N° 16.
31 Août 1877.
Dix-neuvième Année.
JOURNAL DES BEAUX-ARTS
ET DE LA LITTERATURE
paraissant deux fois par mois, sous la direction de M. Ad. S1RET, membre de l’Académie royale de Belgique, membre correspondant
de la Commission royale des monuments, membre de l’Institut des provinces de France, de la Société française d’Archéologie, etc.
OiN" : à Anvers, chez TESSARO, éditeur; à Bruxelles, chez DECQ et
DURENT et chez MUQUARDT; à Gand, chez IIOSTEet chez ROGGHÉ ; à Liège, chez DE SOER
et chez DECQ ; à Louvain, chez Ch. PEETERS ; dans les autres villes, chez tous les libraires. Pour
l’Allemagne, la Russie et l’Amérique : C. MUQUARDT. La France : DUSACQ et Cie, 1 aris. Pour
la Hollande : MARTINUS NTHOFF, à la Haye. - PRIX D’ABONTNKMENT :
pour toute la Belgique (port compris). Par an, 9 fr. — Etranger (port compris) : Allemagne, Angle-
terre, France, Hollande, Italie et Suisse, 12 fr. Pour les autres pays, même prix, le port en sus. —
PRIX PAR IN~UI\IÉR0 :60 e. — RICCR^AIMIUS et Insertions extraordi-
naires : 2 fr. la ligne — Pour les grandes annonces on traite à forfait. — .AJISTIN"0!N"OXCS :
40 c. la ligne. — Pçur tout ce qui regarde l’Administration ou les annonces s’adresser à l’Admi-
nistration, rued Progrès, 28, à St-Nicolas (Flandre orientale) ou a Louvain, rue Marie-Thérèse,22.
— Il pourra être rendu compte des ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.
SOMMAIRE : Belgique : Congrès artistique d’An-
vers. — Exposition do la Chambre syndicale pro-
vinciale de Gand. — Ecole professionnelle des
filles à Bruxelles. — A propos de tapisseries. —
Entrefilet. — Hollande : Exposition d’Amster-
dam. — France : Correspondance particulière :
Les maisons d’artiste. — Chronique générale. —
Annonces.
Belgique.
CONGRÈS ARTISTIQUE D’ANVERS.
19-22 Août 1877.
SECTION D’ARCHITECTURE.
Au sortir de l’Assemblée générale tenue le
dimanche 19 août, à deux heures, sous la
présidence de M. E. Pécher et où furent
formés les bureaux des cinq Sections du
Congrès artistique ; la Section d’architecture
s’est constituée dans son local désigné et la
discussion a été immédiatement ouverte sur
la première question inscrite au programme.
Le bureau se composait de : MM.Garnier,
Wolff et Balat architectes, présidents d’hon-
neur! M. Wellens, ingénieur en chef, prési-
dent; MM. Schadde et Beyaert, architectes,
vice-présidents; M. Schoy,architecte, profes-
seur à l’Académie d’Anvers, rapporteur et
M. l’avocat Moïana, secrétaire.
M. Pequignot, sténographe de la Chambre
des Représentants, avait été spécialement at-
taché à la Section d’architecture.
Les deux questions inscrites au programme
ont été discutées dans les séances du 19 et
du 20 août. MM. Garnier, Beyaert, Alber-
ding-Thijm, Trappeniers, Guypers, Schoy,
lieutenant-colonel du génie Wauwermans,
Mignot-Delstanche, Colinet, de Taye, Lucas,
Godebski, etc. prirent une part active à la
discussion qui figurera in-extenso au compte-
rendu officiel du Congrès. La question de
nationalité dans l’art y a été revendiquée et
combattue par des esprits sincères et con-
sciencieux. Les partisans de l’art national ont
finalement obtenu des conclusions conformes
à leurs patriotiques convictions.
Dans la séance du 21 août la Section en-
tendit le rapport de M. Schoy, ce travail re-
marquable, après un court échange d’observa-
tions entre les membres présents,fut adopté à
l’unanimité.
La lecture en fut faite en Assemblée
générale tenue le 22 et les conclusions main-
tenues par acclamation. Sur la proposition
de M. Pécher, président du Congrès, des
remerciements furent votés au rapporteur.
