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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 13.1887 (Teil 1)

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Cournault, Charles: Ligier Richier, [2]: statuaire Lorrain (1500 - 1567)
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https://doi.org/10.11588/diglit.25558#0049

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38

L’ART.

toque et terminée par un vêtement à collet montant. Les trois autres clefs de voûte sont pareil-
lement décorées, en appliques, de bustes de femmes et de celui d’un guerrier. Ce sont également
des travaux postérieurs à ceux de Ligier ; mais ils témoignent de la persistance des sculpteurs
de son école à mettre, sous les yeux des chrétiens, les emblèmes de la fin de l’homme.

La plus belle reproduction, en ce genre funèbre, est la tête qui se trouve au Musée de
Verdun. La largeur des plans, la finesse d’exécution des moindres détails de cette boîte osseuse,
montrent tout le soin que le sculpteur a pris pour donner à son œuvre un attrait que ne lui
prêtait pas le sujet. Un maladroit ignorant a gravé au ciseau, sur l'occiput, l’inscription suivante :
Michel Angelo Bonarota sculp. Romœ, anno i49~- A Monza, on montre également, dans la
cathédrale, une tête de mort en marbre blanc, signée, mais tout aussi faussement, du grand nom
de Michel-Ange. A Verdun, la tête est en pierre de Saint-Mihiel, celle dont se servaient toujours
les Richier.

Cet examen rapide de quelques-unes des œuvres funéraires des Richier nous amène à parler
de la plus célèbre, de celle qui, presque autant que la Mise au tombeau, a propagé au loin la
réputation du grand imagier. Nous avons nommé la figure qui se trouve dans l’église de Saint-
Pierre, à Bar-le-Duc, et qui est désignée sous les noms d'Ecorché, de Squelette ou de Statue de
la Mort. Aucune de ces appellations n'est exacte, et il est difficile de lui en donner une qui le
soit. Ce n’est point un écorché, comme l’appelle le peuple ; des lambeaux de peau couvrent
l’abdomen et excluent cette désignation. Ce n'est point un squelette, les os étant presque partout
recouverts par des muscles. Ce n'est point la statue de la Mort, comme le dit Dom Calmet,
puisque, d’ordinaire, les peintres et les sculpteurs représentent la Mort sous la forme d'un
squelette complètement décharné. Pour se rendre compte de cette singulière figure, il faut
recourir aux faits historiques qui ont motivé la production de cette œuvre originale et dont
l’aspect saisissant impressionne au plus haut point l’esprit.

En 1544, lorsque Charles-Quint assiégeait Saint-Dizier, le marquis de Marignan, se trouvant
assis dans la tranchée, vit venir à lui René de Châlons. Il se leva et donna sa place au prince.
Celui-ci accepta, et peu après, un coup de feu parti des remparts lui fracassa l’épaule. Deux
jours plus tard, lorsque, entouré de ses officiers, René leur confiait ses dernières volontés, il leur
demanda qu'on fît sa portraiture fidèle, non comme il était en ce moment, mais comme il serait
trois ans après son trépas. Ce désir, transmis à sa femme, Anne de Lorraine, suggéra à cette
princesse l’idée de s’adresser au sculpteur dont le talent était universellement proclamé en
Lorraine. Ligier répondit à la confiance que la princesse lui témoignait par un trait de génie.
Sous l'apparence d’une forme matérielle altérée par la décomposition, il figura 1 ardent élan de
l’âme immortelle qui s’élève vers son créateur, et, par un geste plein de noblesse, lui offre son
cœur comme un symbole de sa foi et de son amour. Nous ne connaissons pas dans toute la
sculpture française une œuvre aussi profondément sentie, aussi vivement exprimée. Nous plaçons
cette figure bien au-dessus de celle du saint Barthélémy de la cathédrale de Milan, qui n’est en
définitive qu’un écorché savamment étudié, mais dont la vue ne remue en nous aucune fibre de
l’àme. Honneur au grand imagier de Saint-Mihiel, qui a su communiquer tant de vie à cette
apparence de la mort et donner tant d’éloquence à ce geste inspiré par la foi chrétienne !

Cette statue, n’offrant pas un caractère religieux qui pût être facilement apprécié par la
foule, ne fut pas détruite lorsqu’on saccagea les églises ; mais le cœur de vermeil contenant le
cœur véritable de René de Châlons devint la proie des stupides spoliateurs qui, pour voler le
métal, brisèrent la main qui élevait, en hommage à Dieu, le cœur de René de Châlons. Cette
main brisée fut remplacée plus tard, et on y ajouta une clepsydre à laquelle on substitua défini-
tivement un cœur de métal. Grâce à cette dernière restauration, la statue a repris sa signification
primitive : l’élan de la créature vers son créateur.

Dom Calmet vit la statue de la Mort, comme il l'appelle, dans une niche, sur un cul-de-
lampe, du côté de l’évangile, dans 1 église de Saint-Maxe, qui a été démolie. Aujourd’hui, séparée
du tombeau qui a disparu dans la tourmente révolutionnaire, elle se trouve dans le transept de
gauche de l’église de Saint-Pierre, au-dessus d’un autel recouvrant les restes de quelques membres
 
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