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Le charivari — 11.1842

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Août (No. 213-243)
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FOLÂTRE^CI, FOLATREZ-LA,

DANS LE PALAIS DU HAUT EN BAS.

lu matin le prince Albert entra dans la chambre de sa
royale épouse, d'où quelques-uns prétendent qu'il n'é-

ment l'opinion d'Aristote, qui, s'il l'eût voulu, eût été
aussi un des plus fameux chapeliers de l'antiquité...
Mais il ne l'a pas voulu. — N'eu respectons pas moins
sa mémoire !

M. Jay à sa profession de chapelier joint la qualité de
phrénologiste. En conséquence, depuis longtemps i! s'é-
tait aperçu de l'agrément qu'on a.... d'être bien êoifK
Elevant son état au rang d'art, M. Jay veut que ses ciiens
soient coiffés selon toutes les règles de la symétrie, de la
géométrie et môme de la craniologie. Il y a trois ans, il
avait déjà publié un écrit ex-professo, dans lequel il prou-
vait victorieusement que chaque individu doit avoir une
coiffure différente, même les maris parisiens, coiffure bien
assortie à la physionomie, au tempérament et à la profes-
sion de chacun. Avant de vous essayer un chapeau, il
regardait votre front, votre nez, vos yeux et même s'il
s'agissait d'un député ventru ou fonctionnaire public, il
examinait l'envergure et la capacité des poches.

Pour rien au monde il n'aurait vendu un chapeau à
larges bords à un petit homme maigre ayant un nez en
cornet à piston, et si vous aviez une boule à la Jules Janin
il se serait fait écarteler plutôt que de vous laisser sortir
de son magasin coiffé d'un petit castor de clerc d'huis-
sier.

Au lieu d'imiter les vulgaires chapeliers qui, n'im-
porte quelle marmite ils vous placent sur la tête, disent
invariablement aux acheteurs : « Voilà qui vous coiffe à ra-
vir ! » M. Jay vous dit franchement ! «Ah ! quelle vilaine
figure vous avez avec ce chapeau-là ! ôtez-le tout de suite,
vous êtes atroce ; je n'ai jamais vu personne de plus laid
que vous ! » Vous voyez que la fameuse franchise du
marin n'est plus rien auprès delà franchise du chapelier!

Il est vrai que M. Jay, allant à la case indiquée par vo-
tre profil, vous en rapporte un feutre qui vous rend beau
comme Apollon. Il ferait joli M. ûupin l'aîné lui-même.

M. Jay avait fait un pas de géant dans la carrière de
la chapellerie, mais il n'était pas encore arrivé au but :
il savait bien ce qui convenait aux nez c amus ou aux nez
gigantesques, aux fronts larges ou aux fronts déprimés,
aux hommes gais et aux hommes mélancoliques, aux
garçons et aux hommes mariés; mais ie problème n'était
pas encore entièrement résolu.

Une tête humaine n'est pas seulement ornée d'un nez,
d'une bouche, etc. ; elle est encore ornée d'une foule de
bosses qui ont servi à Gall à trouver la clef de notre in-
telligence, et qui ne nous servent d'ordinaire qu'à nous
faire juter contre les chapeliers toutes les fois que nous
mettons un chapeau neuf.

Fort heureusement doué de la bosse de l'imagination.,
M. Jay se mit un beau jour .à inventer le Jayotype, ins-
trument dans lequel il fourre votre tête quand vous
allez lui demander un chapeau.

Cela fait, il vousprie de repasser au boutdecinq jours,
et alors vous trouvez dans la boutique du chapelier une
tête de plâtre qui représente votre propre boule et sur
laquelle on a confectionné un chapeau qui vous va com-
me un gant, ou, si la comparai-on ne vous convient pas,
qui vous va comme un chapeau très bien fait.