Nous insérons ce document dont l’argu-
mentation serrée, impartiale, nous paraît,
d’après les conclusions de ses considérants,
nous annoncer que vraiment, « nous sommes
» en présence d’un mouvement très-accentué
» vers les traditions de notre architecture
» nationale du XIIIe au XVIIe siècle, mouve-
» ment qui a déjà produit des édifices recom-
» mandables et doit être encouragé, soutenu
» et dirigé.»
SECTION D’ARCHITECTURE.
Rapport à l’Assemblée générale.
La Section d’architecture du Congrès a
tenu trois séances ; elle avait à s’occuper des
questions suivantes :
« i° Chaque pays doit-il respecter, dans
» ses constructions, les traditions de l’archi-
» tecture nationale? Dans nos contrées ne
» convient-il pas de revenir aux types du XIIIe
» au XVIIe siècle dans la construction des
» monuments et édifices publics, en les ap-
» propriant aux exigences modernes. »
« 2° Ne serait-il pas désirable que les pou-
» voirs publics eussent un droit de contrôle
» sur le style architectural à donner aux con-
» structions et spécialement à celles qui avoi-
» sinent les monuments, afin qu’elles soient
» en harmonie avec le style de ceux-ci? »
Ces questions ont donné lieu à des discus-
sions dont j’ai l’honneur de vous présenter la
synthèse avant d’en soumettre les solutions à
vos suffrages.
D’après l’énoncé qui précède, la Section
d’architecture du Congrès avait à se pronon-
cer sur deux propositions qui mettaient en
présence les partisans de l’art indigène, na-
tional, localisé et ceux de l’art cosmopolite ;
ceux qui croient que l’art architectural doit
s’exercer et s’épanouir dans une liberté abso-
lue et ceux qui — tout en provoquant l’ori-
ginalité individuelle chez l’artiste — désirent
voir poursuivre et développer l’école dans le
chemin frayé par les ressources matérielles,
les traditions, le climat, et les mœurs; d’ac-
corder par conséquent d’une façon intime
l’architecture d’un pays avec sa physionomie
générale.
La question du cosmopolitisme dans l’ar-
chitecture amenait naturellement celle de
l’emploi des matériaux qui la traduisent.
Ici les opinions des divers orateurs ne se
sont plus offertes aussi nettement tranchées.
Les partisans de l’art cosmopolite admet-
taient tout logiquement l’emploi, sous n’im-
porte quelle latitude, de toute espèce de ma-
tériaux sans distinction de provenance.
Ceux de l’art indigène ou national se sont
rangés en deux camps ; les « intransigeants »
qui soutiennent que l’emploi exclusif des ma-
tériaux locaux est essentiel, indispensable,
autant pour la solidité et la conservation d’un
édifice que pour l’expression de sa valeur ty-
pique comme style et ceux qui — tout en
maintenant les traditions de l’art national et
en continuant l’école — admettent que l’ar-
chitecte moderne se serve sans inconvénient
de tous matériaux d’une durabilité incontes-
table que les faciles transits internationaux
mettent actuellement à sa portée.
Le théorème posé de la préférence à don-
ner à l’architecture cosmospolite ou indi-
gène , amenait comme corollaire la base
même de l’art architectural l’enseignement
académique.
Envisageant l’état actuel de l’enseignement
en Europe, les divers orateurs ont démontré
qu’il reposait exclusivement sur l’étude de
l’architecture gréco-romaine et que le pro-
gramme des Académies était à cet égard en
complète concordance avec l’enseignement
des Athenées, oùl’étude du latin et du grec,
langues mortes, a le pas sur l’étude des lan-
gues vivantes d’Europe dont le rôle est trop
effacé.
La pensée dominante de la Section — qui
n’entend nullement condamner l’étude des
incomparables modèles de l’art gréco-romain
comme base esthétique de l’éducation —
trouve cet enseignement trop exclusif.
De même que dans les Athénées, les cours
de langues modernes cesseraient d’être con-
sidérés comme facultatifs, une place serait
acquise désormais dans chaque Académie à
renseignement de l'architecture nationale ou
indigène, toujours convenablement adaptée
aux contrées qui l’ont vue naître et essentiel-
lement pratique au point de vue des res-
sources matérielles qu elles présentent.
Cette extension du programme de l’ensei-
gnement académique dans notre pays semble
d’ailleurs ne pas être intempestivement ré-
clamée.
