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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

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Nr. 4
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Bauchart, Ernest Quentin: Les grands amateurs d'autrefois: Madame de Chamillart
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https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0333

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318

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

le garder auprès de lui, en fit un contrôleur général des finances
en 1699 et, bientôt après, son ministre de la guerre.

Nous retrouvons donc Mme de Chamillart à Versailles, au faîte
des grandeurs, mais dépaysée, un peu gauche. Transportée, tout à
coup, par les hasards de la fortune, au milieu des splendeurs d’une
cour, considérée à juste titre comme la plus brillante de l’Europe,
elle y apporta une timidité qui lui valut le dangereux honneur d’être
remarquée de Saint-Simon. « Elle étoit, dit-il, vertueuse et fort polie,
mais elle ne savoit que jouer sans l'aimer, mais faute de savoir faire
autre chose, ni que dire, après avoir demandé à chacun comment il se
portoit. La Cour ne put la former, et, à dire vrai, c'était la meilleure
et la plus sotte femme du monde et la plus inutile à son mari. » Le trait
est vif, mais hâtons-nous de dire que rien ne le justifie. N’oublions pas,
d’ailleurs, que, si Saint-Simon avait beaucoup d’esprit, il était, de
parti pris, malveillant et injuste. Comment Mme de Chamillart, avec
son éducation bourgeoise, aurait-elle échappé à ses épigrammes,
quand ses meilleurs amis lui servaient de cible? Elle lui parut ridicule,
au milieu de ces femmes aux mœurs élégantes et faciles, qui savaient
être utiles à leurs maris, et la pureté de sa vie ne put la protéger contre
ses sarcasmes.

Amie de Mme de Maintenon, dont elle subissait l’influence et qui
lui avait inculqué ses habitudes de piété froide et de sévère étiquette,
Mme de Chamillart ne se laissa pas emporter, comme la brillante
comtesse de Verrue, sa contemporaine, par la passion de la curiosité
et la manie de la collection. Elle s’entoura de tableaux, d’objets d’art,
et des livres qu’elle aimait, sans s’occuper de la pièce rare ou de
l’édition précieuse. Contrairement à une opinion généralement
répandue dans le monde des bibliophiles, elle n’eut pas de biblio-
thèque proprement dite, et ne posséda que quelques volumes traitant
plus particulièrement de la théologie et de l’histoire; mais elle eut
le mérite d’en faire un ornement et de les habiller avec une sûreté
de goût qui n’a pas été dépassée. Tous sont reliés en maroquin de
différentes couleurs et la plupart sont doublés de même. Ils portent
son chiffre, deux C entrelacés, aux angles, et ses armes « d'azur, à la
levrette passante d'argent, accolée d'azur, au chef d'or chargé de trois
molettes d'éperon du champ, aliàs de sable; accolé de Le Rebours, qui
est de gueules à sept losanges d'argent, posées 3, 3 et 1 » presque
toujours frappées au centre de la doublure. Quelques-uns sont
recouverts sur les plats d’une dentelle ou plutôt d’une simple roulette ;
mais ils font exception. Le beau Corneille, estimé 20 livres au décès
 
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