Grâce à cette nouvelle découverte M. Jay va incessam-
ment posséder dans son magasin la collection des têtes
de tous ses cliens ; ce sera un nouveau salon de Curtius
d'une utilité bien plus grande que la collection des ligu-
res de cire qui n'avaient nullement été moulées sur na-
ture.

Non-seulement le Jayotype sert au chapelier à prendre
une mesure exacte de la configuration de la tête de son
client; mais encore, grâce au système de Gall, M. Jay
parvient à découvrir le caractère dudit client, et à lui
confectionner un couvre-chef en harmonie parfaite avec
le moral de l'individu.

Bien plus, notre profond industriel, en palpant ces
protubérances significatives, se dit: « Ah diable ! voici un
monsieur qui à la bosse de la colère, il ne faut pas que
je manque de lui livrer son chapeau demain malin, car
sans cela il me ferait une scène. — Celui-ci a la bosse de
la flouerie... je ne lui ferai pas le moindre crédit ! etc. »

De sorte que les beaux-pères qui voudront prendre des
renseignemens certains sur leurs gendres futurs n'auront
rien de mieux à faire qu'à les mener acheter un cha-
peau chez M. Jay: à peine leur tête sera-t-elle dans l'ins-
trument que leur affaire sera dans le sac ; on pourra lire
dans leur cœur plus couramment que dans un volume
des éditions nouveau format.

C'est ainsi qu'à force d'etudier l'art de la tête, M. Jay
a vu ses chapeaux et son Jayotype se placer à la tête de
l'art.



MB

tait pas sorti, et il lui tint à peu près ce langage :

« My dear love, ne vous semble-t-il pas que nous
nous ennuyons furieusement depuis quelque temps déjà?
Je pourrais même me servir d'un verbe plus énergique,
mais je m'en dispense pour ne point épouvanter vos o-
reilles réservées. D'ailleurs, vous me comprenez. Sir Ro-
bert Peel et lord Palrnerston font de longs speachs, qui
ne sont point amusans du tout. On n'entend parler en
tous lieux que de séditions tant masculines que fémini-
nes, d'émeutes bacchiques, de coups de fusils et de mee-
tings. Les ouvriers, sous prétexte de prendre l'air, cas-
sent les vitres et se livrent du matin au soir à des chari-
varis vocaux qui troublent nos doux loisirs ; d'un autre
côté, le ministère nous entretient de divers accidens ar-
rivés à nos armes glorieuses dans nos possessions des In-
des-Orientales ; les Bœrers hollandais du Cap se révoltent
et taillent des croupières à nos soldats ; notre flotte de
Chine se bat contre la fièvre jaune à IIong-Kong. Je ne
sais pas, ô my prelly queen, ce que vous pensez de tout
cela; mais il me semble, à moi, que ça fait un total de
plaisirs infiniment peu divertissant. En conséquence, je
viens vous proposer un bill de joie que nous allons adop-
ter à l'unanimité. Allons nous promener. »

La reine Victoria médita un quart de seconde; puis,
abandonnant sa main à son chaste époux, elle prononça
cette parole remarquable,qui sera soigneusement recueil-
lie par les Marco Saint-IIilaire britanniques futurs : « J'y
consens. »

Alors en conseil privé ou établit ainsi qu'il suit le
menu de la promenade.

Art. 1. La reine, le prince Albert et leur suite se ren-
dront a Wohvich.

Art. 2. Ils s'embarqueront à bord du yacht 1e Royal
Georges, capitaine lord Adolphe Fitz-Clarence.

Art. 3. Ils feront voile pour Grenton, près de Leith,
où ils honoreront de leur présence le château du duc de
Buccleugh, qui fait construire une jetée à ses frais.

Art. 4. Le duc recevra Leurs Majestés à la tête des ar-
chers écossais de la garde dont il est capitaine.

Art. 5. On péchera a la ligne et au filet.

Art. 6. On chassera à courre et au tir.

