Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
SUR LA MOSAÏQUE. 89

On ne saurait donc se permettre de croire que la mosaïque de Pompéi, qui est le sujet de
notre dissertation, ait été exécutée immédiatement et rigoureusement d'après l'original identique
d'un peintre célèbre de la Grèce. Il serait en effet difficile d'admettre qu'en un sujet d'une telle
importance, l'artiste original n'aurait donné à ses personnages que les deux tiers (i) ou un peu
plus de la grandeur naturelle. Rien au contraire de plus admissible à l'égard du mosaïquiste
soumis à une dimension forcée. La copie d'après laquelle il eut à travailler, aura dû se con-
former à l'étendue de la salle. Qui sait même si d'autres réductions ou modifications n'au-
ront pas eu lieu en d'autres genres? Ainsi, Ton a vu que les mosaïquistes modernes, qui ont
orné les grands maîtres-autels de Saint-Pierre, se sont trouvés dans un cas tout contraire,
obligés, vu la hauteur de leurs retables, d'opérer sur des copies augmentées en dimension,
d'après leurs originaux. Qui sait encore, en supposant que la mosaïque de Pompéi ait été co-
piée d'après un ancien tableau, quelles autres réductions ou modifications son exécution aurait
pu commander?

Quoi qu'il en ait pu être, il faut dire que, dans la composition, telle que la mosaïque
actuelle nous la présente, l'idée essentielle du sujet est rendue avec autant de clarté et de jus-
tesse que l'art pouvait le faire, resserré qu'il était dans un espace aussi étroit. Difficilement on
imaginerait une meilleure manière de rendre sensibles, et de mettre sous les yeux du specta-
teurs, les points essentiels et principaux d'une action aussi étendue, aussi multiple que l'est celle
d'une bataille.

On ne pouvait donc pas faire voir avec une plus grande clarté, ni resserrer dans un moindre
espace, les résultats opposés de chacune des deux armées. Généralement on doit dire de cette
composition, que ses masses et ses détails s'enchaînent et se développent avec beaucoup d'art,
dans un espace qui, bien que grand, doit toujours être fort resserré, si on le mesure par
l'étendue naturelle du sujet. On peut dire encore que, d'une part, il n'y a rien de redondant, et
que, de l'autre, rien de nécessaire n'y manque.

Ce grand ouvrage antique, et unique jusqu'à présent dans son genre, nous offre donc une de
ces compositions qui manquaient à nos connaissances de l'art antique, et ce sujet abonderait en
considérations de tous genres, tant sur la nature de son sujet historiquement considéré, que sur
les variétés de détail dont l'art et la critique de l'art pourraient faire leur profit.

Il faut présumer que ce tableau en mosaïque, d'une composition si remarquable, d'un
artifice si soigné et d'une dimension si considérable, a dû dériver de quelque peinture beau-
coup plus antique, et dont il faut faire remonter la date à une époque de l'art de peindre où
la décadence du talent et du goût n'avait pas encore fait les progrès que la critique est forcée
de reconnaître dans ceux des ouvrages qui constatent, aux yeux du connaisseur, la dernière
période des monuments et des peintures de la ville de Pompéi.

Au mérite que cette copie nous découvre dans le tableau original, dont elle n'est probable-
ment, comme on l'a fait observer, qu'une répétition soumise à une mesure réduite, il faut en-
core ajouter celui de l'exécution technique. Rien de plus précieux que le choix des matériaux
employés dans l'exécution de l'ouvrage. La mosaïque est formée, non de pâtes de verre, mais
de marbres rares, taillés en petits cubes d'une singulière exiguïté, et assemblés avec une finesse
parfaite. On pourra juger jusqu'à quel point ce double mérite a été porté dans cette partie, en
considérant que la célèbre mosaïque des colombes au Capitole, la plus fine que l'on connaisse,
renferme, en un fort petit sujet, cent soixante cubes dans chaque once du palme romain, et
que, dans le même espace, mais pour un sujet d'une immense étendue comparative, la mosaïque
de Pompéi en renferme cent vingt-cinq.

(1) C. Bonucci, p. 21.

45
 
Annotationen