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31 Octobre 1877.

N° 20.

Dix-neüvième Année.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE EA LITTERATURE

paraissant deux fois par mois, sous la direction de M. Ad. SIRET, membre de l’Académie royale de Belgique, membre correspondant
de la Commission royale des monuments, membre de l’Institut des provinces de France, de la Société française d’Archéologie, etc.

OINT S’ABONNIT: : à Anvers, chez TESSARO, éditeur; à Bruxelles, chez DECQ et
DUHENT et chez MUQUARDT; à Gand, chez HOSTEet chez ROGGHÉ ; à Liège, chez DE SOER
et chez DECQ ; à Louvain, chez Ch. PEETERS ; dans les autres villes, chez tous les libraires. Pour
l’Allemagne, la Russie et l’Amérique : C. MUQUARDT. La France : DUSACQ et Cie, Paris. Pour
la Hollande : MARTINUS NYHOFF, à la Haye. — PRIX D’ABONNEMENT :
pour toute la Belgique (port compris). Par an, 9 fr. — Etranger (port compris) : Allemagne, Angle-

terre, France, Hollande, Italie et Suisse, 12 fr. Pour les autres pays, même prix, le port en sus. —
PRIX PAR NUMERO :50 c. — RECLAMES et Insertions extraordi-
naires : 2 fr. la ligne — Pour les grandes annonces on traite à forfait. — -AJNTIN'OjSTCIES :
40 c. la ligne. — Peur tout ce qui regarde l’Administration ou les annonces s’adresser à l’Admi-
nistration, rued Progrès, 28, à St-Nicolas (Flandre orientale) ou a Louvain, rue Marie-Thérèse,22.
— Il pourra être rendu compte des ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.

SOMMAIRE : Belgique : Souvenir de Rubens. —
Salon de Gand. — Le théâtre national. ■— Ru-
bens. — Les tableaux de M. Ch. Verlat. — Le
discours de M. Henne. — France : Le musée
des arts décoratifs. — Chronique générale. —
Annonces.

Belgique.

PIERRE-PAUL RUBENS

SOUVENIR DES FÊTES ANVERSOISES
DU TROISIÈME CENTENAIRE.

(Suite).

X.

Le banquet de la Bourse était fixé à cinq
heures précises.

Quand il faut ici organiser une fête pu-
blique, l’on peut compter à l’avance sur le
concours des grandes Sociétés privées. Mais,
s’il s’agit d’une solennité relative aux beaux-
arts, les partis politiques de la Métropole
commerciale improvisent, haut la main, une
trêve tacite, marchent de concert, et riva-
lisent de zèle pour rehausser l’éclat de la fête
artistique et lui assurer cette réussite finale
qui affirme, une fois de plus, la puissante
vitalité du culte des arts, sentiment séculaire,
fleuron le plus précieux du diadème civique
d’Anvers.

L'élite de la population toute entière avait
organisé à la Bourse cette manifestation cor-
diale à l’égard des hôtes illustres réunis pour
acclamer Rubens et prendre part au Congrès
artistique.

Dès quatre heures et demie, les convives
anversois sont à leur poste et accueillent avec
empressement les invités étrangers à mesure
qu’ils se présentent. Ce sont d’abord ,
MM. Kaulbach, membre de l’Académie de
Munich ; John Lessels, architecte de la ville
^Edimbourg auquel la capitale de l’Ecosse
doit sa magnifique transformation ; Garnier,
Labanel, Meissonnier, Guillaume, le vicomte
de la Borde et les autres membres de l’Insti
Ut de France; Wolf, notre collègue à la Sec-
bon d’architecture, arrivé de Prague avec
Un Swerts ; le chevalier de Jonghe van
Lllemeht, Grathan le consul et Armitage,
•Membre et Eaton, secrétaire du Royal
Mcademy de Londres. Puis arrivent les
regnicoles. MM. Barthélemi Du Mortier,
Ministre d’Etat, Alvin, président de l’Acadé-
jNe de Belgique, Slingeneyer, Guillaume
Deefs, Wauters, membres de l’Académie et
M-Jean Rousseau, directeur des beaux-arts,
uélégué du Gouvernement belge. La presse
Nationale et étrangère est largement repré-
Untée. MM. le bourgmestre de Wael, De
geyser, directeur de l’Académie des Beaux-
David, colonel de la Garde civique

d’Anvers, Edouard Pécher, président du
Cercle Artistique et du Congrès se multi-
plient auprès des sommités européennes con-
viées au banquet. A l’heure dite conduits par
M. de Waël ces personnages prennent place
à la grande table d’honneur derrière laquelle
sur une draperie écarlate brille en lettres d’or :
HOMMAGE A RUBENS.

Toutes les tables rayonnent vers la longue
table d’honneur ; celles qui y touchent dè
plus près sont réservées aux étrangers ; les
souscripteurs occupent les autres.

La musique du 8me régiment de ligne lait
entendre les meilleurs morceaux de son ré-
pertoire ; les galeries supérieures sont bordées
de dames en grande toilette.

