Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (19.1865)

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

nion apprendrait à ne pas se déjuger trop vite. Pourquoi r.e pas commencer dès main-
tenant? Puisque les amis de M. Duret ont eu la bonne pensée de réunir dans une
même salle les œuvres dispersées d’un statuaire éminent, qu’ils laissent les amis de
M. Heim, de M. Serrur, de M. Dien, tapisser les murailles avec les tableaux, les copies,
les gravures de trois artistes estimés, et qu’il y ait même, en quelque coin, une petite
place pour 1 ’Hébé de M. Protheau.

Il y a près de deux ans, le doyen des amateurs d’estampes, M. Robert Dumesnil j
terminait, à un âge avancé, sa longue et laborieuse carrière, et cependant il laissai
une œuvre inachevée. Il n’avait publié que huit volumes de son Peintre-Graveur fran-
çais. Cette tâche interrompue, il s’est trouvé deux hommes pour la continuer ou la
reprendre. M. Prosper de Beaudicour, commençant où Robert Dumesnil a fini, nous a
déjà donné deux volumes des peintres-graveurs du xvme siècle. Voici maintenant
M. Georges Duplessis qui remonte au point de départ, afin de combler les desiderata
des époques précédentes. RI. Georges Duplessis a été désigné par Robert Dumesnil
lui-même comme l’héritier de son œuvre, et il a pris à cœur ces honorables fonctions.
Le tome IX du Peintre-Graveur français x, qu’il vient de publier, rédigé en grande
partie d’après les notes du maître, atteste la même conscience et le même zèle d’éru-
dition. Il contient la description détaillée de toutes les estampes dues à la pointe ou
au burin de Jean Cousin, Étienne Delaune, Nicolas Béatrizet et Niccolo délia dasa,
Sébastien Vouillemont, Gérard Audran. L’importance des noms en dit assez sur l'intérêt
de l’ouvrage. Je me permettrai seulement de regretter que le titre adopté par Robert
Dumesnil se trouve plus que jamais détourné de son véritable sens. Le maître avait
donné l’exemple en introduisant Edelinck parmi les peintres ou dessinateurs qui ont
gravé. Mais, puisque M. Duplessis commençait une série nouvelle, pourquoi ne pas
intituler tout simplement son livre, Le Graveur français? Le titre ancien ne convient
plus au nouveau cadre. Si Jean Cousin rentre dans ce cadre, Gérard Audran doit en
sortir. Ni le maître au monogramme G. D., ni Vouillemont, ni Beatrizet, n'ont tenu
le pinceau ou gravé leurs propres dessins. Traducteurs des peintres, ils en sont restés
au Sculpsit. Étienne Delaune seul, comme dessinateur original, a droit à Vfnvenit.

Cette querelle d’enseigne, qui s’adresse, je le répète, aussi bien à M. Robert Dumesnil
qu’à son continuateur, ne doit pas nous empêcher de rendre justice aux laborieuses
recherches dont ce livre est plein. On en aura une idée, quand on saura que l’œuvre
d’Etienne Delaune comporte plus de quatre cents numéros. Jamais ce maître n’avait
été l’objet d’un travail aussi étendu, ou, pour mieux dire, aussi complet. Les divers
états sont étudiés avec un soin minutieux, et la description, quoique succincte, ne
néglige aucun détail. Au surplus, M. Georges Duplessis avait déjà donné la mesure
de ses talents d’iconographe dans la description de l’œuvre d’Abraham Bosse et dans
une étude sur Gérard Audran qu’il a dû se borner à résumer.

Sur Jean Cousin, même après les recherches de M. G. Duplessis, il y a encore bien
à dire. M. Deligand, maire de la ville de Sens, auquel on doit le peu que l’on sait de
certain à ce sujet, prépare une nouvelle notice, plus étendue et riche en faits inédits. Il
a bien voulu m’en promettre quelques pages pour la Gazette. M. Duplessis cite les
trois livres imprimés que Jean Cousin a incontestablement illustrés de ses dessins, et
un quatrième dont les illustrations peuvent lui être attribuées. On augmenterait de

1. Le Peintre-Graveur français ou catalogue raisonné des estampes gravées par les peintres et les
dessinateurs de l'Ecole française, tome ixe, publié d’après les désirs de l’auteur, par M. Georges Duplessis.
— Paris, Bouchard-Huzard et Rapilly, 1865. — 1 vol. in-8°.