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16 ÉCOLE ESPAGNOLE
dessin et de peinture, où devaient être fournis gratuitement, non seulement les leçons de
l’art, mais les objets matériels nécessaires à sa culture. Un siècle plus tôt, cet établis-
sement eût fait merveille, eût doublé le nombre des grands peintres. Il n’en sortit pas
même un élève de quelque valeur, pas un imitateur, pas un copiste, et vingt ans après
l’Académie n’existait plus, faute de professeurs et de disciples. »
L’art de l’Espagne ressemble à ce monument de l’Escurial duquel on a dit que c’était
un palais, un monastère et une prison. La peinture y présente, en effet, trois physio-
nomies correspondantes. On y remarque la foi religieuse qui engendre l’expression, le
goût de la terreur d’où naît le côté dramatique, et un sentiment fier de la réalité, d’où
procède l’excellence de l’exécution.
En France, avant la formation du musée dont MM. Taylor et üauzats ont enrichi le
Louvre, l’Ecole espagnole était complètement ignorée du public. Quelques rares amateurs
il est vrai, admis à voir l’admirable galerie du maréchal Soult, s’étaient habitués à vanter
une École aussi glorieuse. Malheureusement l’Angleterre nous a ravi à prix d’or les plus
merveilleuses toiles de cette galerie, et il s’est trouvé, chose bizarre ! qu’au moment où le
gouvernement français laissait passer la frontière à des chefs-d’œuvre qu’on ne pourra
jamais remplacer, MM. Taylor etDauzats, ses missionnaires, couraient l’Espagne à travers
les périls et les aventures, pour y former un musée, bien curieux sans doute et bien riche,
mais beaucoup moins riche et moins curieux que la superbe galerie du maréchal Soult.
Mais quoi ! ce musée même nous a échappé à son tour. A l’heure qu’il est, nous ne pouvons
connaître à fond les plus fameux maîtres de Séville et de Madrid qu’en traversant les
Pyrénées. Tout récemment, l’Exposition universelle du Champ de Mars est venue nous
apprendre qu’une renaissance se préparait en Espagne, et que des artistes tels que les
deux Madrazo, Palmaroli, Rosalès et Gonsalvo pouvaient former le noyau d’une École
future, digne de rappeler à la peinture espagnole ses grands souvenirs.
Celui qui veut jouir d’une belle vue doit monter sur des hauteurs d’où il puisse consulter
à la fois tous les points de l’horizon, passer en un clin d’œil de l’orient à l’occident, saisir
l’effet des contrastes et juger de l’inépuisable grandeur de la nature, en voyant d’une
part les rochers les plus âpres, de l’autre les verdures les plus riantes. S’il fût resté dans
la vallée, peut-être aurait-il aperçu le paysage par une échappée de vue, mais, au moindre
mouvement, le paysage aurait disparu à ses yeux. Il en est de même de l’historien de
l’art : il faut qu’il se place aussi haut que possible, de manière à dominer toutes les pro-
ductions, à embrasser sous des formes si variées ce qu’ont enfanté de prodigieux les
Pays-Bas et l’Allemagne, l’École de Venise et celles de Florence, Milan, Rome, Parme,
Naples, Séville, Paris, Londres. En voyant par combien déroutés différentes on est arrivé
à conquérir l’admiration des hommes, il y aura moins de confiance dans l’infaillibilité des
règles académiques, sinon de quelques grands principes; son ton sera moins dogmatique,
ses décisions seront moins tranchantes, et, au lieu d’assigner des limites au génie de
l’art, il restera ébloui, enchanté, comme dit Montaigne, devant une beauté illustre par
tant de visages.

* Charles Blanc.
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