé de San Cujat del Vallès au musée de Barcelone. Ici le réalisme n’est plus
passif, comme dans le retable de Terrassa. On sent un esprit supérieur qui se
sert de la réalité pour exprimer une pensée dramatique. Le modelé est plein de
force. Les caractères s’accentuent sur des visages pris sur le vif. A mon avis, il
faut rapprocher cette œuvre de l'école de Bruges, notamment de Gérard David,
auquel le type et le geste du bourreau tranchant la tète de sa victime semblent
avoir été empruntés. La technique du tableau, peint a tempera, n’est toutefois
point flamande.

Plus près des Flandres sont les procédés de Bartholomé Bermejo, dont le
Saint Michel de la collection Wernher, à Londres, est connu de nos lecteurs1. Ici,
le peintre s’est entièrement assimilé la peinture à l'huile, qu’il emploie, d’ailleurs,
dans sa Pietà de la cathédrale de Barcelone. M. Sanpere fait honneur à ce même
peintre de la Sainte_ Face du musée de Vicb. Cette œuvre, qu’avait déjà remar-
quée M. Justi dans ses études sur l’art espagnol, est impressionnante par le
mélange de mâle vigueur et d’implacable réalisme. Sous les blessures sanglantes
causées par la couronne d’épines, sous les larmes de souffrance, le visage émacié
du Fils de Dieu, encadré de longs cheveux el d’une barbe touffue, se fige dans
l’immobilité d’une icône. L’attribution de cette œuvre à ce maître est plus qu’in-
certaine. Mais là où M. Sanpere dépasse la mesure, c’est lorsqu’il réclame pour la
Catalogne la Pietà de Villeneuve-lès-Avignon, aujourd’hui au musée du Louvre,
et le Saint Michel du Musée Calvet, à Avignon. Qu’il y ait entre les écoles pro-
vençales et catalanes d’incontestables liens de parenté, c’est ce qu’atteste à lui seul
le retable de Saint Mitre à la cathédrale d’Aix-en-Provence, où le réalisme placide
correspond à l’esprit de nombreux ouvrages reproduits par M. Sanpere. Ce
serait, toutefois, se mettre en contradiction avec la vérité, si l’on voulait se fon-
der sur ces analogies très vagues pour confondre en une même école des produc-
tions de caractère absolument différent.

N’en voulons, toutefois, pas à M. Sanpere de ses tendances annexionnistes.
Pour entreprendre le grand ouvrage auquel il a consacré ses forces, il fallait une
grande foi dans le passé artistique de son pays. Or cette foi, si elle s’est laissée
égarer sur certains points particuliers, n’en a pas moins produit une œuvre
durable et utile. L’esprit scientifique dont sont animés les travaux de notre auteur
ne nous laisse aucun doute sur l’accueil qu'il fera aux réserves et aux modifica-
tions amenées par le cours même des études auxquelles son ouvrage a ouvert la
voie.

C. DE 31ANDACH

1. Y. Gazelle des Beaux-Arts, 1905, t. I, p. 301, et Chronique des Arts, 1905, p. 269.

Le Gérant : P. Girardot.

PA R I S.

IMPRIMERIE PHILIPPE RENOÜARD.
 
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