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Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 12.1887

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Courajod, Louis: Les nouvelles acquisitions du département de la sculpture et des objets d'art du Moyen-Âge, de la Renaissance et des temps modernes au musée du Louvre, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.25011#0180

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155 LES NOUVELLES ACQUISITIONS DU DEPARTEMENT DE LA SCULPTURE.

interrogateurs doivent se tourner. Ce premier résultat, fourni par le raisonnement et par
l’analyse de l’œuvre, ne sera pas démenti par le fait. Le buste a été, en effet, acheté à
Naples par M. Simonetti, et, tout à l’heure, par l’étude approfondie que nous lui consa-
crerons, on verra que notre marbre n’avait pas dû s’écarter beaucoup de son lieu d’ori-
gine entre le moment de son exécution et celui de son transport à Rome.

Deux mots de description. L’inconnu qui est entré au Louvre, et que nous nomme-
rons bientôt, est un personnage vêtu comme on l’était en Italie au milieu et dans la
seconde moitié du xve siècle. Les médailles de Pisanello nous l’ont rendu familier. La
coupe des cheveux, qui sont portés longs, est celle des contemporains du maître véro-
nais, avec ce signe particulier que l’ample perruque se relève par derrière et est comme
entraînée par un coup de vent. Ce caractère est à noter, car il nous servira plus tard
dans nos identifications. L’expression de la figure est extrêmement éloquente; les yeux
sont durs, la bouche sensuelle et brutale, le nez d’une silhouette hardie. L’exécution,
souple et caressée dans le bas du visage, se montre singulièrement énergique dans le haut
de la tête et dans l’interprétation des rides, de ces rides qui pourront devenir pour nous
un élément de comparaison et un moyen de contrôle lors de l’assimilation définitive.
L’œuvre a un grand caractère décoratif. Elle est encore peinte notamment dans les
cheveux et dans les yeux, et se trouve revêtue d’une admirable patine brune, due vrai-
semblablement en partie à une longue exposition intérieure au dessus d’une cheminée.

Quel est le nom véritable de notre inconnu? Il faut d’abord détruire l’impression du
premier mouvement, qui, pour quelques personnes n’a pas été juste et qui pourrait
contribuer à accréditer une erreur. On sait avec quelle rapidité et quelle légèreté on
procède ordinairement en matière d’iconographie. Les moindres vraisemblances sont
acceptées comme des démonstrations. Bien que nous ayons protesté, dès la première
entrevue, le buste du Louvre nous a été livré comme un portrait d’Alphonse d’Aragon, et
cette opinion a conservé des partisans jusqu’au jour où nous en avons fait justice dans une
séance de la Société des antiquaires de France. En effet, l’admirable médaillon, daté de
1448, dans lequel Pisanello nous a conservé avec tant de netteté les traits d’Alphonse
d’Aragon, ne permet pas d’identifier ces traits avec ceux du personnage représenté par
le buste du Louvre. On peut surprendre tout au plus, entre les deux modèles, une vague
ressemblance, résultant d’un air de famille, mais les lignes du nez et de la mâchoire sont,
de part et d’autre, sensiblement différentes. Le profond sillon qui sépare, chez Alphonse,
le front de la naissance du nez ne se retrouve pas dans le modèle reproduit par le
marbre du Louvre. Le type du premier est visiblement plus fin, plus distingué, plus
aristocratique. Le type du second est plus brutal, plus commun, empreint à un plus haut
degré d’une fierté insolente. Cette dernière physionomie, d ailleurs, ne nous est pas
étrangère et, même, ce n’est pas bien loin de la première que nous aurons à aller la
chercher.

Alphonse d’Aragon eut un fils naturel, qui lui succéda sous le nom de Ferdinand Ier.
 
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