Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 13.1887 (Teil 1)

DOI Artikel:
Garnier, Édouard: Les industries d'art dans l'ancienne France, [1]: études sur les musées et les collections de la province
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.25558#0102

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
84

L’ART.

Chauvin et Ignace Harent, établirent à Valenciennes l’in-
dustrie de la dentelle. Elle s’y développa rapidement et
arriva bientôt à un si haut degré de perfection que la
renommée des Valen-
ciennes se répandit dans
toutes les cours d’Europe,
où on les recherchait non
seulement à cause de la
délicatesse de leur fabrica-
tion et de la richesse vrai-
ment artistique de leur
dessin, mais aussi pour
leur solidité et surtout leur
blancheur.

Importé dans les Flan-
dres et plus particulière-
ment à Ypres vers i65o, le
point de Valenciennes fut
imité partout, mais on fit
toujours une distinction
entre les imitations et ce
que l’on appelait les vraies
Valenciennes faites dans la
ville même et qui n’avaient
aucune concurrence à re-
douter. « Cette belle fabri-
cation, en effet, dit Dieu-
donné est tellement iden-
tifiée en quelque sorte avec
le sol, qu’il passe pour
constant que, si une pièce
était commencée à Valen-
ciennes, puis achevée hors
de cette ville, la partie qui
n’aurait pas été faite à Va-
lenciennes serait visible-
ment moins belle, moins
fine, moins parfaite que
l’autre, quoique continuée
par la même ouvrière, avec
le même fil, sur le même
carreau. Quelle peut être
la cause de ce phénomène ?

Est-ce l’influence de l’at-
mosphère, comme les Va-
lenciennois le prétendent ?

De fait, c’est que jusqu’à
présent cette dentelle n’a
pu être bien imitée dans
aucune ville de l’Europe,
et que cette fabrique ne
s’étend pas, dans le pays,
au delà de l’enceinte de la
ville. »

Cette particularité si
remarquable, que d’autres
écrivains ont constatée
également, tenait proba-
blement à ce que les den-
tellières de Valenciennes
travaillaient dans des sous-
sols— on pourrait presque
dire dans des caves — dont
l’humidité convenait au fil; dans la campagne, où le tra-
vail se faisait en plein air, le fil se séchait et perdait ainsi
beaucoup de sa souplesse.

Nous n’avons pas à entrer ici dans des détails techni-

I. Statistique du dévartement du Nord, tome II, page 3oj.

ques relativement à la fabrication des dentelles de Valen-
ciennes ; nous nous bornerons à dire que la profession de
dentellière, qui exigeait une assez grande habileté, était

réservée exclusivement aux
jeunes filles1, qui la quit-
taient quand elles se ma-
riaient, les soins à donner
à leur ménage et aux en-
tants ne leur laissant ni la
tranquillité, ni la délica-
tesse et surtout la propreté
des mains qui leur étaient
nécessaires ; ce travail, en
effet, était si minutieux et
si long, qu’une bonne ou-
vrière mettait quelquefois
une année entière, en tra-
vaillant tous les jours, été
comme hiver, de cinq
heures du matin à huit
heures du soir, pour faire
une paire de manchettes
qui lui était payée de 3oo
à 400 livres ; quelques des-
sins même étaient telle-
ment surchargés de dé-
tails 3 et demandaient de si
grands soins, que les plus
habiles dentellières ne par-
venaient pas à en faire plus
de cinquante à soixante
centimètres dans leur an-
née. Aussi certaines gar-
nitures en dentelles, sur-
tout lorsqu’elles étaient
« de la même main », c’est-
à-dire exécutées entière-
ment par la même ouvrière,
atteignaient-elles des prix
fort élevés3. Du reste, les
Valenciennes, même les
plus ordinaires, ont tou-
jours coûté très cher ; en
1788, à l’époque où Arthur
Young vint en France, la
dentelle employée pour les
manchettes d’hommes coû-
tait de 160 à 220 livres
l’aune, bien qu’elle n’eût

1. « Tous les ans, au mois
de juillet, les dentellières célé-
braient d’une façon brillante et
avec une très grande solennité
fête de leur patronne, sainte
Elisabeth. A cette occasion, les
apprenties dentellières et les
jeunes fileuses, qui avaient
réussi à donner à leurs premiers
travaux une certaine perfec-
tion, allaient les montrer de
porte en porte et recevaient
partout quelques pièces de
monnaie accompagnées de con-
seils et d’exhortations pour les
engager à redoubler d’efforts
afin de se perfectionner dans
leur métier. » (Cf. Hécart, Coup d’œil sur quelques usages particuliers
à la ville de Valenciennes.)

Voir la Barbe de dentelle ci-dessus.

3. On trouve dans les Comptes de Mm° DuBarry la mention sui-
vante : « 2 barbes et rayon de vraie Valenciennes; 3 aunes 3/4collet

grande hauteur; 4 aunes grand jabot; le tout de la même main.

2,400 livres. »

la

Barbe de dentelle. •— Époque Louis XIV.
(Appartenant à M™ Flandin.)
 
Annotationen