Art. 7. On déjeunera, dînera, soupera le plus qu'on
pourra.

Art. 9. Les prinoipicules resteront à Windsor, confiés
aux soins de lady Lyttleton, leur gouvernante.

Art. 10. La promenade de Leurs Majestés durera quinze
jours.

Comme vous voyez, ce sera une véritable partie de
plaisir... d'autant mieux que dans l'article 8 (que j'avais
oublié) il est dit qu'il ne sera prononcé aucune espèce
de discours sous quelque prétexte que ce soit.

Si on nous demande comment nous sommes si bien
informés^nous avouerons,sous le sceau du secret,que tous
ces renseignemens nous ont été fournis par un jeune ra-
moneur caché dans la royale cheminée du private room
de la reine.

Aussitôt que ce menu a été promulgué, ç'a été partout,
un grand remue-ménage. La cour a fait ses malles ; lady
Cunnigham a serré ses pots de cold-cream ; miss Fitz-
Ilerald a vite emballé ses bouteilles de soda-water, et
lady Lindsay a promptement passé en revue sa collection
de spencers.

The gracious queen a d'abord rendu visite "à son yacht
de plaisance. Ce yacht est un boudoir de Sémiramis à
flot. Il est tendu en velours ; ses mâts sont en bois de
sandal ; sa coque, en bois d'acajou ; ses ponts, en palis-
sandre; sa quille, enébène; ses cloisons, en courbari;
il a des mosaïques pour planchers ; ses portes sont en
ivoire incrusté de nacre. Il y a des divans tels qu'en rê-
vait Mme Dubarry; des fauteuils qui auraient fait pâ-
mer Mme de Pompadour ; un lit.... ah quel lit !

Victoria a été presque satisfaite.

Cependant son pudibond époux lui a soumis tout bas
et en rougissant, le naïf jeune homme, une observation
qui a fait passer les joues de sa young wife du cramoisi
le plus pur au pourpre le plus ardent. La suite s'est re-
gardée, et, l'émotion gagnant de proche en proche, les
visages sont devenus progressivement écarlates ; si bien
que la cour ressemblait à un escadron de homards cuits à
point.

Enfin, grâce à l'intervention de ia première dame

d'honneur, la duchesse de Sutherland, le mystère a été é-
clairci.Quelques-unes des portes des appartemensprivésé-
taient ornées de glaces de la plus belle eau; le seul repro-
che qu'on pouvait leur faire était leur transparence par
trop irréprochable. Grâce à elles, les chambres royales
étaient à jour. Or, je vous demande s'il ne serait pas im-
prudent de laisser pénétrer la lumière entre des murs où
l'on ne peut faire que de l'amour, de la politique ou de
la diplomatie, toutes choses qui consomment encore plus
de mystère que les pièces de M. Scribe.

Lord Adolphe Fitz-Clarence a compris de quelle étour-
derie il s'était rendu coupable ; au milieu de l'émotion et
de la rougeur générales, ordre a été donné de supprimer
les glaces. Leurs Majestés sont alors entrées dans leur ap-
partement... Jetons un voile sur la suite.

Du reste, si la reine d'Angleterre tient à. se promener
de son plein gré, elle fait bien d'entamer vite sa prome-
nade, car, plus tard, ce pourrait bien être son peuple qui
l'enverrait promener.

MÉMOIRES INÉDITS

DE P.... MIT l'A.UPELl\E.

C'est VEneyclopèdiana de Paulin qui nous annonce la
publication prochaine de ces intéressans mémoires.L'his-
toire de l'Empire de M. Thiers et les Mémoires de M.
Soult n'ont qu'à bien se tenir.

P., dit Pampelune, que tout Paris connaît, est un
vieux brave, comme cela se voit à sa moustache grise et
à sa jambe endommagée. Il a été témoin de la bataille
d'Austerlitz ; c'est sa modestie qui l'empêche de nous
faire savoir jusqu'à quel point il n'a pas contribué au
succès de cette glorieuse journée. Ce qu'il y a de certain,
c'est qu'il y fut blessé.

