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Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 14.1889

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Molinier, Émile: La collection Spitzer
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https://doi.org/10.11588/diglit.22133#0130
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LA COLLECTION SPITZER

J’arrêterai ici ces courtes notes sur la Collection Spitzer; c’est un sujet dont, à vrai
dire, je n’aime pas trop à parler, car il inspire des réflexions singulièrement amères sur
la manière dont on entend la protection de l’art dans notre pays. Mais ce n’est pas cette
seule collection, qui va partir de France, qui m’inspire ces réflexions; car ce qui s’est
passé pour elle s’est passé pour toutes les autres qui, successivement, se sont éparpillées
aux quatre coins de l’Europe, sans nous laisser autre chose que la gloire d’avoir
contribué à les former. C’est un mince honneur, à une époque comme la nôtre, où l’on
se pique de ne pas avoir seulement des musées par ostentation, mais où l’on veut en
faire des établissements d'instruction. On trouve quarante millions pour bâtir un opéra,
on ne trouve pas les quelques millions nécessaires pour doter une caisse des musées. Ce
n'est pas ici le lieu de discuter si la subvention accordée par l’État au théâtre est utile, ou
si l’idée d’une caisse des musées est bonne. Tout au moins, peut-on dire que l’Etat, qui
soutient si largement l’art chorégraphique, pourrait aussi accorder d’une façon
égale ses encouragements aux arts du dessin. Nous vivons sur cette conviction que les
musées français sont les premiers du monde, et que, quoi que fassent les étrangers, ils ne
pourront nous dépasser ni même nous atteindre. Ce raisonnement fût-il vrai, n’eussions-
nous rien à gagner à acheter une collection comme le Musée Spitzer, on devrait l’ache-
ter cependant, rien que pour enlever des armes à nos voisins et les empêcher de com-
battre nos industries de luxe avec des modèles qui viennent en grande partie de chez
nous. Mais, il y a plus, si les musées de Paris sont assez riches, n’y a-t-il pas les musées
de province? Presque tous sont d’une pauvreté qui touche à l’indigence, et pense-t-on
que trois ou quatre mille objets, distribués entre les quinze ou vingt musées qui sont
aujourd’hui suffisamment organisés, n’eussent pas rendu à l’instruction d’immenses
services? Mais c’est une solution dont il faut faire son deuil à l’heure où le marteau du
commissaire priseur va entrer en scène.

Émile MOLINIER.
 
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