Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 19.1865

DOI Heft:
Nr.4
DOI Artikel:
Bulletin mensuel: Septembre 1865
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.18741#0394

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
BULLETIN MENSUEL.

381

aussi admirables par la puissance du caractère que par l’indifférence du procédé. Un
enfant ne manierait pas le crayon avec plus de négligence. Un artiste de génie, et
plus encore, un statuaire, pouvait seul, en quelques traits, modeler un masque humain,
et marquer ces rustiques profils d’un tel degré de vie, d’un tel sentiment de bravoure
et d’honneur.

Le Musée de peinture possède un Watteau de premier ordre, et un grand nombre
de tableaux français, parmi lesquels je signalerai des tableaux de concours de Gérard,
de Girodet, de Thévenin, de Berthélemv, et autres; série curieuse à tous les points de
vue, qui, réunie dans une salle spéciale, y deviendrait un sujet d’enseignement. Mais
ce qui m’a frappé par dessus tout, c’est une immense toile, traitée en esquisse, et
représentant la Prise de Troie. On l’attribuerait à M. Ingres, si l’on n’en connaissait
l’auteur. C’est le même goût de beauté, le même sentiment de l’antiquité grecque, le
même amour des choses exquises. Comment Je-peintre do Marcus Sexlus et do Didon
a-t-il pu s’élever si haut dans l’intelligence du grand art? La Prise de Troie est le
testament suprême de Pierre Guérin. La main défaillante qui ne sut pas achever cette
œuvre a dû bénir, en mourant, l’autour de VApothéose d'Homère.

Un amateur, M. Robin de Chalonnes, a apporté au Musée d’Angers un contingent
de dix tableaux, auxquels n’ont pas manqué les honneurs d’un beau baptême. Raphaël,
Roger van der Weyden, Boucher, Velasquez, tels seraient les parrains. Au fond, il y a
là un Tiepolo d’amore, un Prudhon à faire périr de jalousie M. Marcille, et une gen-
tille esquisse de Boucher. Quant au Raphaël, dont l'authenticité se prouve par des cer-
tificats, des catalogues et un naufrage, ce qu’il a de plus authentique, c’est sa lamen-
table histoire.

La mort de M. Turpin de Crissé a valu au Musée d’Angers une autre bonne fortune.
Il lui est arrivé du même coup, avec l’édition princeps de la Françoise de Rimini de
M. Ingres et quelques autres tableaux et dessins, un choix d’antiquités et de curiosités
du premier ordre, vases grecs, bronzes, médailles, bijoux, ivoires du moyen âge,
objets de la renaissance, non pas une collection, mais le cabinet soigneusement épuré
d’un homme du goût le plus délicat et le plus sûr. J’en aurai fixé la valeur, quand
j’aurai dit que M. Ch. Lenormant avait voulu en dresser lui-même le catalogue, et que
notre savant collaborateur M. de Witte a accepté, après lui, l’honneur d’une pareille
tâche.

Un catalogue, voilà ce qui manque au Musée d’Angers. Pourquoi? C’est qu’aujour-
d’hui les conservateurs des musées de province, se modelant sur les conservateurs du
Louvre, prennent leurs fonctions au sérieux. Ils se refusent à autoriser de leur nom
ces livrets incomplets et ridicules, dont on se contentait autrefois. Et, cependant, tout
conservateur, est-il capable de rédiger, de son propre fonds, un catalogue rationnel,
irréprochable, tant au point de vue des attributions et de la description que des
renseignements historiques? On sait que les fonctions de conservateur du musée se
donnent le plus souvent, en province, h un artiste qui les cumule avec celles de direc-
teur de l’École de dessin. De bonne foi, peut-on exiger qu’il soit à la fois un expert,
un érudit et un écrivain? A Angers, le Musée et l’École sont confiés aux soins d’un
peintre do talent, dont le nom a jeté quelque éclat aux deux derniers Salons, M. Dau-
ban, l’auteur d’Une Réception chez les Trappistes. M. Dauban, reconnaissant son
insuffisance, et désireux néanmoins de doter le Musée d’un catalogue bien fait,
demande à s’entourer des lumières d’hommes spéciaux, afin de ne pas porter seul la
responsabilité des attributions. L’administration municipale, à laquelle il s’adresse.
 
Annotationen