Comme il parcourait le champ de bataille après la
victoire, il se baissa pour regarder l'heure à la montre
d'un officier autrichien qui venait de rendre son àtne à
Dieu, et pour lequel une montre, cet objet nécessaire,
était devenu un objet de luxe. Un caporal de kaiserliks
était couché tout près de là, ayant encore à la main le
bâton qui e»t la sanction du courage chez ce peuple bel-
liqueux. Au moment où P. se baissait, le bâton fît un
mouvement (pie personne n'a jamais pu expliquer et
tomba par deux fois sur le dos de P. La blessure fut lé-
gère; mais la cause surnaturelle de ce mouvement de
bâion donna à penser que le diable se mêlait de l'affaire.
P. se retira avec quelque précipitation et sans songera
rendre la montre à l'Autrichien immolé. Il l'emporta non
sans scrupule, et la vendit quelques jours après pour
rendre sa conscience libre. Le prix lui servit à acheter un
uniforme neuf, qu'il oublia de payer au tailleur.

Les Mémoires de Pampelune allant être bientôt pu-
bliés, nous n'anticiperons pas sur le récit du héros lui-
mê.ne. Qu'il nous soit seulement permis de dire ici que
ce vieux soldat, éprouvé sur tous les champs de bataille
de l'Europe, a vu partout le feu sans trembler, n'ayant
jamais tremblé, comme il le dit lui-même dans une
joyeuse saillie, que pour avoir été pendant plusieurs
jours sans voir le feu, durant la retraite de Russie. Il a
eu la langue gelée dans cette campagne ; c'est à cet acci-
dent qu'il doit le surnom de Mauvaise langue, que lui
a donné l'armée, qui ne cessa pas de l'adorer malgré
cette infirmité.

Il fut un des derniers qui mirent bas les armes en 1815;
il ne voulut rendre son épée que lorsqu'il eut appris
par le Moniteur la défaite de la France à Waterloo. Il la
rendit alors, non à la restauration, mais au fourbisseur
qui la lui avait vendue ; cela était plus digne de son ca-
ractère.

Il revint à Paris, où il se distingua par la part qu'il
prit à la rédaction de plusieurs journaux de l'opposition.
Il fut le collaborateur de M. deJouy au Miroir, à la Pan-
dore, feuilles qui contribuèrent si puissammentà l'édu-
cation constitutionnelle de sa belle patrie, aux progrès
des arts et de la littérature, aux développemens de la
philosophie, en un mol à toutes les conquêies de la paix
et de la civilisation. Son esprit, déjà très cultivé, se for-
tifia dans les luttes de la presse ; et tel était son zèle pour
l'étude qu'il lui arrivait rarement de s'endormir sans
avoir lu une page du Traité de lithotritie, par le docteur
Civiale, son illustre ami.

Ce fut à cette époque qu'il donna au théâtre du Gym-
na^a, en collaborai iou avec M. Vatout, le Nouvel habitant
de la Guadeloupe, pièce originale, qui n'eut pas le moin-
dre succès, mais qui, si elle eût été impriémée, se serait
relevée par par la lecture, dans l'estime de tous les gens
de goût. On n'oubliera jamais le personnage d'un perro-
quet qui était de l'invention de P., et qui fit autant d'hon-
neur à ses connaissances naturelles qu'à son talent dra-
matique, talent trop hardi, sans doute, pour le temps ou
il entreprit de le faire apprécier d'un public habitue aux
fadeurs de M. Scribe. Cet échec le fit renoncer au théâtre
et aux applaudissemens du parterre. On a remarqué qup
M. Vatout y renonça en même temps. L'histoire du théâ-
tre offre plus d'un exemple de cette nécessité qui force a

(La mite à la 4e page.)
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