Voltaire; Thurneysen, Johann Jakob [Bearb.]; Haas, Wilhelm [Bearb.]: Oeuvres Complètes De Voltaire (Tome Soixantieme = Recueil Des Lettres, Tome V): Juillet 1755-1758 (A Basle: De l'Imprimerie de Jean-Jaques Tourneisen, Avec des caractères de G. Haas, 1789) [VD18 90793439]

D Ê M. D E VO L T A I RE. 63

LETTRE XXX.
A M. D U MARSAIS, « Paris,

Aux Délices , le 12 d’octobre.
Je bénis les Chinois , et je brûle des pastilles à
Confucius, mon cher philosophe , puisque mon étoffe
de Pékin vous a encore attiré dans le magasm
d'Adriène (*). Nous l’avons vue mourir , et le comte
dé Satie, devenu depuis un héros , et presque tous fes
amis. Toutapassé , et nous restons encore quelques
minutes sur ce tas de boue , où la raison et le bon
goût sont un peu rares.
Si les Français n’étaient pas si français , mes
Chinois auraient été plus chinois , et Gcngis encore
plus tartarè. Il a fallu appauvrir mes idées , et me
gêner dans le costume , pour ne pas effaroucher une
nation frivole qui rit sottement , et qui croit rire
gaiement , de tout ce qui n’est pas dans ses mœurs ,
ou plutôt dans ses modes.
M. le comte de Lauragais me paraît au-dessus des
préjugés , et c’est alors qu’on est bien. Il m’a écrit
Une lettre dont je tire presque autant de vanité que
de la vôtre. Il a dû recevoir ma réponse adressée à
l’hôtel de Brancas. Il pense , puisqu’il vous aime.
Cultivez de cet efprit-là tout ce que vous pourrez ;
c’est un ser vice que vous rendez à la nqtion. Vivez 3
inspirez la philosophie.
(* M. du Marsais avait eriseigné la déclamation à mademoiseHe
le Couvreur;