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MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.

moyen d'arracher à la destruction les ouvrages anciens, et de se procurer des exemplaires
nouveaux, c'était de les transcrire. Cette nécessité avait l'ait, de 1 emploi des copistes, une
profession fort importante déjà et très-lucrative dès le temps des Romains'; elle reparut
au moyen âge, mais bien tarcP, et seulement après que les ecclésiastiques, mais les moines
en particulier, eurent porté tout le poids de la transition entre les de l'antiquité et
ceux du monde moderne. Qu'à Athènes ou à Rome, des esclaves ou des hommes d'une
condition obscure s'employassent à midtiplier des ouvrages écrits dans leur langue ma-
ternelle, c'est ce qui n'est pas merveille, et ce qui met une différence extrême entre le
moyen âge et l'antiquité. M. EHendorf ^ nous dit bien à son aise que la condition de ces
temps n'était point inférieure à celle des Grecs et des Romains, lesquels sans imprimerie

1. U n'entre pas dans notre dessein de donner à ce sujet
aucun détail pour le moment. On en trouverait de curieux
dans les articles rédigés par Ebert, pour l'encyclopédie
d'Ersch et Gruber (Liures. — Commerce de Mures, etc) ; et
il est bien à regretter que ce savant bibliographe n'ait pas
eu le temps de publier un travail qu'il préparait sur le
sort des livres durant le moyen âge. Cf. Scliœttgen, His-
toria liérariomm. — Battaglini, Dissertazione snl eom?wereM
de?' modem: e antich lUrag (Rome 1787). — J. B. de Rossi,
BMttetiino di arc/teologM eristiana, 1874, p. 51, sgg. ; et
1863, p. 62-68 ; etc.
2. Le mot Màliopola, avec sa véritable signification an-
cienne, ne parait guère qu'à la lin du xv° siècle en Italie
(Ferrare, 1474); cependant la profession existait avant
cette époque ; quoiqu'on ne voie guère paraître de libraires
qu'auxn" siècle, où Pierre de Blois parle (ep. 71) d'un certain
B*** pMàlieMS mango K&romm. La naissance de ce commerce
était une suite de l'érection des écoles où se rassemblaient
une foule d'étudiants. Mais, née des universités, la librai-
rie resta longtemps, et même jusqu'à l'imprimerie, comme
en tutelle sous la juridiction universitaire qui ne contribua
pas à lui donner beaucoup d'essor. Les premiers statuts
relatifs à cette profession ne paraissent pas être antérieurs
à <259. Puis, vinrent d'autres règlements encore en 1275,
1323, etc.; et dès lors (honni soit qui mal y pense), on
établit la censure sous plusieurs formes : approbation
exigée pour être copiste, inspection des ouvrages (soit
achetés, soit vendus) parles membres de l'université, ser-
ment imposé, garantie morale exigée pour exercer l'état de
libraire, etc., etc. Cf. Villanueva, Viage iiterario, t. XVI,
p. 225, sg.
En 1275, plusieurs établissements de ce genre existaient
à Paris, placés sous la surveillance universitaire selon tou-
tes les rigueurs de la pragmatique. L'université se réser-
vait de tenir la main à la modération des prix de louage et
de vente, comme à l'exactitude des copies. Les marchands
de livres étaient appelés, ou comme aujourd'hui : liàraires
(ii&rarii), et ce nom désignait des bouquinistes et des re-
vendeurs; ou stationarii, et ces derniers étaient propre-
ment les libraires, ou entrepreneurs d'éditions (de copies).
En 1323, à l'époque du statut le plus détaillé, Paris en
avait vingt-trois, tant ti&rarii que stationarii, dont deux
femmes. Cf. A.-F. Didot, .Essai s::r lu typographe (Encyclop.
moderne, t. XXVI, p. 713, svv).
L'école de Bologne réglementa également à outrance sur
les libraires, au xm" siècle (1259, 1289); et, comme l'uni-
versité de Paris, elle exigeait d'eux, entre autres serments,
celui de ne point vendre de livres aux étrangers. Mais là,

le commerce s'était subdivisé davantage : on ÿ distinguait,
outre un stationarins en titre de l'université, des libraires
qui faisaient le commerce d'ouvrages complets, et d'autres
qui ne se chargeaient que de parties d'ouvrages.
Pour l'université de Caen, cf. Do la Rue (Bulletin monu-
mental, t. III, p. 190, sv.).
Les restrictions officielles réduisirent la librairie, ainsi
organisée, à ne produire que des ouvrages usuels. Aussi la
liste de tous les livres existant alors à Bologne dans le
commerce, ne donne guère plus de cent ouvrages, et la
plupart sur des matières de jurisprudence. Ebert, au-
quel j'emprunte la plupart de ces particularités (op. c.,
art. HMcldtandel), déclare n'avoir jamais rencontré de ma-
nuscrit remarquable qui dût son origine aux spéculations
des sfafMHarM. Dans le fait, le commerce des manuscrits
prit un élan tout autrement vigoureux là où la police uni-
versitaire n'avait que faire avec cette industrie ; comme à
Florence, à Milan, et à Venise, au xv° siècle. Do même
encore, le berceau de l'imprimerie (que ce soit Harlem,
Strasbourg ou Mayence, il n'importe) ne fut point une ville
d'étude, mais une cité industrielle.
Quant aux Grecs, dont je m'occuperai du reste assez
peu, il semble que chez eux la transcription ait tourné
de bonne heure en spéculation. Je crois avoir pu obser-
ver à diverses reprises que l'on y dictait pour plusieurs
copistes qui entendaient l'orthographe chacun à sa tète.
Cela expliquerait plusieurs variantes dans des textes qui
n'ont pourtant qu'une même source. N'y serait-il pas arrivé
aussi parfois que l'entrepreneur suggérât certaines diffé-
rences à chacun de ses écrivains, afin de pouvoir vendre
ses livres en manière d'éditions diverses?
Mais, pour les abbayes, la copie des livres y est aussi
ancienne que la vie monastique en Occident. Car nous
voyons les moines de Lucullano occupés à cet office sous
l'abbé Eugypius, ami de S. Fulgence. Cf. Fulgentii epist. V
(Biblioth. PP., t. IX, p. 98).
Cette digression m'a paru nécessaire pour faire voir
tout d'abord, qu'il y aurait erreur à chercher hors des com-
munautés ecclésiastiques, le soin bien entendu de conser-
ver et de multiplier les livres durant l'époque dont nous
avons à parler. Cf. Savigny, Hist. dn droit romain. — Mei-
ners, sur l'Histoire de laliArairie et des MUiotàégnes dans tes
écoles SMpérienres auant l'imprimerie (N. Hanov. magazine,
1805). — Schœttgen, Historia iiùrHriornm et &i&iiopota,rHm,
ap.Poleni; et Supplémenta in Gram. Gronou...., t. HL Tira-
boschi, t. IV, libr. I, cap 4, n° 2.
3. Ellendorf, Die Karotinger, t. I, c. 4. L'auteur ne dissi-
mule pas son antipathie contre les catholiques.
 
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