Dessin d un enfant de dou^e ans
J’en profite alors pour faire ressortir
aux yeux de tous la difference existant entre
l’imitation, forme inferieure de l’art, et
l’expression, sans laquelle l’art n’existe pas.
Cela me sert a expliquer aux eleves, et
ils le comprennent vite, que les qualites
d’art sollt independantes des moyens d’exe-
cution.
Voilä l’esprit d’une methode dont les
principes furent condamnes par Eug. Guil-
laume, avant meine qu’on en eüt tente l’appli-
cation. « On exalte l’ideal, a dit Guillaume,
on s’enivre de theories esthetiques avant de
s’etre rompu a la pratique et de s’etre rendu
maitre des lois qui la regissent».
Mieux que des paroles, ces dessins d’en-
fants prouvent que par l’etude directe et
libre d’apres n'ature, par la methode intui-
tive, la pratique s’acquiert avec certitude;
nous disons meine d’une maniere generale
qu’elle ne peut s’acquerir autrement.
L’on constate, par l’examen de ces des-
sins, qu’a l’age de 16 a 17 ans, non seule-
ment le goüt de l’eleve s’est developpe, son
sentiment personnel s’est affirme, mais qu’il
a acquis une sürete d’execution, de juge-
tnent, lui permettant de faire un dessin
correct, exact, precis, quand c’est necessaire.
Nous avons presente quelques croquis
et dessins faits en classe d’apres des Or-
ganes de machine et des fragments d’archi-
tecture. L’on peut se rendre compte que la
recherche des qualites artistiques, sur laquelle
est basee l’etude du dessin, teile que je la
concois, n’exclut pas la recherche des qua-
lites secondaires d’ordre et d’exactitude,
quand celles-ci ont leur utilite.
Cctte facon de proceder, ecartant de
l’etude du dessin tout procede scientifique,
m’a valu surtout les encouragements des
professeurs de science : ils y ont vu pour
leurs cours un element de progres, les
eleves accompagnant leurs devoirs de des-
sins plus consciencieusement observes.
J’acheve l’expose de cette direction
d’etudes en appelant de nouveau votre at-
tention sur les dessins et les croquis exposes
dans ce cadre et qui procedent du meme
esprit que les travaux d’enfants dont je
viens de vous entretenir. Ce sont encore
des dessins d’eleves, mais d’une ecole spe-
ciale. Quand on considere la hardiesse, le
charme, la vie, toutes les qualites diverses
que possedent ces ceuvres d’eleves et qu’on
pense a l’age des auteurs, 16 ä 18 ans en
moyenne, il est difficile de nier l’efficacite de
la methode intuitive et de discuter les resultats
acquis ä ce mornent des etudes. C’est alors,
et alors seulement, que l’appoint des con-
naissances scientifiques peut etre recom-
mande, surtout ä ceux qui s’engagent dans
la carriere artistique.
Les etudes d’anatomie, de perspective,
des styles, de l’antique peuvent etre faites
sans risquer de s’imposer et de nuire au
sentiment personnel.
Ces etudes ne sont pas faites alors,
avec la pretention vaine d’apprendre ä des-
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