Au dessert le toast au roi de M. le bourg-
mestre, son discours de bienvenue aux ar-
tistes étrangers, furent vivement applaudis.

M. le vicomte de la Borde eût un mot
heureux : « Demain, dit-il, nous honore-
» rons Rubens ; aujourd’hui, buvons à la
» ville d’Anvers et à la longévité de la glo-
» rieuse école flamande. » MM. Steffert,
de Berlin et de Jonghe van Ellemeht se
firent successivement écouter et applaudir,
mais les honneurs de la soirée furent pour
M. Du Mortier.

Quand ce vénérable vétéran parlementaire,
cet admirateur convaincu des beaux-arts, pa-
triote éprouvé, prit la parole, il y eut une com-
motion électrique et le silence s’établit spon-
tané, religieux, imposant, à l’instant psyco-
logique même de la Fête où certes nous
étions intimement persuadés que ceux qui
voudraient encore parler ne parviendraient
plus à se faire entendre.

C’est que la plupart se rappelaient qu’il
avait livré le premier combat pour rendre à
la ville d’Anvers la gloire d’avoir donné le
jour à son plus illustre enfant et que les
récentes découvertes de M. Genard, l’archi-
viste anversois, avaient donné finalement rai-
son aux arguments du vieux lutteur.

L’improvisation de M. Du Mortier fut
éloquentechaleureuse. Au diapason où
étaient montés les cerveaux on avait beau jeu
de faire vibrer les cordes patriotiques. Il but
à Rubens « enfant d’Anvers, natif d’Anvers »
puis, « à la Belgique favorisant les arts à
» l’ombre de l’arbre de la liberté planté en
» i83o. » En prononçant ces dernières pa-
roles, le noble vieillard avait les yeux pleins
de larmes et serrait avec une indicible émo-
tion les mains du bourgmestre d’Anvers.

C’en était trop pour un tel auditoire : une
acclamation universelle, immense, rompit
avec l’éclat du tonnere cet étonnant et res-
pectueux silence de trois longues minutes.
D’une impulsion unanime l’assemblée en-
tière surgit et tous les assistants quittèrent
leurs sièges pour aller à la table d’honneur
toaster avec Du Mortier, tandis que l’orches-

tre militaire exécutait la Brabançonne accom-
pagnée à l’unisson par tous les convives.

Nous nous souviendrons toujours avec
bonheur de cet accès contagieux de délire
artistique et de cet instant de patriotique
ivresse. M. Guillaume Geefs l’éminent scul-
pteur, contemporain de M. Du Mortier
s’était levé des premiers ; l’exemple de notre
voisin de table entraîna au même instant un
groupe compacte d’artistes. Ce fut comme
une traînée de poudre. A l’extrémite opposée,
M. Meissonnier, âme ardente, primesau-
tière, quittait son siège suivi de MM. Vieux-
temps, Garnier, Charles Blanc, Alfred Ste-
vens. Le table d'honneur est littéralement
prise d’assaut. On eût souhaité encore en-
tendre l’orateur, mais les acclamations, les
cris, les trépignements, le cliquetis cristallin
des verres à champagne rendaient ce vœu
matériellement irréalisable.

En ce moment le superbe vaisseau ogival
de la Bourse d’Anvers devait présenter un
inénarrable aspect pour les dames placées
aux galeries lesquelles contemplaient, platoni-
quement, ces agapes solennelles du troisième
centenaire de Rubens. Ce coup-d’œil mou-
vementé , débordant d’une vie exubérante,
devait sembler bien en rapport avec la
plantureuse vitalité des compositions hé-
roïques du prince des coloristes, du plus
grand peintre de la nature en action.

Alors il y eut détente : grâce à ces instants
de répit, de réaction, des groupes se for-
mèrent ; on parla de la soirée prochaine
offerte par la Société royale d’Harmonie,
tous les regards se dirigeaient d’instinct, vers
la table d’honneur on se trouvait M. Camille
Saint Saëns, l’auteur acclamé du Déluge et
de la Danse Macabre, dont on allait, dans
quelques heures, exécuter la fameuse Marche
héroïque en l’honneur de Rubens,

Un orateur allemand M. Hiller, maître de
chapelle à Cologne, profita de cette accalmie
pour insinuer une suprême harangue,distrai-
tement écoutée, dont le principal tort fut de
prêcher des convaincus et d’arracher à leur
auditoire de hasard les futurs orateurs du
Congrès du lendemain essayant, in anima
vili, les doctrines esthétiques les plus trans-
cendantes.

Ce discours est le dernier : les convives se
lèvent en masse, tout le monde a soif
d’air, de fraîcheur, de mouvement. On em-
porte religieusement la carte du menu œuvre
réussie de M. Meyer formant avec le Pro-
gramme delà Soirée de l’Harmonie du même
artiste, un charmant Ricordo des fêtes du
troisième centenaire.

Au moment où nous franchissions la porte
vers la Place de Meir nous nous attardions
un peu à causer avec M. Jules Pecher, du
superbe buste de Rubens, entrevu le matin
même, quelqu’un nous mit « militairement »
 
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