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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

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Nr. 2
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Mantz, Paul: Rubens, 13
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https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0123

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RUBENS.

115

disait Rubens à Poiresc, lasciamo queste bagatelle. Elles ne méritent
pas un si long discours.

Sans insister sur ce procès qui lui causa quelque ennui, Rubens,
à la fin de l’été de 1635, parut vouloir reprendre goût aux affaires
publiques. Les circonstances militaires ayant changé, on croyait, à
Bruxelles, que les États de Hollande pourraient cette fois prêter
l’oreille à une proposition d’arrangement. A la demande d’Antoine
Triest, évêque de Gand, Rubens, sous le prétexte d’aller voir des
peintures récemment arrivées à Amsterdam, offrit de se rendre à la
Haj'e pour conférer avec le prince d’Orange. Il avait, le grand homme,
la manie du raccommodement. Un passeport fut sollicité en son nom,
et cette démarche inquiéta même le représentant de la France, très
peu soucieux de voir un accord s’établir entre les belligérants. Le
passeport fut refusé. Rubens resta chez lui, et ce fut là sa dernière
ingérence dans les affaires de son pays. Son zèle, depuis son retour
d'Angleterre, réussissait peu. On doit croire que l’artiste, d’ail-
leurs fatigué, était rassasié des émotions de la politique : désormais,
il ne songea plus qu’à vivre tranquille.

Cette situation morale se précise clairement lorsque, le 12 novem-
bre 1635, on voit Rubens, associé à sa femme, acquérir au prix de
93,000 florins carolus, le château de Steen, près de Yilvorde. C’était
une sorte de seigneurie. A cette acquisition, Rubens gagna l’honneur
d’être qualifié de Steenii toparcha dans l’inscription que son ami
Gevaerts rédigea plus tard pour la pierre de son tombeau. Il y gagna
aussi le plaisir de pouvoir, aux jours de libre rêverie, se promener
dans les champs qu’il n’avait vus qu’en courant la poste ; enfin, il lui
fut permis d’étudier de plus près les braves paysans de la Flandre
dans leurs rudes labeurs et dans les gaités amoureuses qui lui ont
inspiré la Kermesse, la Honda et le Croc en jambe. Propriétaire épris
de son enclos et de ses arbres, il devient le Rubens rural si puis-
sant, si franc d’allures, si enivré d’air respirable et de clarté.
L’ancien diplomate, retiré de la carrière, connut alors les prairies
en fleur, les soirs mouillés et les aurores violettes. Cette félicité lui
était bien due. Nul plus que Rubens n’avait mérité la joie d’intro-
duire dans sa biographie les fraîcheurs calmantes du paysage.

PAUL MANTZ

(La fin prochainement.)
 
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