Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux (12.1887)

TRAVAUX D’ARCHITECTURE ET DE SCULPTURE DU DUC DE BERRY. 201

Quatre autres cheminées étaient disposées parallèlement entre les fenêtres, sur les
côtés est et ouest, et leurs énormes tuyaux, qui dominaient les murailles, donnaient à
cette partie de l’édifice un caractère d’originalité qui nous a été conservé par les gravures
de Georges Hoetnagle. Un oratoire orienté était établi en saillie sur les murs de la salle
près de la grande cheminée. La galerie était éclairée par huit fenêtres simples ou
doubles, ainsi que par les baies circulaires de l’oratoire et par une rose percée dans le
pignon nord. La grande porte d’entrée, ouvrant sur la galerie du cerf, la mettait en com-
munication avec la sainte chapelle. Deux portes placées de chaque côté de la cheminée
principale donnaient accès dans les autres salles du palais. Divers passages et des cou-
loirs pris dans l’épaisseur de la muraille conduisaient aux sous-sols et aux étages supé-
rieurs des salles avoisinantes. Après avoir été remise plusieurs fois en état, notamment
sous le règne de Henri IV, la grande salle fut incendiée en 1693 et ne fut jamais restau-
rée; elle a été démolie à l’époque de la Révolution. On peut se faire une idée de son
étendue en visitant les sous-sols encore intacts qu’elle surmontait et qui ont longtemps
servi de fabrique de salpêtre.

Au sud de la grande salle, il existait un second bâtiment divisé en deux étages et
mesurant la même largeur sur 28 m. 70 c. de longueur. La salle du rez-de-chaussée était
chauffée par deux grandes cheminées dont une seule est restée complète, tandis que
l’on ne retrouve que les arrachements de la deuxième. Des fenêtres percées dans les
façades est et ouest éclairaient cette salle. Plusieurs grandes portes accédaient aux salles
attenantes et des vis conduisaient aux jardins et à l’étage supérieur. La salle du premier
étage était décorée d’une cheminée monumentale adossée au pignon, dont le manteau
est conservé dans ses parties principales, et percée de grandes portes symétriques à
celles du rez-de-chaussée.

On trouvait à la suite un troisième bâtiment de même largeur sur 15 m. de longueur
qui était également divisé en deux étages et éclairé par trois fenêtres sur chaque' côté.
Des portes et des vis mettaient en communication les étages entre eux et avec les salles
du grand et du petit palais.

Plusieurs auteurs ont mis en doute l’achèvement de ces deux dernières salles que nous
croyons cependant avoir été terminées par le duc de Berry. La perfection de la sculpture
des cheminées et des tympans des portes situées aux étages supérieurs, ainsi que les
arrachements visibles aux extrémités des corniches qui supportaient la toiture et qui
sont traitées avec un grand fini, indiquent que le gros œuvre avait été achevé. Les
ornements des cheminées sont trop délicats pour n’avoir pas été sculptés sur place
après la pose de la charpente et de la couverture, bien qu’il fût. dans les traditions de la
construction du Moyen-Age de tailler dans l’atelier la majeure partie de la décoration
des monuments. Nous ne savons pas pour quelle raison et à quelle époque ces salles
furent détruites. Il est supposable qu’elles avaient été dévastées par un incendie ou par
l’un de ces ouragans si fréquents dans les devis de réparation du palais, et que les suc-