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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

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Nr. 3
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Müntz, Eugène: Les dessins de la jeunesse de Raphae͏̈l, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0196

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186

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

l’un de ces énergumènes de la critique d’art s’est faite du génie du
maître, ou tout simplement pour peu qu’elle lui déplaise, vite on
l’élimine, on la supprime. L'esthétique est assimilée à l’anthropologie
ou à l’ethnographie : un artiste, étant donné son tempérament, 11e
peut produire que des œuvres strictement définies d’avance. Comme
si le propre du génie 11’était pas de dérouter sans cesse les prévisions
de la critique la plus savante !

En ce qui touche particulièrement l’histoire de la jeunesse de
Raphaël, on est parti de cette idée fausse que le développement du
fils de Giovanni Santi avait été non seulement rapide, brillant, mais
encore miraculeux, tout comme celui de son émule Michel-Ange, et
que, pour ses coups d’essai, il avait frappé des coups de maître. C’est
peu connaître cette organisation à part. A ne considérer que la
multiplicité de ses productions, la facilité semblerait avoir été son
trait dominant. Mais examinez-le plus attentivement : vous décou-
vrirez que, d’ordinaire, les idées de Raphaël ont besoin d’une longue
incubation pour arriver à la perfection. Sans aller aussi loin que
Michel-Ange, au dire duquel son émule ne tenait pas sa supériorité
de la nature, mais de l’étude, il est permis de soutenir que, abstraction
faite de quelques éclairs de génie, Raphaël s’est développé lentement,
laborieusement et, pour me servir de l’heureuse image de M. Klaczko,
en butinant de droite et de gauche, « avec son charmant instinct
d’abeille », sauf à dépasser le lendemain ses maîtres de la veille.
La preuve la plus éclatante de ses tâtonnements, c’est qu’il a eu suc-
cessivement sa manière ombrienne, sa manière florentine, sa manière
romaine, tandis que, dès le premier jour, le style de Michel-Ange
s’est affirmé avec une incomparable netteté.

Le passage par l’atelier du Pérugin a eu pour résultat de
troubler profondément l’adolescent qui cherchait sa voie. S’il lui a
révélé les secrets de ce coloris chaud, lumineux, ambré, il l’a aussi
familiarisé avec une manière de dessiner qui n’était rien moins que
pure ou fière : « gli fu col tempo di grandissimo disaiuto e fatica
quella maniera che egli prese di Pietro quando era giovanetto; la
quale prese agevolmente per essore minuta, secca et di poco disegno :
perciocchè non potendosela dimenticare, fu cagione che cou mol ta
difficulté imparô la bellezza degl’ ignudi ed il modo degli scorti
difficili dal cartone che fece Michelagnelo Buonarroti per la sala del
consiglio di Fiorenza 1 ». C’est lâ un jugement de Vasari que l’on 11e

I. Voy. aussi les judicieuses observations de M. Sclimursow, dans les
Br. Jahrbüclier, 1881, p. 138-139.
 
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