Nous sommes en présence d’un mouve
31 Août 1877.
Dix-neuvième Année.
JOURNAL DES BEAUX-ARTS
ET DE LA LITTERATURE
paraissant deux fois par mois, sous la direction de M. Ad. S1RET, membre de l’Académie royale de Belgique, membre correspondant
de la Commission royale des monuments, membre de l’Institut des provinces de France, de la Société française d’Archéologie, etc.
OiN" : à Anvers, chez TESSARO, éditeur; à Bruxelles, chez DECQ et
DURENT et chez MUQUARDT; à Gand, chez IIOSTEet chez ROGGHÉ ; à Liège, chez DE SOER
et chez DECQ ; à Louvain, chez Ch. PEETERS ; dans les autres villes, chez tous les libraires. Pour
l’Allemagne, la Russie et l’Amérique : C. MUQUARDT. La France : DUSACQ et Cie, 1 aris. Pour
la Hollande : MARTINUS NTHOFF, à la Haye. - PRIX D’ABONTNKMENT :
pour toute la Belgique (port compris). Par an, 9 fr. — Etranger (port compris) : Allemagne, Angle-
terre, France, Hollande, Italie et Suisse, 12 fr. Pour les autres pays, même prix, le port en sus. —
PRIX PAR IN~UI\IÉR0 :60 e. — RICCR^AIMIUS et Insertions extraordi-
naires : 2 fr. la ligne — Pour les grandes annonces on traite à forfait. — .AJISTIN"0!N"OXCS :
40 c. la ligne. — Pçur tout ce qui regarde l’Administration ou les annonces s’adresser à l’Admi-
nistration, rued Progrès, 28, à St-Nicolas (Flandre orientale) ou a Louvain, rue Marie-Thérèse,22.
— Il pourra être rendu compte des ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.
SOMMAIRE : Belgique : Congrès artistique d’An-
vers. — Exposition do la Chambre syndicale pro-
vinciale de Gand. — Ecole professionnelle des
filles à Bruxelles. — A propos de tapisseries. —
Entrefilet. — Hollande : Exposition d’Amster-
dam. — France : Correspondance particulière :
Les maisons d’artiste. — Chronique générale. —
Annonces.
Belgique.
CONGRÈS ARTISTIQUE D’ANVERS.
19-22 Août 1877.
SECTION D’ARCHITECTURE.
Au sortir de l’Assemblée générale tenue le
dimanche 19 août, à deux heures, sous la
présidence de M. E. Pécher et où furent
formés les bureaux des cinq Sections du
Congrès artistique ; la Section d’architecture
s’est constituée dans son local désigné et la
discussion a été immédiatement ouverte sur
la première question inscrite au programme.
Le bureau se composait de : MM.Garnier,
Wolff et Balat architectes, présidents d’hon-
neur! M. Wellens, ingénieur en chef, prési-
dent; MM. Schadde et Beyaert, architectes,
vice-présidents; M. Schoy,architecte, profes-
seur à l’Académie d’Anvers, rapporteur et
M. l’avocat Moïana, secrétaire.
M. Pequignot, sténographe de la Chambre
des Représentants, avait été spécialement at-
taché à la Section d’architecture.
Les deux questions inscrites au programme
ont été discutées dans les séances du 19 et
du 20 août. MM. Garnier, Beyaert, Alber-
ding-Thijm, Trappeniers, Guypers, Schoy,
lieutenant-colonel du génie Wauwermans,
Mignot-Delstanche, Colinet, de Taye, Lucas,
Godebski, etc. prirent une part active à la
discussion qui figurera in-extenso au compte-
rendu officiel du Congrès. La question de
nationalité dans l’art y a été revendiquée et
combattue par des esprits sincères et con-
sciencieux. Les partisans de l’art national ont
finalement obtenu des conclusions conformes
à leurs patriotiques convictions.
Dans la séance du 21 août la Section en-
tendit le rapport de M. Schoy, ce travail re-
marquable, après un court échange d’observa-
tions entre les membres présents,fut adopté à
l’unanimité.
La lecture en fut faite en Assemblée
générale tenue le 22 et les conclusions main-
tenues par acclamation. Sur la proposition
de M. Pécher, président du Congrès, des
remerciements furent votés au rapporteur.
