Des donations d'enfant a l'époque copte.
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DES DONATIONS D'ENFANT A L'ÉPOQUE COPTE,
THÈSE SOUTENUE A L'ÉCOLE DU LOUVRE.
PAK
Fe. de Villenoisy.
(Suite.)
Chapitee IV.
Nous sommes tout à fait porté à penser que, malgré leur singulière forme extérieure,
ces actes ne sont pas plus des donations que les mariages de l'époque pharaonique, faits
sous forme de vente, n'étaient des ventes. Nous préférons y voir des recommandations « pro-
duisant tous les effets qu'elles produisaient en Gaule à la même époque»; car les mêmes
causes produisent partout les mêmes effets. Nous en donnerons la démonstration un peu plus
loin, mais dès maintenant nous pouvons faire voir que, même en admettant l'esclavage des
enfants, il n'était ni complet, ni définitif; on peut le déduire des actes eux-mêmes.
A première vue, les parents déclarent donner leurs enfants au monastère pour y rem-
plir toutes les fonctions qu'il plaira à l'économe de lui imposer, et ils ne cessent d'insister
sur ce point; l'acte 8 dit qu'il «sera serviteur en tout service, le jour et la nuit»; le n° 8
ajoute «serviteur à jamais, comme un esclave acheté pour argent»; le papyrus Vaughan et
l'acte sans numéro de Londres trouvent une formule plus absolue encore : «Je veux que le
saint monastère soit seigneur de mon cher fils, des peines de ses mains, de l'esclavage de
son corps;» le donateur de l'acte n° 11, en décidant que cet esclavage durera toute la vie
de l'enfant, ajoute qu'il en est de même pour tous les serviteurs du monastère.
Cela est très clair, c'est l'esclavage le plus absolu. Il n'en est rien cependant, et nous
le voyons par la suite de l'acte. «Tout ce qu'il plaira à l'économe» est énuméré un peu
plus loin comme dans les papyrus 5 et Vaughan; il balayera et lavera le monastère, parera
l'autel et entretiendra les lampes, recevra les voyageurs et aura soin de la piscine qui leur
est réservée, etc. Ce sont encore là les occupations des frères lais dans les couvents. Mais
on a cependant disposé des enfants contre leur volonté, on les a donnés sans les consulter;
ils n'auront plus tard aucun moyen de se soustraire à leur condition pour s'en faire une
meilleure, et c'est là le propre de l'esclavage. Nullement, nous lisons dans le papyrus n° 13
relatif à la donation des deux enfants Sabine et Job : «. . .; pour qu'ils soient à jamais
» serviteurs de son saint monastère tous les jours de leur vie et qu'ils deviennent tels que
» tous les hommes qui sont offerts en vœux à tous les monastères, soit qu'ils veuillent habiter
»le monastère pour y servir selon la manière que le supérieur leur ordonnera, soit qu'ils
» veuillent habiter en dehors du monastère. En ce dernier cas, ils donneront leur revenu,
»pour y servir aux frais du sacrifice et du luminaire de l'autel.» Le papyrus 8 prévoit
également le cas où l'enfant donné viendrait à se marier. Cette hypothèse n'est pas du goût
du donateur, qui cependant ne semble pas avoir le moyen d'y mettre obstacle : «Et s'il
» arrive qu'il prenne femme, ce qu'à Dieu ne plaise, les fils qu'il engendrera serviront le
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DES DONATIONS D'ENFANT A L'ÉPOQUE COPTE,
THÈSE SOUTENUE A L'ÉCOLE DU LOUVRE.
PAK
Fe. de Villenoisy.
(Suite.)
Chapitee IV.
Nous sommes tout à fait porté à penser que, malgré leur singulière forme extérieure,
ces actes ne sont pas plus des donations que les mariages de l'époque pharaonique, faits
sous forme de vente, n'étaient des ventes. Nous préférons y voir des recommandations « pro-
duisant tous les effets qu'elles produisaient en Gaule à la même époque»; car les mêmes
causes produisent partout les mêmes effets. Nous en donnerons la démonstration un peu plus
loin, mais dès maintenant nous pouvons faire voir que, même en admettant l'esclavage des
enfants, il n'était ni complet, ni définitif; on peut le déduire des actes eux-mêmes.
A première vue, les parents déclarent donner leurs enfants au monastère pour y rem-
plir toutes les fonctions qu'il plaira à l'économe de lui imposer, et ils ne cessent d'insister
sur ce point; l'acte 8 dit qu'il «sera serviteur en tout service, le jour et la nuit»; le n° 8
ajoute «serviteur à jamais, comme un esclave acheté pour argent»; le papyrus Vaughan et
l'acte sans numéro de Londres trouvent une formule plus absolue encore : «Je veux que le
saint monastère soit seigneur de mon cher fils, des peines de ses mains, de l'esclavage de
son corps;» le donateur de l'acte n° 11, en décidant que cet esclavage durera toute la vie
de l'enfant, ajoute qu'il en est de même pour tous les serviteurs du monastère.
Cela est très clair, c'est l'esclavage le plus absolu. Il n'en est rien cependant, et nous
le voyons par la suite de l'acte. «Tout ce qu'il plaira à l'économe» est énuméré un peu
plus loin comme dans les papyrus 5 et Vaughan; il balayera et lavera le monastère, parera
l'autel et entretiendra les lampes, recevra les voyageurs et aura soin de la piscine qui leur
est réservée, etc. Ce sont encore là les occupations des frères lais dans les couvents. Mais
on a cependant disposé des enfants contre leur volonté, on les a donnés sans les consulter;
ils n'auront plus tard aucun moyen de se soustraire à leur condition pour s'en faire une
meilleure, et c'est là le propre de l'esclavage. Nullement, nous lisons dans le papyrus n° 13
relatif à la donation des deux enfants Sabine et Job : «. . .; pour qu'ils soient à jamais
» serviteurs de son saint monastère tous les jours de leur vie et qu'ils deviennent tels que
» tous les hommes qui sont offerts en vœux à tous les monastères, soit qu'ils veuillent habiter
»le monastère pour y servir selon la manière que le supérieur leur ordonnera, soit qu'ils
» veuillent habiter en dehors du monastère. En ce dernier cas, ils donneront leur revenu,
»pour y servir aux frais du sacrifice et du luminaire de l'autel.» Le papyrus 8 prévoit
également le cas où l'enfant donné viendrait à se marier. Cette hypothèse n'est pas du goût
du donateur, qui cependant ne semble pas avoir le moyen d'y mettre obstacle : «Et s'il
» arrive qu'il prenne femme, ce qu'à Dieu ne plaise, les fils qu'il engendrera serviront le