Nous insérons ce document dont l’argu-
mentation serrée, impartiale, nous paraît,
d’après les conclusions de ses considérants,
nous annoncer que vraiment, « nous sommes
» en présence d’un mouvement très-accentué
» vers les traditions de notre architecture
» nationale du XIIIe au XVIIe siècle, mouve-
» ment qui a déjà produit des édifices recom-
» mandables et doit être encouragé, soutenu
» et dirigé.»
SECTION D’ARCHITECTURE.
Rapport à l’Assemblée générale.
La Section d’architecture du Congrès a
tenu trois séances ; elle avait à s’occuper des
questions suivantes :
« i° Chaque pays doit-il respecter, dans
» ses constructions, les traditions de l’archi-
» tecture nationale? Dans nos contrées ne
» convient-il pas de revenir aux types du XIIIe
» au XVIIe siècle dans la construction des
» monuments et édifices publics, en les ap-
» propriant aux exigences modernes. »
« 2° Ne serait-il pas désirable que les pou-
» voirs publics eussent un droit de contrôle
» sur le style architectural à donner aux con-
» structions et spécialement à celles qui avoi-
» sinent les monuments, afin qu’elles soient
» en harmonie avec le style de ceux-ci? »
Ces questions ont donné lieu à des discus-
sions dont j’ai l’honneur de vous présenter la
synthèse avant d’en soumettre les solutions à
vos suffrages.
D’après l’énoncé qui précède, la Section
d’architecture du Congrès avait à se pronon-
cer sur deux propositions qui mettaient en
présence les partisans de l’art indigène, na-
tional, localisé et ceux de l’art cosmopolite ;
ceux qui croient que l’art architectural doit
s’exercer et s’épanouir dans une liberté abso-
lue et ceux qui — tout en provoquant l’ori-
ginalité individuelle chez l’artiste — désirent
voir poursuivre et développer l’école dans le
chemin frayé par les ressources matérielles,
les traditions, le climat, et les mœurs; d’ac-
corder par conséquent d’une façon intime
l’architecture d’un pays avec sa physionomie
générale.
La question du cosmopolitisme dans l’ar-
chitecture amenait naturellement celle de
l’emploi des matériaux qui la traduisent.
Ici les opinions des divers orateurs ne se
sont plus offertes aussi nettement tranchées.
Les partisans de l’art cosmopolite admet-
taient tout logiquement l’emploi, sous n’im-
porte quelle latitude, de toute espèce de ma-
tériaux sans distinction de provenance.
Ceux de l’art indigène ou national se sont
rangés en deux camps ; les « intransigeants »
qui soutiennent que l’emploi exclusif des ma-
tériaux locaux est essentiel, indispensable,
autant pour la solidité et la conservation d’un
édifice que pour l’expression de sa valeur ty-
pique comme style et ceux qui — tout en
maintenant les traditions de l’art national et
en continuant l’école — admettent que l’ar-
chitecte moderne se serve sans inconvénient
de tous matériaux d’une durabilité incontes-
table que les faciles transits internationaux
mettent actuellement à sa portée.
Le théorème posé de la préférence à don-
ner à l’architecture cosmospolite ou indi-
gène , amenait comme corollaire la base
même de l’art architectural l’enseignement
académique.
Envisageant l’état actuel de l’enseignement
en Europe, les divers orateurs ont démontré
qu’il reposait exclusivement sur l’étude de
l’architecture gréco-romaine et que le pro-
gramme des Académies était à cet égard en
complète concordance avec l’enseignement
des Athenées, oùl’étude du latin et du grec,
langues mortes, a le pas sur l’étude des lan-
gues vivantes d’Europe dont le rôle est trop
effacé.
La pensée dominante de la Section — qui
n’entend nullement condamner l’étude des
incomparables modèles de l’art gréco-romain
comme base esthétique de l’éducation —
trouve cet enseignement trop exclusif.
De même que dans les Athénées, les cours
de langues modernes cesseraient d’être con-
sidérés comme facultatifs, une place serait
acquise désormais dans chaque Académie à
renseignement de l'architecture nationale ou
indigène, toujours convenablement adaptée
aux contrées qui l’ont vue naître et essentiel-
lement pratique au point de vue des res-
sources matérielles qu elles présentent.
Cette extension du programme de l’ensei-
gnement académique dans notre pays semble
d’ailleurs ne pas être intempestivement ré-
clamée.
Nous sommes en présence d’un mouve